Les élections québécoises pressenties un moment pour cet automne ont été reportées à une date ultérieure, au printemps 2014 de l’avis de plusieurs observateurs. Ce qui permettra aux différents partis politiques de mieux se définir par rapport au Québec choisi et aux moyens d’y parvenir. Proposer en quelque sorte un projet de société authentique et rassembleur qu’on ne parvient pas à imaginer depuis les Jean Lesage (Maître chez nous), Daniel Johnson père (Égalité ou indépendance) et René Lévesque (Identité et souveraineté). Le projet de loi créant la Charte de la laïcité, rendu public par le gouvernement Marois le 7 novembre, s’inscrit dans cette démarche au sein du Parti québécois.
Malgré qu’il soit long, l’intitulé annonce clairement le sujet traité, comme c’est le cas pour la Charte de la langue française. Plusieurs se sentiront plus à l’aise avec cette formulation qui conserve toutefois le terme « valeurs » : Charte affirmant les valeurs de laïcité et de neutralité religieuse de l'État ainsi que d'égalité entre les femmes et les hommes et encadrant les demandes d'accommodement.
La Charte porte sur trois valeurs parmi la diversité et à la richesse des valeurs qui sont à la base du vivre-ensemble et de la marche du peuple québécois vers une société à la fois juste, égalitaire, identitaire et consciente des défis que pose un monde tiraillé par la croissance économique, les disparités sociales et territoriales et l’impératif d’un développement durable.
Les valeurs que porte un peuple irriguent les ambitions collectives pour l’accomplissement desquelles les choix et décisions politiques constituent les pièces de la mosaïque d’un projet de société. Les lois, politiques, chartes et réglementations qu’adopte un gouvernement viennent enchâsser les ambitions collectives en vue de leur réalisation.
Les valeurs sont les principes idéaux auxquels se réfèrent les membres d’une collectivité pour fonder leur jugement, pour diriger leur conduite et se projeter dans l’avenir. Selon le sociologue Guy Rocher, une valeur « est une manière d’être ou d’agir qu’une personne ou une collectivité reconnaissent comme idéale et qui rend désirables ou estimables les êtres ou les conduites auxquels elle est attribuée ». Une définition qui rejoint la pensée d’Aristote : « Le Bien est certes désirable quand il intéresse un individu pris à part, mais son caractère est plus beau et plus divers quand il s’applique à un peuple et à des cités entières ».
Un système de valeurs est ainsi préalable à toute culture, à toute morale. On ne peut pas remonter plus haut pour expliquer les aspirations et le comportement d’une personne ou d’une collectivité. Les valeurs s’incarnent dans un comportement, une œuvre… un projet politique.
Les XVIIIe et XIXe siècles ont été féconds en valeurs : liberté, égalité, fraternité, progrès, etc. La philosophie des Lumières qui a réclamé l’abolition des privilèges a sublimé les valeurs de liberté et de justice. La « République » est un condensé de ces valeurs.
Plusieurs prétendent que la prédominance des valeurs collectives, celles qui ont pour fonction d’unir et d’exalter un groupe, est en déclin. Doit-on pour autant conclure à leur disparition ? La résistance de certaines valeurs à une idéologie ambiante, témoigne de leur vitalité. C’est ainsi que l’honnêteté, la fierté, la solidarité, la franchise, la tolérance, l’équité, le respect de la nature, la responsabilité collective, la démocratie participative... sont aujourd’hui des valeurs bien vivantes dans notre société. La responsabilité collective s’impose dans la mesure où les dégâts infligés à la nature et à la vie grandissent de façon inquiétante. Les manifestations populaires envers certaines dérives et les vives réactions suscitées par les révélations de la commission Charbonneau en témoignent.
Sous prétexte que toute valeur dominante est oppressive, les adeptes du multiculturalisme exigent que soit présentée une multiplicité de valeurs où chaque groupe puiserait ce qui lui plaît. Mais ce culte de la différence évolue souvent vers l’intolérance.
