Vous me faites pitié...

Conflit étudiant - grève illimitée - printemps 2012

Vous me faites pitié…
Lorsque j’aurai terminé ces lignes, la plus grande manifestation étudiante aura eu lieu. À l’instant où je les écris, je ne sais pas ce qu’elle sera, mais je souhaite une chose : c’est que les étudiants soient aussi nombreux qu’ils nous l’annoncent et qu’ils soient accompagnés de tout ceux et celles qui ont l’avenir du Québec dans les tripes.
Lorsque j’avais le privilège de leur enseigner au niveau collégial et qu’ils avaient une ou des revendications à faire valoir, je leur disais : je suis un enfant de la Révolution tranquille. Si les Paul Gérin-Lajoie et René Lévesque, entre autres, sous le gouvernement Lesage, ne nous avaient pas donné le privilège d’avoir accès aux études supérieures, je ne serais pas devant vous. Et si en 1968, alors que nous avons occupé les cégeps pendant cinq semaines (j’étudiais à Lionel-Groulx ), nous n’aurions pas eu le réseau des Universités du Québec, entre autres. Une chose est certaine, c’est qu’à ne rien faire, rien ne va changer. Lorsque nous avons occupé, manifesté et avons été matraqués, nous ne savions pas que nous aurions gain de cause, mais nous étions convaincus que nos revendications n’étaient pas de l’enfantillage.
Curieusement, l’autre jour je croise l’une de mes anciennes étudiantes qui me demande ce que je pensais des revendications actuelles. Le cœur pratiquement dans la flotte, je lui dis : ce qui me désespère, c’est que les étudiants soient encore obligés de descendre dans la rue pour se faire entendre. Tout comme on fut obligé de le faire en 68. À cette époque, cela pouvait faire sens. Mais qu’aujourd’hui, on en soit encore là, ça me désespère. Je suis outré.
Si l’on regarde et entend les propos du Premier ministre et de sa ministre de l’Éducation, on voit bien qu’ils méprisent totalement les étudiants. Ils ne daignent même pas une médiation. Dans l’esprit, ils nous disent : nous avons pris la bonne décision et nous ne cèderons pas aux pressions des étudiants (entendre babillage d’enfants gâtés). J’ai été dans l’obligation de fermer mon poste de télévision suite aux propos de la ministre à l’émission de «Tout le monde en parle», tellement j’étais désespéré (je ne qualifierai pas l’arrogance de son sourire). Et le ministre des Finances en rajoute dans son budget en se prétendant responsable et qu’il fallait tendre vers l’utilisateur payeur. Comme si la classe moyenne n’en donnait pas assez pour avoir toujours moins…
Je poursuivis donc avec mon ex-étudiante : on prétend que c’est ça la démocratie. Mais quelle est donc la différence entre la sourde oreille que fait présentement le gouvernement Charest et le centralisme démocratique à la Poutine en Russie qui ne veut entendre l’opposition qui se manifeste et qui traficote les élections (Peut-être a-t-il pris une formation avec M. Harper?)? Quelle est la différence entre l’énoncé suffisant de la ministre de l’Éducation qui prétend avoir pris la bonne, juste et équitable décision et l’autocrate au fédéral qui est le seul à prendre la bonne décision? Le Premier ministre et la ministre de l’Éducation ne les voient pas, ne les entendent pas et ne daignent pas recevoir les étudiants, puisque le tout à l’État a raison. Et nous, nous sommes que des plouques qui ne peuvent comprendre la juste et saine gestion des affaires étatiques. Le gouvernement majoritaire est élu pour avoir les mains sur le volant, comme nous le disait si bien M. Charest, et il connaît la bonne direction.
Monsieur le Premier ministre et Madame la Ministre de l’Éducation, permettez moi de vous dire que : vous me faites pitié et je ne partage d’aucune façon votre conception centralisatrice de la démocratie.
Quant à vous, chers étudiants(es), vous avez toute mon admiration et dites-vous que ce ne sont pas les conformistes qui seront les pionniers d’une plus grande justice sociale.
Fernand Cousineau, Ph.D Économiste

Squared

Fernand Cousineau9 articles

  • 9 481

Ph.D., professeur d'économie au Collège de Matane





Laissez un commentaire



6 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    25 mars 2012

    Et, pendant ce temps, nos professeurs du secondaire se plaignent que nos étudiants passent leur temps à texter en classe; ça permet aux distributeurs tels Bell, Koo-Doo, etc. d'emmagasiner ces dollars qui s'envolent.

