Vibrante déclaration d'amour de Sarkozy au Canada

Dumont s'indigne, Charest se fait rassurant

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Québec 400e - imposture canadian

Le président français Nicolas Sarkozy n'entend plus opposer les sentiments d'amitié de la France pour le Québec et le Canada. Au contraire, il veut les «rassembler», a-t-il déclaré hier en livrant une vibrante déclaration d'amour au Canada.
«Il faut que vous le sachiez, la France aime beaucoup le Canada», a dit le président à la gouverneure générale Michaëlle Jean, aux côtés de qui il rendait hommage, en Normandie, aux soldats canadiens tombés pendant la Deuxième Guerre mondiale.
Ce n'est pas la première fois qu'un dirigeant français témoigne de la reconnaissance de la France envers le Canada. Cette fois-ci, on assiste toutefois à un changement de ton important, Nicolas Sarkozy affirmant assez clairement que la France ne veut plus avoir à choisir entre le Québec et le Canada. Certains pourraient voir là la fin de la doctrine de «non-ingérence et de non-indifférence» formulée par le ministre gaulliste Alain Peyrefitte en 1977.
«Vous savez que nous, on est très proches du Québec, mais je vais vous le dire, on aime beaucoup le Canada aussi. On n'oppose pas nos deux amitiés et nos deux fidélités. On les rassemble pour que chacun comprenne que ce que nous avons en commun, on va le tourner vers l'avenir pour que l'avenir du Canada et de la France soit l'avenir de deux pays pas simplement alliés mais deux pays amis», a déclaré Nicolas Sarkozy, qui s'exprimait sans notes.
Cette déclaration confirme les propos tenus en mars par l'ex-premier ministre Jean-Pierre Raffarin. «Le président est contre le ni-ni [non-ingérence, non-indifférence]. Il veut s'impliquer. Il veut participer», avait analysé M. Raffarin.
Le président Sarkozy a fait cette sortie au cimetière canadien de Beny-Reviers, en Normandie, où il s'est rendu -- ce qui constituait aussi un signal fort à l'intention du Canada -- en compagnie du premier ministre François Fillon, du président du Sénat et du président de l'Assemblée nationale, c'est-à-dire les personnages les plus importants de l'État en vertu de la Constitution de la Ve République. Le ministre de la Défense, Hervé Morin, était également présent.
Sortant de son texte, M. Sarkozy a assuré que tous les citoyens français savent ce qu'ils doivent au Canada et à ses soldats qui ont fait le «sacrifice suprême».
«On aime le Québec, mais on aime le Canada. On aime les deux, a martelé Nicolas Sarkozy. Et ceux qui sont morts ici, on ne leur a pas demandé de quelle région ils venaient. On savait de quel pays ils venaient. On ne leur a même pas demandé quelle langue ils parlaient. Ceux qui sont sous terre, même s'ils ne pratiquaient pas notre langue, ils nous ont sauvés et nous ont aidés.»
Dumont inquiet
À Québec, le chef de l'opposition officielle, Mario Dumont, s'est dit inquiet de l'évolution de la relation Québec-France qui, selon lui, porte de plus en plus l'empreinte du Canada alors que le premier ministre Jean Charest se complaît dans la position du «cocu content».
«Plus on voit la façon dont cette relation devient plus canadienne dans l'approche, moins bilatérale Québec-France, plus on en voit les contours, plus on s'inquiète», a livré M. Dumont au cours d'un point de presse qui suivait sa rencontre avec le ministre-président de la Bavière, Günther Beckstein, en visite au Québec.
«Dans un ménage amoureux à trois, parfois la ligne devient bien mince entre l'amant négligé et le cocu content», a illustré Mario Dumont.
Le chef adéquiste estime que le premier ministre se retrouve dans «une situation inconfortable» au moment où sont lancées en France les festivités du 400e anniversaire de la fondation de la ville de Québec. Personne n'aurait pu imaginer qu'«à l'aube des fêtes, le Québec allait se retrouver dans l'ombre du gouvernement fédéral et de la gouverneure générale du Canada», a fait valoir M. Dumont.
