Au lendemain du premier vote des primaires démocrates pour la Maison Blanche, dans l’Iowa, le parti restait incapable mardi de publier le moindre résultat, un fiasco technique et politique raillé par l’homme que les démocrates veulent battre en novembre, Donald Trump.
L’absence totale de résultat des « caucus » de lundi soir prive les candidats de l’élan créé habituellement par l’Iowa, petit État rural fier de lancer les primaires depuis les années 1970.
Les journaux américains n’ont pu afficher sur leurs unes mardi aucun vainqueur, et l’actualité politique se détournera vite sur le discours sur l’état de l’Union que prononcera le président républicain au Congrès mardi soir, et sur son acquittement prévu mercredi au Sénat dans son procès en destitution.
Remplissant le vide, deux candidats revendiquaient en attendant le succès: le sénateur Bernie Sanders, 78 ans, qui était en tête des sondages et avait failli remporter l’Iowa contre Hillary Clinton il y a quatre ans, et l’ex-maire modéré Pete Buttigieg, 38 ans, surgi de nulle part l’an dernier.
Pete Buttigieg a affirmé dans des interviews mardi depuis le New Hampshire, qui votera dans une semaine, avoir engrangé une « nette victoire », sur la base de ses propres estimations, mais sans explicitement dire s’il pensait avoir battu Bernie Sanders ou seulement avoir dépassé les attentes.
Le trentenaire veut reprendre à Joe Biden le flambeau de l’aile modérée du parti, et espère que son bon score rassurera ceux qui doutent de sa jeunesse. « Nous nous sommes établis comme la candidature de ceux qui veulent battre Donald Trump », a-t-il dit sur CNN, vantant un message « qui ne rejette pas ceux qui ne sont pas d’accord avec nous à 100% ».
« Dès que possible »
L’ancien vice-président de Barack Obama, Joe Biden, semblait lui avoir réalisé une contre-performance, selon les résultats de quelques grands bureaux de vote, et une estimation publiée par le camp Sanders.
Le parti démocrate de l’Iowa a expliqué mardi dans un communiqué que le problème venait de l’application développée pour que les responsables des 1700 bureaux de vote rapportent les résultats. Le parti affirme qu’il n’existe aucun signe d’intrusion ou de piratage informatique.
« Les investigations nous ont permis de confirmer avec certitude que les données sous-jacentes récoltées par l’application sont correctes. Bien que l’application ait enregistré les données correctement, elle n’enregistrait que des données partielles. Nous avons déterminé que cela était dû à un problème de code dans le système », écrit le parti.
La collecte des résultats se poursuivait mardi, et une publication officielle devrait avoir lieu « dès que possible aujourd’hui ».
« Rien ne fonctionne, exactement comme lorsqu’ils dirigeaient le pays », a tweeté mardi matin Donald Trump.
Puis il a ironisé: « Quand les démocrates commenceront-ils à blâmer la RUSSIE, la RUSSIE, la RUSSIE, au lieu de leur propre incompétence? »
Direction le New Hampshire
Les candidats démocrates ne se sont pas attardés dans l’Iowa et ont rallié dans la nuit le New Hampshire, qui votera le 11 février lors d’une primaire normale, organisée par l’État et avec des bulletins de vote.
« Les premiers, probablement Sanders et Buttigieg, auraient pu exploiter leurs performances pour se lancer dans le New Hampshire. Au lieu de cela, c’est l’incompétence choquante du parti démocrate de l’Iowa qui fait la une. Et qui croira les résultats quand ils seront enfin publiés? », dit à l’AFP Larry Sabato, professeur à l’université de Virginie.
L’Iowa a un système archaïque de « caucus », des assemblées d’électeurs qui se regroupent physiquement, dans chaque bureau, sous la bannière de candidats, lors de deux tours. Ce système vanté comme un exercice de démocratie pure est depuis longtemps dénoncé comme limitant la participation et intimidant, puisque le vote n’est pas secret -- sans compter le tumulte de ces soirées.
Tous les quatre ans, des critiques se lèvent contre l’importance disproportionnée accordée à l’Iowa et ses quelques centaines de milliers d’électeurs, non représentatifs du pays, mais l’État a maintenu contre vents et marées sa place de premier.
Bernie Sanders, 78 ans, héraut de l’aile gauche, a lui aussi affirmé avoir engrangé un « très très beau succès », mardi soir, sur la base des chiffres internes récupérés par ses équipes et portant sur 40% des bureaux.
Ces estimations placent « Bernie » en tête avec 28,62%, devant Pete Buttigieg (25,71%) et la sénatrice Elizabeth Warren (18,42%), elle aussi à la gauche du parti. Joe Biden, 77 ans, n’arriverait que quatrième, avec 15,08%, alors qu’il caracole depuis des mois en tête des sondages au niveau national.
Joe Biden serait même talonné par une autre sénatrice modérée, Amy Klobuchar.
Pete Buttigieg, ancien maire d’une ville moyenne de l’Indiana et premier candidat ouvertement gai à avoir une chance de remporter l’investiture, a publié des chiffres portant sur 1200 bureaux, et dans lesquels il aurait obtenu 24,7% des voix.
Mais ils ne montrent pas combien Bernie Sanders aurait obtenu.