Avez-vous lu, ce matin, le compte-rendu des recherches du Bureau d’enquête concernant l’implication des paradis fiscaux dans le financement des firmes de cannabis ? Un article réellement explosif. Une firme administrée par Alain Dubuc et Martin Cauchon serait en cause. Le gouvernement canadien est d’une spectaculaire mollesse à l’endroit de l’évasion fiscale. Quand le nom de Stephen Bronfman, grand argentier du Parti libéral du Canada, a été associé aux Paradise Papers, les ténors du parti au pouvoir ont couru à sa rescousse. Le député Nicola Di Iorio a même déclaré que les choix de Bronfman ne sont nullement problématiques, il n’y a pas « un seul riche canadien qui ne diversifie pas ses avoirs à l’étranger »...
On savait déjà que cette affaire de légalisation en était une de gros sous, visant à favoriser les compagnies ontariennes proches du PLC, lesquelles détiennent une bonne longueur d’avance quant aux contrats liés au cannabis récréatif à venir. Les plus récentes révélations nous confirment l’ampleur du favoritisme politique qui se cache dans le grand champ de marijuana du gouvernement.
Les libéraux se comportent comme si on leur avait signé un chèque en blanc. À bien des égards, ils n’ont pas complètement tort. Nous avons eu beaucoup de discussions sur le « comment », mais nous n’avons eu aucun débat, collectivement, sur le « pourquoi ». Nous passons à côté de l’essentiel. Comprenez-moi bien, il est nécessaire que nous discutions de l’âge légal pour consommer, de la gestion par les provinces, du mode de distribution ou de toute autre enjeu ayant des répercussions majeures sur tout le monde.
Cependant, n’aurait-il pas été essentiel, au départ, de se poser la véritable question : faut-il, oui ou non, vraiment légaliser l’usage du cannabis à des fins récréatives ? Je n’en suis personnellement pas convaincu mais là n’est pas la réflexion que je souhaite susciter aujourd’hui.
Il est intéressant de se demander pourquoi le vrai débat public n’a jamais eu lieu. La légalisation semble se résumer au seul principe de la liberté individuelle. Permettre à ceux qui veulent en fumer d’en fumer ; ceux qui ne veulent pas y toucher n’ont qu’à ne pas le faire. Une telle censure représente un triste appauvrissement de la pensée. Sommes-nous à ce point devenus allergiques au concept de choix de société ? Ne peut-on pas réfléchir, en tant que collectivité, sur les manières d’en arriver à une meilleure vie commune ? La liberté individuelle est un principe sacré, mais pas dénué de limites fondamentales.
Autrement dit, qu’on soit fumeur ou non, qu’on soit favorable ou pas à la légalisation du cannabis, le dialogue s’impose. Il y a des questions qui ne se tranchent pas simplement en disant « je fais ce que je veux et si ça ne te plait pas c’est ton problème ». À moins de considérer qu’on ne vit pas en société...