Un «love-in» pour Jean Charest

PLQ - 30e congrès


Denis Lessard et Malorie Beauchemin - C'était l'heure des retrouvailles hier entre Jean Charest et les militants libéraux. Presque un an après des élections très décevantes pour le PLQ, M. Charest affirme avoir profondément changé.

«Le peuple n'a jamais tort, j'ai accepté le jugement des Québécois. Nous nous sommes remis au travail. Aujourd'hui, plus que jamais, j'ai le goût d'aller plus loin», a-t-il lancé, dans son discours d'ouverture du 30e congrès de son parti.
Les 2500 délégués, qui auront aujourd'hui à se prononcer sur la confiance envers leur chef, ont eu droit à une présentation surprenante de M. Charest, par son épouse, Michelle Dionne, manifestement émue et nerveuse devant la foule.
«C'est un congrès important pour moi, J'ai réfléchi sur cette question de leadership», a soutenu par la suite le chef libéral, dont la cote personnelle est en hausse depuis quelques mois dans les sondages. «J'ai beaucoup appris. Le leadership, c'est de faire face à l'adversité, d'être capable de se relever», a-t-il lancé, soulevant une ovation des délégués qui ne laisse aucun doute sur l'issue du vote, en fin d'après-midi.
«Un esprit différent»
«J'ai écouté. J'ai changé et vous ne m'avez jamais laissé tomber. J'ai parcouru tout le Québec, dans un esprit différent», a-t-il renchéri. Il n'a guère attaqué les adversaires adéquistes ou péquistes, exception faite d'une allusion à une «girouette» sur l'Assemblée nationale, puis au «dogmatisme du Parti québécois».
«Je veux faire de notre langue française un objet de fierté, mais aussi d'inclusion. C'est la différence entre nous et le Parti québécois», a-t-il soutenu.
Tout le scénario était d'ailleurs conçu pour mettre en valeur Jean Charest. Dans une vidéo, ses ministres apparaissaient pour lui rendre hommage. «On est en famille ce soir, mais on est surtout en retrouvailles» a laissé tomber Jean Charest.
La remontée du Parti libéral dans les sondages - longtemps dernier, le PLQ est même passé juste devant le PQ dans le CROP de février - a fait disparaître toute pression sur le chef libéral, dont l'ascendant avait été remis en question dans les mois suivant les élections de mars 2007, qui avaient laissé les libéraux minoritaires.
Selon les statuts du PLQ, le chef doit se soumettre à un vote de confiance des membres au congrès qui suit les élections où le parti n'a pas récolté une majorité de sièges.
Chez les libéraux depuis plusieurs jours, personne ne mettait en doute la capacité de Jean Charest de décrocher un résultat non équivoque du vote des 2500 délégués, un scrutin dont les résultats seront livrés en fin d'après-midi.
Petit bémol
Seul petit bémol dans un ciel sans nuage, il aura fallu convaincre Christian Ouellet, qui présidait depuis trois ans la commission politique du parti, de ne pas se présenter à la succession du président sortant, Me Marc André Blanchard, qui quittait hier la présidence après huit ans. Balayé dans toutes les régions aux dernières élections, le PLQ a jugé plus sûr de mettre en valeur Jean D'Amours. L'ancien maire de Rivière-du-Loup avait mordu une deuxième fois la poussière aux mains de Mario Dumont, aux dernières élections.
La liste des panélistes du congrès présente de nombreuses nouvelles figures. Les ténors des chambres de commerce, Françoise Bertrand et Isabelle Hudon, étaient prévisibles, mais plusieurs autres intervenants, notamment du secteur économique, comme Simon Prévost et Paul-Arthur Huot, ne sont pas des habitués des congrès libéraux.
Un comité de la famille
Le PLQ qui avait déjà des comités sur l'identité, l'économie et l'environnement en a ajouté un, plus récemment, sur la famille, le terrain privilégié par l'ADQ au cours des derniers mois.
La proposition du comité dirigé par Véronique Théorêt propose une augmentation du crédit d'impôt remboursable pour frais de garde, ce qui se veut une réponse à l'argument de Mario Dumont sur l'iniquité d'un système de garderies subventionnées qui ne peut accueillir tous les enfants.
On propose aussi de permettre le report du remboursement de la dette d'un étudiant quand qu'il a des enfants de moins de cinq ans.
On propose aussi d'arrimer la contribution des parents au coût des services de garde; à 20%, la contribution serait de 8$ par jour.
La commission politique propose aussi de relancer le développement du métro à Montréal, en ajoutant, vers l'Est, 10 nouvelles stations et d'amorcer la «réalisation» d'un train à haute vitesse Québec-Windsor.
«J'espère que personne n'a sablé le champagne!» de prévenir hier John Parisella, l'ancien bras droit de Robert Bourassa. Les embellies politiques sont toujours fragiles, les revers de fortune fréquents, prévient-il. Un ralentissement économique est à prévoir. La remontée de Jean Charest dans l'opinion publique depuis septembre dernier est souvent associée au retour de ce stratège ainsi que de Michel Bissonnette, de Zone 3, dans l'orbite de Jean Charest. «Il n'y a pas de gourous... on l'accompagne», minimise M. Parisella. Pour lui, M. Charest a d'abord bien compris le message des élections, la population a donné une minorité aux libéraux parce qu'elle désapprouvait la confrontation. Puis le PLQ est revenu à sa priorité historique, le développement économique. Finalement, M. Charest a clairement repris goût à la politique. «Il est plus à l'aise, j'ai retrouvé le Jean Charest que j'ai connu», résume Parisella.
Il y a six mois la plupart des commentateurs spéculaient sur le départ de M. Charest, alors au plus bas dans les sondages. Il répétait alors souvent qu'il n'avait pas peur de l'adversité. «Je n'ai rien contre l'adversité, mais à doses raisonnables» ironisait-il hier.
«Il disait lui-même qu'il est l'homme politique dont on a le plus souvent écrit la chronique nécrologique», de souligner hier Nathalie Normandeau, titulaire des Affaires municipales.
Les ministres habituellement peu loquaces faisaient la file pour appuyer formellement leur chef, refusant tous de fixer la barre quant au niveau d'appuis qu'il devait obtenir au vote d'aujourd'hui, de la part des militants.


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