Bien des gens s'étaient plaints, lorsque les élections ont été déclenchées, du fait qu'il s'agissait là d'un exercice coûteux et inutile, qui ne changerait rien au paysage politique. Eh bien, les résultats d'hier soir ont montré que ce rendez-vous démocratique avait sa toute sa pertinence.
Cette élection est historique. Elle donne, pour la première fois, une majorité à un parti véritablement de droite, elle confie le rôle d'opposition officielle au NPD, un parti social-démocrate, elle consacre l'effondrement du grand Parti libéral, et elle raye littéralement de la carte le Bloc québécois qui dominait le Québec depuis 20 ans.
Ces résultats ne sont pas seulement spectaculaires. Ils auront un impact profond sur la façon dont le Canada sera gouverné et ils provoqueront un réalignement des forces politiques. Le gouvernement de Stephen Harper, maintenant majoritaire, aura une plus grande emprise sur l'appareil d'État, tandis que l'opposition sera inexpérimentée. Notre vie politique sera également plus polarisée entre deux populismes, l'un de droite et l'autre de gauche.
Si l'issue de cette campagne a de quoi étonner, c'est qu'en fait, on a assisté à deux campagnes, la globale et la locale. La globale, celle des sondages et des résultats généraux, le NPD l'a clairement remportée, en raflant 103 et en recueillant 30% des voix.
Mais les batailles locales, ce sont les conservateurs qui les ont gagnées, dans des comtés ciblés, comme dans la région de Toronto, en visant des créneaux précis de l'électorat, et en profitant des luttes à trois que la montée du NPD a rendues possibles. Le premier ministre Harper a remporté son pari en allant chercher plus de sièges dont il avait besoin pour obtenir une majorité. Mais ce n'est pas un élan envers son parti qui lui a donné cette victoire, puisque l'appui au PCC n'est passé que de 38% à 40%.
Le tsunami orange a fait deux victimes. L'échec de Michael Ignatieff est cuisant. Pour des raisons qui ne sont pas faciles à expliquer, le chef libéral n'a pas réussi à s'imposer, il a moins bien fait que Stéphane Dion, il a contribué à faire perdre à son parti son statut d'opposition officielle. Défait dans son comté, avec 33 sièges, il pourra difficilement survivre dans ce parti qui ne pardonne pas l'échec. Qui pourra redonner vie aux libéraux, s'ils ont encore une place.
Gilles Duceppe, quant à lui, a vu son parti imploser. Des 49 sièges de 2008, il n'en reste que trois. C'est une catastrophe pour le chef, battu dans son comté, pour le parti, pour le mouvement souverainiste qui rêvait déjà d'une victoire référendaire. Il n'est pas évident que le Bloc soit à nouveau capable de convaincre de sa pertinence.
À part M. Harper, l'autre grand gagnant, c'est Jack Layton qui, grâce à un regain de popularité amorcé au Québec, a connu une montée spectaculaire que personne n'avait prévu. Les néo-démocrates n'étaient pas prêts pour cette victoire, avec leur plateforme imprécise, leur équipe bancale, dont plus de la moitié provient du Québec. Le NPD apprendra-t-il sur le tas, ou sera-t-il terrassé par la même maladie qui a frappé l'ADQ?
On ne sait pas pourquoi les Québécois ont ainsi abandonné bloquistes et libéraux. Soif de changement? Charme de Jack Layton? Il n'est pas clair que les Québécois aient posé là un geste réfléchi. Ils ont peut-être manifesté la culture d'opposition et d'indifférence à la politique fédérale qu'ils exprimaient à travers le Bloc.
Il n'en reste pas moins que la victoire du NPD brise le monopole que le Bloc québécois exerçait sur la politique fédérale. Pour la première fois depuis 23 ans, un parti fédéraliste est majoritaire au Québec. Cela aura un impact pour la suite des choses
Un pays transformé
On ne sait pas pourquoi les Québécois ont ainsi abandonné bloquistes et libéraux. Soif de changement ? Charme de Jack Layton ? Il n’est pas clair que les Québécois aient posé là un geste réfléchi.
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