Le système d'enseignement en français au Québec contribue à forger la langue identitaire et l'appartenance culturelle. La langue contribue à la transmission de l'identité. Parlant de la langue d’enseignement et de travail, le ministre Camille Laurin disait que c’était : « le fondement même de l'identité d'un peuple, ce par quoi il se reconnaît et est reconnu, qui s'enracine dans son être et lui permet d'exprimer ce qu'il est. » Depuis la Conquête, le peuple français issu de la Nouvelle-France a fait de la défense de sa langue et de sa culture, donc de son identité, une ambition collective qui a nécessité des luttes incessantes.
Les valeurs de justice, d’égalité, de solidarité, de respect, de progrès… imprègnent les autres dimensions de la société québécoise et inspirent autant d’ambitions collectives. Citons l’égalité des chances, l’accès au travail pour tous, le partage de la richesse, l’égalité entre les femmes et les hommes, la protection de l’environnement, la sécurité, l’accès à des services diversifiés et de qualité.
Un gouvernement élu cherchera à comprendre les ambitions collectives, à en favoriser l’expression et à les traduire dans un projet de société qui légitimera son programme d’action politique concrétisé par un ensemble de stratégies, lois et mesures diverses mises en œuvre pour que s’accomplissent ces ambitions. Il y a à cet égard une pédagogie qui ne doit pas être négligée, celle qui permettra au citoyen de faire le lien entre ses valeurs, les ambitions collectives qu’il partage et les actions du gouvernement.
Au cours des derniers mois, Madame Marois et plusieurs de ses ministres ont dévoilé, progressivement et en pièces détachées, des composantes majeures du programme d’action du gouvernement : Projet de loi sur les mines, Politique de souveraineté alimentaire, Soins à domiciles, Mourir dans la dignité, Troisième politique de la ruralité, Plan de solidarité, Électrification des transports, Politique économique et marchés d’exportation, engagement en faveur d’un Projet de loi-cadre sur la décentralisation, Laïcité de l’état, Égalité entre les hommes et les femmes, Encadrement du port des signes religieux, etc. Y a-t-il un plan d’ensemble, une stratégie globale sous-jacente à chacune de ces décisions, une vision pour un « avenir radieux » du Québec ? L’indépendance, certes, mais quel Québec veut-on conduire à la souveraineté ?
Le délai que se donne le gouvernement avant le déclenchement les prochaines élections devra servir non seulement à dévoiler d’autres actions, mais à présenter le projet de société qui inspire ces actions et qui est de nature à réunir et à mobiliser la population.
Gouvernance souverainiste
Valeurs, ambitions collectives et projet de société
Tribune libre
Bernard Vachon6 articles
Bernard Vachon, Ph.D.
Spécialiste* en développement local et régional
*Professeur à la retraite du département de géographie de l'UQAM, l'auteur réside à Québec ainsi que dans le Bas Saint-Laurent
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Bernard Vachon, Ph.D.
Spécialiste* en développement local et régional
*Professeur à la retraite du département de géographie de l'UQAM, l'auteur réside à Québec ainsi que dans le Bas Saint-Laurent
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8 commentaires
Archives de Vigile Répondre
26 novembre 2013Pour la ou les prochaines élections Québecoises voici un Projet détaillé sur mon Forum : Projet MPQ , qui consiste à distribuer les terres pour vraiment s'approprier le Territoire du Québec avant les Canadians et les Multinationales minières , donc une véritable distribution universelle de près de 40% de notre TERRITOIRE comme cela se fit à plusieurs reprises de notre histoire et sauva des pans entiers de notre Nation francophone . Le Slogan pourrait être LE QUÉBEC AUX QUÉBECOIS . Qui voterait alors Pour ce GOUVERNEMENT ? Je crois que ce serait au moins 90% des citoyens du Québec . Bonne lecture , je donne ce projet aux plus intelligents . Voilà nos vrais VALEURS
MICHEL GUAY
Archives de Vigile Répondre
24 novembre 2013M.Gignac, vous affirmez qu'au PQ tout le monde sont là pour leur réussite personnelle. Vous portez des jugements trop gros pour être vrais. Vous prêtez des intentions aux autres trop gratuites et invraisemblables pour que je vous prenne au sérieux.
