Québec - Le gouvernement Charest a nommé hier Michel Audet pour représenter le Québec à la délégation permanente du Canada auprès de l'UNESCO, selon l'entente signée le 5 mai et jugée «historique» par Jean Charest (l'entente administrative qui en découle n'était toutefois pas encore signée hier).
Michel Audet? Il ne s'agit évidemment pas du ministre des Finances et député de Laporte, mais bien du professeur peu connu de relations industrielles de l'Université Laval, sans expérience diplomatique, plutôt versé dans la «gestion des ressources humaines» et les technologies d'information.
Discret, l'homme de 51 ans a toutefois le sens de l'humour. Avoir un illustre homonyme l'a servi, raconte-t-il dès le début de l'entretien: «Au moment où Michel Audet était sous-ministre au ministère de l'Industrie [MIC], je faisais ma thèse de doctorat [en relations industrielles]. J'avais souvent besoin d'informations et de données dans différents secteurs d'activité du MIC. Je laissais un message de "Michel Audet" et dans la journée, j'obtenais toujours ce que je voulais!»
Bien qu'il n'ait pas, comme il l'admet, «le gène de la diplomatie» dans son parcours professionnel - il note qu'il devra « prendre des cours bientôt» -, M. Audet estime avoir tous les atouts pour remplir le mandat qu'on lui confie. La ministre Monique Gagnon-Tremblay a dit hier qu'elle ne s'inquiétait pas puisqu'il «connaît bien l'étranger». D'ailleurs la critique péquiste, Marie Malavoy, bonne joueuse, a choisi de «donner la chance au coureur». Un ancien chef de poste déclarait toutefois hier que la nomination de M. Audet, un «inconnu dans les affaires internationales», était une sorte de «couac, après l'annonce en grande pompe de mai». «On a tout fait pour éviter le réseau de Louise Beaudoin», l'ancienne ministre des Relations internationales, a soutenu cette source.
M. Audet acquiert le réflexe diplomatique. Lui qui a été professeur invité en France, à l'École supérieure de commerce de Paris, il racontait hier qu'il y entamait ainsi tous ses cours: «Je leur fais comprendre que ce n'est pas moi qui en a un, c'est eux!» Puis il se ravisa: «Mais ça ne sera peut-être plus ma porte d'entrée quand je vais arriver en France!»
Environnement international
M. Audet a travaillé de 1998 à 2001 au CEFRIO (Centre francophone d'informatisation des organisations) en tant que «directeur innovation et transfert». Depuis septembre 2005, il dirige l'Institut Technologies de l'Information et Sociétés de l'UL (ITIS), qu'il quittera le 5 février prochain, date de son entrée en fonction au MRI. À l'ITIS, il a exploré les sphères du «télétravail», de «l'éducation en réseau», de la «télésanté», bref, tout ce qui touche «la société de l'information au sens large». Dans ce cadre, il a eu à développer des alliances avec des universités en France, en Belgique, aux États-Unis.
En novembre 2005, il a expérimenté la cohabitation canado-québécoise en se rendant à Tunis au Sommet mondial sur la société de l'information en tant que membre de la délégation du Québec et de la délégation de la commission canadienne de l'UNESCO. C'est là qu'il a fait la connaissance d'Henri-François Gautrin, alors ministre délégué au Gouvernement en ligne. (Il a remplacé Pierre Reid aux Services gouvernementaux, MSG, en février 2006). Il termine à l'heure actuelle une «commandite» de 63 500 $ du MSG où il proposera un relevé des «meilleures pratiques de portail Internet de service public» dans sept ou huit pays.
C'est par l'entremise de M. Gautrin que le curriculum vitae de M. Audet est arrivé sur le bureau de Mme Gagnon-Tremblay, qui l'a trouvé «très impressionnant». Selon la ministre, M. Audet était le premier choix du gouvernement.
Mandat flou
Son mandat à l'UNESCO? «Îuvrer dans tous les secteurs d'activité», a répondu de manière très générale Mme Gagnon-Tremblay, hier, lors d'un entretien téléphonique. C'est-à-dire? D'abord, il faut savoir que l'UNESCO a un mandat très large, que M. Audet résume ainsi: «mener un combat pour la paix, mais par les sciences, la culture et l'éducation». Globalement, il voit son rôle comme celui d'un «représentant et d'un défenseur des intérêts du Québec dans les champs de l'UNESCO et dans les champs dans lesquels le Québec a juridiction». Mme Gagnon-Tremblay souligne qu'un des aspects cruciaux de son travail sera de transmettre à Québec les informations sur les dossiers prioritaires «comme tous les représentants des pays». Le mandat «sera à définir au fur et à mesure qu'on va avancer», a pour sa part indiqué M. Audet. Ce dernier travaillera dans les bureaux de la délégation canadienne à l'UNESCO et relèvera directement du sous-ministre du MRI à Québec. M. Audet déterminera aussi de concert avec le fédéral les dossiers dans lesquels «le Québec peut le mieux agir».
À court terme, c'est le dossier de la diversité culturelle qui occupera M. Audet puisque la Convention de l'UNESCO sur le sujet, adoptée en octobre 2005, vient de franchir la barre des 30 ratifications, ce qui permet son entrée en vigueur. Cela provoquera une première conférence des parties à la convention prochainement. M. Audet devra donc se déplacer souvent cet hiver et ce printemps, mais il s'installera à Paris seulement l'été prochain.
Dans le cas de M. Audet, deux documents importants restent à signer. Tout d'abord, il y a l'entente administrative qui précise la collaboration entre les gouvernements fédéraux et provinciaux. Mme Gagnon-Tremblay dit depuis plus d'un mois qu'il n'y a là aucun retard. «Il n'y a pas non plus de réticence du fédéral», assure-t-elle. Mais la présence d'un représentant est un précédent délicat pour les deux parties. Ensuite, M. Audet n'a pas encore signé de contrat avec le gouvernement, qui lui versera une rémunération comparable à celle d'un sous-ministre adjoint, soit d'environ 130 000 $ par an. Il aura aussi droit à une allocation pour se loger à Paris ainsi qu'à tous «les privilèges diplomatiques normaux, immunités, etc.», a précisé la ministre.
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