La ministre Elisabeth Moreno a annoncé avoir signalé au procureur de la République la dernière couverture du magazine Causeur. Elle accuse le mensuel d'exercer un «racisme décomplexé».
«Souriez vous êtes grand-remplacés !» Pour son numéro de septembre, la rédaction de Causeur a choisi de publier en couverture ce titre provocateur avec une photo de cinq enfants en bas-âge, représentant une diversité des origines.
L'initiative a fait réagir Elisabeth Moreno – ministre déléguée chargée de l’Egalité entre les femmes et les hommes, de la Diversité et de l’Egalité des chances – qui a dénoncé le 17 septembre «la une abjecte» du mensuel fondé et dirigé par Elisabeth Lévy, tout en affirmant que la Délégation interministérielle à la lutte contre le racisme, l'antisémitisme et la haine anti-LGBT (DILCRAH) l'avait signalée au procureur de la République. «Soyons clairs : derrière la théorie complotiste du "grand remplacement" fondée sur la couleur de peau ou l'origine ethnique se cache du racisme décomplexé», a écrit la ministre.
Le soir-même, la directrice de la rédaction du mensuel a, de son côté, justifié le choix de cette couverture lors d'une intervention sur l'antenne de C8, dans le talk-show Touche pas à mon poste.
«On a fait cette une pour alerter sur un phénomène», a-t-elle notamment expliqué, concédant avoir prévu des réactions d'indignation. «On a l'habitude du "braillomètre" : quand on [le] déclenche, on pense qu'on a frappé juste sur un point sensible», a déclaré Elisabeth Lévy avant d'aborder «le phénomène» en question. «Il y a une part croissante [en France] des naissances d'enfants [qui] ont un ou deux parents d'origine étrangère extra-européenne et de culture étrangère [...] Le problème n'est pas que notre société soit multiethnique, c'est qu'elle soit multiculturelle. Si tous ces enfants étaient élevés comme des Français [...] de valeurs et de mœurs, je m'en foutrais complètement [mais] ça n'est pas le cas», a-t-elle déclaré avant de pointer du doigt des problématiques d'ordre communautaire, selon elle particulièrement prégnantes «chez les populations maghrébine et subsaharienne».
Quoi qu'il en soit, à défaut d'un débat de fond sur les enquêtes et analyses publiées dans Causeur, c'est bel et bien la couverture qui a choqué, comme en témoigne la vague d'indignation qu'elle a provoquée sur les réseaux sociaux, particulièrement à gauche de l'échiquier politique et dans les milieux associatifs.
Les réactions s'entrechoquent
«La une de Causeur est ignoble. Il faut une condamnation immédiate pour cette publication raciste», a par exemple écrit sur Twitter Thomas Portes, porte-parole de Sandrine Rousseau.
«Causeur est engagé dans une espèce de course à l’immonde», a pour sa part dénoncé le président de l'association France Fraternités, Pierre Henry.
D'autres se sont amusés de la polémique, à l'instar de l'enseignante et essayiste engagée dans la défense de la laïcité, Fatiha Agag-Boudjahlat. Celle-ci a partagé une ancienne couverture du magazine National Geographic, qui présentait une photo de migrants extra-européens comme «les nouveaux Européens», en commentant ironiquement : «C’est les woke qui ont commencé.» L'idée étant de se référer ici à l'idéologie du même nom qui revendique une conscience de problèmes liés à l'égalité raciale.
Certains ont en revanche regretté les attaques visant Causeur. «Causeur met un débat sur la table et au lieu de s’en emparer pour mettre en avant des arguments, la gauche préfère s’offusquer, dénigrer et en appeler à la censure et aux tribunaux. C’est ce qu’on appelle du totalitarisme ! On ne débat plus, on condamne !», a par exemple écrit le professeur d'Histoire Kevin Bossuet, habitué des plateaux télévisés.
Laissez un commentaire Votre adresse courriel ne sera pas publiée.
Veuillez vous connecter afin de laisser un commentaire.
Aucun commentaire trouvé