  • Luc Bertrand Répondre

    22 mars 2012

    Messieurs Cousineau et Parent, j'espère bien que le mouvement étudiant se veut l'amorce d'une nouvelle révolution au Québec. Avec un gouvernement élu par "les autres", qui se sert sans aucune gêne des fonds publics pour réprimer durement les "éveillé(e)s", affaiblir notre rapport de force avec le Canada et remplir les poches de ses amis, cette nouvelle révolution pourrait être tout sauf tranquille...
    Effectivement, dites à votre fils que la manifestation étudiante pourrait ne pas donner les résultats espérés et lui coûter sa session, mais qu'elle pourrait accélérer la chute de ce gouvernement pourri à la moelle. N'eût été de Pauline Marois, on aurait pu ajouter "changer le cours de notre histoire".
    Lundi, j'écoutais la conversation de deux ados dans l'autobus 486 que j'ai prise au métro Beaugrand vers 16h45 lundi dernier. L'un des deux observait que la grève pourrait entraîner la chute du gouvernement Charest, mais réalisait également le vide (ou la "MORONsité"!) pour le remplacer. Ne voulant pas m'ingérer dans leur conversation, j'aurais voulu les féliciter et les encourager à tenir tête à ce régime quasi despotique.
    Quand on pense également au traitement d'un poids deux mesures réservé par l'escouade tactique du SPVM aux travailleurs d'Aveos mis à pied sans avertissement lundi par rapport à la "protection" des cadres de leurs employeurs (Aveos et Air Canada), le cadre de l'élection imminente pourra difficilement porter sur la véritable solution (l'indépendance du Québec) que sur la nécessité de mettre cette bande d'escrocs dehors une fois pour toutes.
    Alors qu'on a justement l'impression - et la population aussi - que Pauline Marois a une autre gang d'opportunistes à contenter si elle était élue (lécheurs de cul depuis son arrivée à la direction - surtout pendant la tempête de 2011 - et baîlleurs de fonds déguisés du PQ)!
    Rien pour inciter les indépendantistes à faire passer leurs convictions avant la triste réalité qui se dessine. Que Gesca, la SRC et les autres "faiseurs d'opinion" parviennent à torpiller la "dame de béton" ou non au moment propice.

  • Archives de Vigile Répondre

    22 mars 2012

    Bravo M. Cousineau. Hier soir, mon fils de seize ans, en secondaire 5 international, m’a dit qu’il participerait à la manifestation d’aujourd’hui (jeudi 22 mars) ce qui lui ferait manquer les cours de l’après-midi. En principe, je déplore comme tous les parents, que mon fils manque des cours mais cette fois-ci, je trouve que la raison est très valable et je l’approuve. L’école (Rive-Nord à Terrebonne) nous a envoyé hier soir un message péremptoire, préenregistré, nous avisant qu’il y aurait des conséquences pour ceux qui s’absenteraient. Cet après-midi, ils vont me téléphoner pour signaler son absence et je vais le défendre dans ce dossier car je l’approuve. Je lui ai expliqué ce matin, avant son départ, que ce qu’il fait est une forme de désobéissance civile et qu’il doit en assumer les conséquences. Il était déterminé et j’en suis fier. Il faut que ça finisse de toujours plier devant les aberrations des ‘’autorités’’. J’ai expliqué à mon fils que s’ils ne réagissent pas maintenant, c’est eux, de la relève, qui vont payer les pots cassés par tout ce système politique qui pourrit à vue d’œil. En tant que parent, nous ne devons pas laisser faire et s’écraser. Nous devons soutenir nos jeunes.
    On parle maintenant des étudiants mais je pense que les démonstrations récentes dépassent le cadre des études. C’est toute la population qui devrait descendre dans la rue pour se faire entendre, pour ‘’débarquer’’ ces profiteurs, ces voleurs. Je trouve le terme ‘’débarquer’’ particulièrement à point dans ce cas-ci, les sortir du bateau avant que celui-ci ne s’enfonce définitivement.
    Ivan Parent

  • Stéphane Sauvé Répondre

    22 mars 2012

    "Si les Paul Gérin-Lajoie et René Lévesque, entre autres, sous le gouvernement Lesage, ne nous avaient pas donné le privilège d’avoir accès aux études supérieures, je ne serais pas devant vous."
    Et plusieurs d'entre-nous non plus.
    Accroître la dette d'un étudiant dans un contexte économique comme celui que nous vivons, est irresponsable et improductif...
    Levons-nous...

  • Archives de Vigile Répondre

    21 mars 2012

    Merci bien de votre soutien M.Cousineau.
    C'est à la fois surprenant et bien encourageant de voir qu'un économiste (autre que Léo-Paul Lauzon) soit capable de dire la vérité, autre que la rhétorique fallacieuse des soi-disant "experts en économie" du fameux "Institut" (de propagande) économique de Montréal, au service de l'élite des affaires par l'entremise de TVA/LCN et de V.
    Mais vous, malheureusement, ne serez jamais invité dans ces salles de nouvelles et d'affaires publiques pour les contredire, la droite américaine étant bien trop importante pour être attaquée en prenant pied ici, et bien trop fragile, quand elle est confrontée à la vérité et la logique, même simple...
    Yannick ST-Jacques, étudiant en science politique à l'UQAM.

  • Archives de Vigile Répondre

    21 mars 2012

    Ce gouvernement est en fin de régime. Les individus qui le composent sentent bien l’énorme mépris de la population à leur endroit. C’est pour cette raison qu’à l’heure actuelle ce gouvernement est DANGEUREUX. Il est prêt à tout pour se venger contre elle et ses intérêts supérieur. Nous sommes, je crois, engager dans une spirale. Le climat politique actuel me rappel la fin de régime du gouvernement Bourassa. Rendu où nous en sommes, je crois que le peuple québécois devrait demander la démission de ce gouvernement. Le gouvernement Charest n’a plus la confiance du peuple.