Alors que le gouvernement de Terre-Neuve-et-Labrador prenait une initiative sans précédent en menaçant de retirer son appui au projet d'Accord économique et commercial global (AECG) - l'accord de libre-échange entre le Canada et l'Union européenne - et de se retirer de toutes les négociations commerciales futures concernant le Canada, le Conseil des Canadiens, un ardent défenseur des intérêts des citoyens dans des accords commerciaux, a tenu à féliciter le gouvernement pour cette annonce. En effet, le ministre des Affaires, du Tourisme, de la Culture et du Développement rural Darin King s'est montré catégorique : « Si nous ne voyons aucun progrès, nous prendrons les mesures commerciales annoncées ici même et mettrons un terme à l'Accord. Terre-Neuve ne fera plus partie de l'équation. »
« En France ou en Allemagne, l'opposition à cet accord prend de l'ampleur. Terre-Neuve serait en bonne compagnie s'il venait à retirer son appui à l'Accord », a noté Maude Barlow, présidente du Conseil des Canadiens. « L'AECG est mauvais pour Terre-Neuve-et-Labrador et une catastrophe pour tous les Canadiens. Il accorde un pouvoir extraordinaire aux sociétés pour poursuivre les gouvernements. Il n'est donc pas étonnant que les citoyennes et les citoyens de Terre-Neuve et leur gouvernement soient contrariés. »
Terre-Neuve conteste le fait que le gouvernement Harper revienne sur sa promesse d'établir un fonds de 400 millions de dollars pour l'industrie provinciale des pêches. Ce soutien financier aurait permis de compenser les pertes d'emplois attribuables à l'abandon des exigences minimales de transformation pour les usines de poissons de la province dans le cadre de l'accord de libre-échange canado-européen.
Le Conseil des Canadiens demande de nouveau à la province de tenir des consultations publiques sur cet accord.
« Encore une fois, cet accord est entre les mains de Terre-Neuve, qui est la seule province à défendre les emplois et les intérêts de ses citoyens », a ajouté Ken Kavanagh, membre du Conseil des Canadiens à St. John's. « L'AECG et son vaste programme de « libre-échange » est une mauvaise idée pour les gens de Terre-Neuve-et-Labrador. Nous demandons au gouvernement d'aller plus loin en organisant des consultations publiques sur l'AECG. Terre-Neuve est peut-être la seule province assez courageuse pour défendre les Canadiennes et les Canadiens et rejeter cet accord. »
En plus de renoncer à la réglementation qui protège les emplois dans l'industrie provinciale des pêches, l'accord de libre-échange Canada-Europe pourrait contraindre les Canadiens à dédommager des investisseurs privés pour perte de profits escomptés en vertu des dispositions de règlement des litiges entre investisseurs et États. En 2012, les tribunaux de l'ALENA avaient décidé que Terre-Neuve ne pouvait pas exiger que les producteurs du champ pétrolifère Hibernia investissent une part de leurs profits dans la recherche et le développement.
En 2010, le gouvernement Harper payait 130 millions de dollars pour régler un litige investisseur-État avec AbitibiBowater. Pendant que la société était en procédure de faillite, Terre-Neuve essayait de sauver des emplois en expropriant l'usine de Grand Falls-Windsor. La société a accusé la province d'exproprier ses droits de coupe et ses droits d'usage de l'eau.
Terre-Neuve-et-Labrador devra également faire face à une augmentation de plusieurs millions de dollars pour les produits pharmaceutiques puisque, par le biais de l'AECG, le gouvernement Harper a accepté d'élargir la portée des protections conférées par les brevets à des sociétés déjà extrêmement rentables. En 2011, l'Association canadienne du médicament générique (ACMG) estimait le coût de cette provision à 13,2 millions de dollars par année pour la seule province de Terre-Neuve-et-Labrador. Une autre étude de la politique sur les produits pharmaceutiques réalisée la même année par deux universitaires de haut niveau affirmait que le manque à gagner se chiffrerait plutôt à 46 millions de dollars par année.
Le gouvernement de Terre-Neuve-et-Labrador a déjà fait des représentations auprès de nombreuses ambassades européennes. Ses démarches signifient que la province met un terme à toutes les négociations commerciales, y compris le Partenariat transpacifique, l'Accord général sur le commerce des services, l'Accord de partenariat économique Canada-Japon ainsi que toutes les négociations liées à l'Organisation mondiale du commerce.
Le Conseil des Canadiens milite depuis longtemps contre l'AECG et a déjà obtenu des rencontres avec des députés en Europe et au Canada.
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