Piqué au vif, Jean Charest est passé à l'attaque un peu plus tard lors d'une conférence de presse qui a suivi la signature d'un accord de nature économique avec la Bavière. Selon le premier ministre, Mario Dumont «fait plutôt pitié» sur la question des relations internationales comme sur d'autres questions, et il a peu de choses à apporter, «à part nous livrer des insultes, parce que c'est à peu près tout ce qu'il lui reste comme contenu politique».
Jean Charest ne s'inquiète aucunement de l'état des relations entre le Québec et la France. Elles n'ont jamais été aussi fortes, a-t-il soutenu. Il a cité diverses réalisations, dont la signature de la Convention sur la protection et la promotion de la diversité culturelle ainsi que la mission économique conjointe de la France et du Québec au Mexique.
Le premier ministre a aussi rappelé qu'il a rencontré Nicolas Sarkozy à trois reprises depuis 2007. «Je pense que la France peut avoir des relations avec le reste du monde et ça n'enlève rien à la relation que la France a avec le Québec, Nous ne sommes pas dans un jeu à somme égale [zero-sum game]», a-t-il fait valoir.
Hier, la chef du Parti québécois, Pauline Marois, a critiqué Jean Charest pour son absence au lancement, hier à La Rochelle, des festivités du 400e anniversaire de Québec en France. Lors de la période de questions à l'Assemblée nationale, elle a aussi accusé le premier ministre de nier l'histoire lorsqu'il affirme que le Québec a fondé le Canada.
«Un peuple s'est installé en Nouvelle-France au début de ces 400 ans, un peuple qui a été conquis, un peuple qui a été annexé, qui, malgré tout, a conservé ici, bien vivant, le français», a souligné Mme Marois. «C'est la nation québécoise et c'est la capitale de cette nation-là que l'on célèbre à l'occasion du 400e anniversaire de Québec.»
M. Charest a rappelé hier que «les Québécois étaient des Canadiens avant que le Canada existe. On nous nommait "Canadiens" avant même que le Canada existe». Il a ajouté que «le Canada n'existerait pas sans le Québec».
«Le gouvernement fédéral fait partie des célébrations» du 400e, a dit M. Charest. «Évidemment, des gens comme M. Dumont, Mme Marois et Gilles Duceppe s'opposent au fait que le Canada existe [...]. C'est leur problème, ce n'est pas le problème des Québécois.»
Les voiliers voguent
La journée d'hier a été marquée en France par le départ de la Grande Traversée, une flotte de plusieurs dizaines de voiliers qui a mis le cap sur Québec... sans rien connaître de la polémique qui faisait rage au sujet de la place prise par le Canada dans ces manifestations.
«Il n'y a personne ici qui trouve qu'il y a une controverse quelconque», a déclaré le ministre Philippe Couillard. «Il n'y a aucune ambiguïté sur ce qu'on célèbre. On célèbre les 400 ans de Québec, 400 ans de présence française en Amérique. Et ça s'adonne, comme on dit, que le Québec est dans le Canada, que le Canada participe aux célébrations. À mon avis, c'est une création un peu artificielle, cette polémique, qu'on essaie d'entretenir mais que nous n'entretiendrons pas.»
Arrivée à La Rochelle en début d'après-midi après sa visite en Normandie, Michaëlle Jean a tout de même été la vedette de la journée, s'offrant un bain de foule enthousiaste aux côtés de la candidate à la dernière élection présidentielle, Ségolène Royal. Mme Jean a préféré sourire à l'évocation de cette affaire, invitant les journalistes qui l'interrogeaient à ce sujet à «rester dans l'esprit de la fête».
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Avec la Presse canadienne


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