Voici un autre exemple d'affirmation gratuite : vous êtes certains que je n'étais pas au monde quand le PQ fut fondé. Quel plaisir pour moi de péter votre grosse bulle car je vote aussi PQ depuis plus de 40 ans et j'aie voté oui à tous les référendums à date. Soyez donc plus humble et plus aimable si vous voulez qu'on vous prenne au sérieux. Vous grossissez tellement les choses que je me demande bien quelle haine vous habite pour détester autant Mme Marois et le PQ.
Archives de Vigile Répondre
23 novembre 2013Je penses tout a fait comme Mme Emilie B
A l prochaine election je cocherai PQ
Lorsque Boisclair etait chef (je me melangeais toujours dans son nom et l'appelait souvent Boisvert, sans malice , mon mari me reprenait)
Cette fois la j'ai coche vert
Aux 2 referendums c'etait OUI
Pour la charte de laicite s il y avait referendum
Ce serait OUI
Archives de Vigile Répondre
23 novembre 2013@ Émilie B
Quelle partisannerie? Vous n'étiez même pas au monde (j'en suis sûr) lorsque le PQ a été fondé. Moi j'y étais! Ça fait déjà 45 ans et le pays n'est toujours pas là. Des opportunistes, des carriéristes comme les députés du PQ, j'en ai vu défiler dans ma vie et nous attendons toujours après le pays. Contez-moi pas d'histoire! Avec le temps, vous allez peut-être finir par comprendre comme d'autres Québécois, j'espère! En passant, je ne suis membre d'aucun parti.
André Gignac 22/11/13
Archives de Vigile Répondre
23 novembre 2013M. Gignac, Mme Marois vient d'arriver au pouvoir, laissez lui le temps de préparer le terrain pour se faire. De plus, laissez les gens se faire à l'idée qu'une femme peut diriger un pays. Elle a 2 problèmes à surmonter pour le moment, le sexisme et le fait que le PQ est minoritaire. Me semble qu'il vous manque un peu de recul, une bonne analyse de la situation et de l'objectivité pour penser que l'indépendance va se faire par miracle, juste en y pensant.
Je crois que vous ne savez pas faire la part des choses et que la partisanerie vous aveugle.
Archives de Vigile Répondre
23 novembre 2013@ Émilie B.
Où est le pays avec Marois? Nous ne sommes pas sortis du bois!
André Gignac 22/11/13
Archives de Vigile Répondre
23 novembre 2013Vous avez bien identifié la démarche de Mme Marois pour se diriger vers l'indépendance.
Elle gère le Québec et n'attend pas à la veille des élections pour promettre des subventions etc., elle agit pour le bien être du peuple, chose que les partis politiques en général ne font pas et que les anciens dirigeants du PQ ne faisaient pas.
Elle gère autrement, elle fait de la politique autrement et les Québécois peu habitués à cette nouvelle façon de faire commencent à y prendre goût et à comprendre sa démarche. C'est une administratrice de cœur et d'esprit, un femme déterminée à réussir là où les autres ont échoué. Elle déstabilise les autres partis qui font de la politique à l'ancienne et met à découvert leur vrai visage et leurs grandes faiblesses.
Archives de Vigile Répondre
23 novembre 2013Monsieur Vachon
Si la prochaine élection, c'est pour continuer à rester dans le Canada; j'avertis tout de suite Marois que je ne me déplacerai même pas pour aller voter. Trudeau nous a sortis du Canada en 1982 sans référendum et lorsque je regarde le PQ vouloir continuer d'y demeurer; ça me donne la nausée.
Que le PQ cesse donc de tergiverser avec ce maudit taponnage sur la question nationale et qu'il déclare donc unilatéralement l'indépendance du Québec. À cette condition, à la prochaine élection, j'embarquerai pour ne plus avoir à continuer à vivre en citoyen de deuxième classe dans le pays des autres. Est-ce assez clair?
André Gignac 22/11/13