(Québec) Monique Jérôme-Forget racontera dorénavant des histoires à ses petits-enfants plutôt qu'aux parlementaires de l'opposition et à la population. Quatre mois après son élection, sa démission, mûrie depuis longtemps, choque. On peut néanmoins comprendre qu'une femme de sa trempe n'ait pas envie de jouer encore pendant des mois le rôle de bouclier et de ministre de service de Jean Charest. Son départ est une autre preuve que le gouvernement libéral est prématurément essoufflé. L'arrivée de Raymond Bachand aux Finances ne change rien au constat.
Jean Charest a convoqué les électeurs aux urnes pour avoir les deux mains sur le volant si la crise économique amorcée aux États-Unis frappait le Québec. Il tablait sur une équipe économique forte, où Monique Jérôme-Forget tenait un rôle clé.
Or, quatre mois après son élection, au moment où le taux de chômage s'accroît, que la province rompt avec l'équilibre budgétaire et que la Caisse de dépôt et placement du Québec peine à sortir de la tourmente, la ministre des Finances démissionne afin de rejoindre sa famille et apprendre l'espagnol.
Les Québécois ont raison de se sentir encore une fois floués. Le gouvernement Charest a fait preuve d'un grand optimisme dans ses prévisions économiques avant les élections. Il ne voyait ni récession ni déficit à l'horizon, ni l'ampleur des pertes à la Caisse de dépôt. La réalité est loin d'être aussi rose qu'il le prétendait.
Les Québécois, particulièrement ceux de Marguerite-Bourgeoys, ont aussi cru que Mme Jérôme-Forget serait en poste pour un mandat, et non seulement le temps de concocter un budget. Elle en avait depuis longtemps décidé autrement. Vraisemblablement, son chef était informé de ses intentions.
Heureusement pour Monique Jérôme-Forget, la population retiendra davantage le nom de Jean Charest que le sien pour le bilan négatif qui colle aux libéraux depuis leur réélection. Elle quitte néanmoins écorchée l'arène politique.
Femme et ministre loyale, elle affirme avoir proposé les orientations et fait des choix déchirants dans son dernier budget. Personne ne doutera qu'elle ait défendu ardemment son point de vue devant le premier ministre et au sein du Conseil des
ministres.
Tout le monde conviendra aussi que cette femme reconnue pour son franc-parler devait être très mal à l'aise avec le rôle que le premier ministre lui faisait jouer ces derniers mois. Jean Charest a beau lui avoir donné «la plus belle job», il y a des limites à ne pas dépasser et à faire le sale boulot. Surtout lorsqu'on a 68 ans et une belle carrière derrière soi. Défendre la nomination de Michael Sabia à la Caisse de dépôt alors qu'elle n'avait pas le contrôle de toutes les pièces du puzzle devait lui déplaire profondément.
Au-delà de la sacoche et du syndrome de la «pépine», que retiendra-t-on de Mme Jérôme-Forget? Sûrement l'image d'une femme qui a rempli d'importants rôles, notamment comme présidente du Conseil du trésor et ministre des Finances. On se rappellera aussi qu'elle était là pour finaliser le règlement sur l'équité salariale pour 400 000 employées du secteur public.
Monique Jérôme-Forget est également associée à la promotion des partenariats public-privé et à la modernisation de l'État. Elle a beau soutenir que les PPP sauveront 1 milliard $ dans le cas des autoroutes 25 et 30, seul l'avenir le dira. Quant à sa réingénierie, elle a été beaucoup plus modeste que prévue.
L'ex-députée aime également se présenter comme la ministre de l'équilibre budgétaire. Elle n'avait pas vraiment le choix, puisqu'une loi l'imposait. Crise économique oblige, c'est elle qui a réécrit un budget à l'encre rouge. C'est aussi elle qui a donné un aperçu des sacrifices qui attendent les Québécois. Elle laisse à Raymond Bachand le soin d'annoncer le reste des mauvaises nouvelles.
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