Un cumul de défaillances

Nous vous présentons ici un extrait du rapport de la Commission d'enquête sur l'effondrement du viaduc de la Concorde, présidée par Pierre Marc Johnson.

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Béton-tombe...


Pour ce qui est des circonstances de l'effondrement du viaduc de la Concorde, la Commission en retient le caractère brutal et instantané.


Le surveillant routier, compte tenu de ses fonctions et de ses connaissances, a réagi correctement, avant et après l'effondrement. Le service de signalement 9-1-1 de Laval et celui du ministère des Transports du Québec ont fonctionné normalement. Avant même l'arrivée des services d'urgence, de nombreux citoyens ont agi rapidement et courageusement pour venir en aide aux victimes coincées dans leur véhicule. Les services de premiers secours d'Urgences-Santé, des policiers, des pompiers et des premiers secours de Laval, et la Sûreté du Québec, sont intervenus rapidement et de manière disciplinée.
Pour ce qui est des causes de l'effondrement, la Commission a identifié les principales causes physiques ainsi que les causes secondaires contributoires. Elle a examiné les comportements et les interventions humaines qui y ont contribué à ces causes. Elle a blâmé des organisations et des personnes qui ont failli à leurs responsabilités durant la phase de construction du viaduc de la Concorde. La Commission a aussi analysé l'entretien de l'ouvrage par le MTQ; elle déplore certaines interventions particulières du ministère, mais elle le blâme surtout pour les faiblesses systémiques qui ont persisté durant de longues années et qui l'auront empêché de comprendre l'état de dégradation croissante du viaduc et d'y remédier.
Enchaînement séquentiel de causes
La Commission est d'avis que l'effondrement du viaduc de la Concorde ne peut être attribué à une seule entité ou à une seule personne. Aucun des défauts ou des manquements identifiés n'aurait pu, seul, causer cet effondrement, qui résulte d'un enchaînement séquentiel de causes.
L'événement tragique du 30 septembre 2006 découle, il est important de le souligner, d'un cumul de défaillances: celle de normes applicables à la conception de l'ouvrage qui aujourd'hui seraient considérées inadéquates et celles de défauts et manquements durant la conception, la construction et la gestion du viaduc de la Concorde tout au long de sa vie utile. C'est avec cette connaissance qu'il faut comprendre et interpréter les reproches et les blâmes contenus dans ce rapport.
Au détail d'ancrage créant le plan de faiblesse, au moment de la conception du viaduc de la Concorde, s'ajoute un devis spécial confus qui entraîna la mise en place d'une catégorie de béton inadéquate pour résister aux cycles successifs de gel-dégel en présence de sels fondants. La négligence des entrepreneurs dans la conduite des travaux et le caractère gravement déficient de la surveillance se solderont par une pose fautive des armatures. De ce cumul résulte la faiblesse essentielle de la structure.
La Commission est également d'avis que l'absence d'armature en cisaillement dans la dalle épaisse pleine et l'absence d'étanchéité à sa surface sont des causes secondaires contributoires à l'effondrement.
Le MTQ a procédé à des inspections répétées sur une période de près de 40 ans. Il ne parviendra pas à déceler la faiblesse essentielle de la structure. Quand en 1992, les armatures seront mises à nu par l'enlèvement en profondeur du béton dégradé au droit de la chaise, le MTQ ne saisira pas la portée des dommages constatés et ne procédera pas à une évaluation de la condition de l'ouvrage. En 2004, l'ingénieur responsable de l'inspection de la structure, préoccupé par l'état de celle-ci, formula une demande d'assistance technique auprès de la Direction des structures; cette assistance ne sera pas fournie avec toute la rigueur requise.
La Commission a formulé un ensemble de recommandations découlant de ses travaux. La tragédie du viaduc de la Concorde nous rappelle l'importance d'une rigueur sans faille dans l'ensemble des processus de conception, de construction et de surveillance de la construction des ouvrages. Elle nous rappelle l'importance que des normes, des manuels et des programmes rigoureusement mis en oeuvre encadrent le travail des personnes responsables des inspections et de l'entretien. Il faut savoir encourager ces personnes à demeurer alertes et curieuses devant les problèmes rencontrés sur les ouvrages placés sous leur responsabilité. Cela est d'autant plus pertinent dans le contexte d'un réseau de structures vieillissantes.


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