Les groupes environnementaux qui ont déposé un recours contre TransCanada jeudi ne sont pas les seuls à se plaindre du processus du BAPE pour le projet de pipeline Énergie Est. Même la pétrolière, qui a pourtant refusé de se conformer aux lois environnementales du Québec, critique la formule choisie pour le début des audiences, la jugeant trop restreinte pour garantir la pleine participation des citoyens.
Dans une lettre envoyée au président du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE), Pierre Baril, le vice-président d’Énergie Est pour le Québec, Louis Bergeron, s’inquiète sans détour de la formule retenue par l’organisme pour la portion des audiences qui débute le 7 mars.
Cette première partie est cruciale puisqu’elle servira à présenter les détails du controversé projet de pipeline, notamment par l’entremise du promoteur, d’experts et de personnes-ressources. On y abordera la question des modes de transport du pétrole brut, la « justification du projet », les caractéristiques techniques des pipelines, les scénarios de déversements et leurs impacts, les plans d’urgence, les coûts d’intervention et de restauration selon les scénarios ainsi que la question de l’acceptabilité sociale.
TransCanada critique ainsi le choix des plages horaires pour ces audiences, qui se tiendront en partie le matin et l’après-midi, et ce, sur une dizaine de jours. La pétrolière déplore aussi la décision du BAPE de tenir la totalité de ses premières audiences dans la région de Québec. En fait, les audiences auront lieu à Lévis, dans un secteur de Saint-Romuald surtout accessible en voiture et situé non loin de la raffinerie de Valero.
« [Étant donné] que l’un des principaux reproches qu’on nous a formulés, au Québec, est de ne pas avoir adéquatement informé la population de notre projet, nous souhaitons vous transmettre notre grande préoccupation face à cet horaire restreint et à ce choix géographique unique, qui empêcheront l’ensemble des citoyens au travail ou vivant loin de Québec de participer à cette importante consultation publique à laquelle nous entendons collaborer pleinement », fait valoir M. Bergeron dans la lettre envoyée une semaine avant que le BAPE ne dévoile l’horaire des audiences.
L’entreprise s’inquiète d’ailleurs des contrecoups dans l’opinion publique. « Advenant le maintien de ces décisions, plusieurs personnes ou groupes pourront reprocher, au BAPE et à Oléoduc Énergie Est, de tenter d’esquiver leurs questions et préoccupations. » M. Bergeron conclut donc en demandant à l’organisme de « reconsidérer » sa décision, quitte à « reporter » les audiences.
Le porte-parole du BAPE, Luc Nolet, a expliqué jeudi que la décision de tenir les audiences dans un secteur industriel et commercial de Saint-Romuald avait été prise selon la disponibilité de la salle. Il a également souligné que la majorité des experts demeurait dans la région de Québec, d’où le choix de cette région.
M. Nolet a également indiqué que les citoyens pourront suivre et participer à cette première partie des audiences par « visioconférence » à partir de Laval, Trois-Rivières et La Pocatière. Aucune installation de ce genre n’est prévue à Montréal ou à Québec.
Action en justice
Au-delà des critiques formulées à propos des aspects techniques des audiences, il n’en demeure pas moins que TransCanada a refusé de se conformer à Loi sur la qualité de l’environnement, jugeant que son projet est uniquement assujetti à la législation fédérale.
Le Centre québécois du droit en environnement, Équiterre, Nature Québec et la fondation Coule pas chez nous ont donc déposé jeudi une requête en Cour supérieure pour forcer la pétrolière albertaine à respecter la réglementation québécoise.
En vertu du Règlement sur l’évaluation et l’examen des impacts sur l’environnement inscrit dans la Loi, « la construction d’un oléoduc d’une longueur de plus de 2 km dans une nouvelle emprise » est « obligatoirement » assujettie à la procédure d’évaluation et d’examen des impacts sur l’environnement, a rappelé leur avocat, Me Michel Bélanger.
En vertu de cette procédure, TransCanada aurait donc dû déposer un « avis de projet », puis une étude d’impact réalisée selon les demandes précises du ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MDDELCC). C’est seulement une fois que cette étude est terminée que peut commencer le processus du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE).
Le gouvernement Couillard n’a pas respecté cette démarche inscrite dans la loi depuis 1980. Il n’ignorait pourtant pas la procédure qui aurait dû être suivie, a rappelé Me Bélanger. Le ministre de l’Environnement, David Heurtel, a lui-même insisté sur la nécessité de respecter les dispositions du Règlement sur l’évaluation et l’examen des impacts sur l’environnement dans une lettre envoyée à TransCanada en novembre 2014.
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ÉNERGIE EST
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