Crise étudiante, sociale, politique…: stratégie de tension à la québécoise !
Les événements qui se sont produits le 20 avril, lors de l’opération de promotion du Plan Nord à Montréal, marquent un tournant dans la crise étudiante, celle-ci apparaissant de plus en plus comme faisant partie d’une crise plus globale, sociale et politique, que vit la société québécoise.
On peut déplorer le fait qu’une manifestation ait été l’occasion ou le prétexte de comportements qui s’écartent manifestement d’actions légitimes des mouvements sociaux. Les médias, y compris Le Devoir, ont qualifié la manifestation du 20 avril, d’«émeute». Ayant à maintes reprises pris position, éthiquement, contre certaines dérives (voir entre autres : www.cyberpresse.ca/debats/votre-opinion/201203/16/01-4506283-un-carnaval-irresponsable.php), je ne suis certainement pas suspect de complaisance. Cependant, il me semble erroné de centrer son attention sur des faits spectaculaires et médiatisés, pour analyser adéquatement la crise actuelle.
En effet, au delà du mythe du “Black Block” …, il y a actuellement des centaines de jeunes, inquiets face à leur avenir, qui sont de plus en plus révoltés par la fermeture, le rejet et le mépris qu’ils subissent de la part d’un gouvernement qui s’est constitué en adversaire de leur mouvement, au point de les traiter comme des criminels.
Pour les étudiants des établissements ou programmes en grève, qu’ils soient favorables ou non au mouvement, la situation est devenue intenable, et même souvent désespérante. On remarque qu’à présent, ce sont aussi les enseignants qui sont victimes de violence et de toutes sortes d’incivilités, de la part d’une police détournée de ses fonctions par le gouvernement Charest, mais aussi de la part d’agents de milices privées engagés par dizaines, qui font régner la terreur sur des campus universitaires, à l’Université de Montréal, entre autres. On peut constater que le désespoir, mais aussi la colère est maintenant en train de gagner le corps professoral, bien au fait du désastre dans lequel le gouvernement a plongé les institutions scolaires postsecondaires, avec une indignation prononcée là où les forces policières et paramilitaires se sont signalées par la violence et l’intimidation à l’endroit des enseignants, à Montréal, à Gatineau, à Sherbrooke, à Limoilou, entre autres.
Une stratégie de tension à la québécoise
Le Québec subit actuellement une stratégie de tension, d’abord improvisée, mais de plus en plus structurée, dans laquelle une partie de la jeunesse étudiante, désespérée et révoltée, est l’objet d’une opération politique, qui vise à l’instrumentaliser comme “bouc émissaire” de la crise, au profit d’un pouvoir en déroute morale et politique. Il est à prévoir une aggravation de cette crise avec l’implication des jeunes travailleurs et chômeurs auprès de la jeunesse étudiante : les “Indignés” sont de retour !
Cependant, le “Printemps érable” pourrait avoir un goût amer, si les citoyens ne se mobilisent pas massivement pour mettre fin à la destruction délibérée du Bien commun, celui de l’école autre autres, dans le contexte d’une crise qui est devenue sociale et politique. Il leur faudra peut-être aussi à brève échéance, entrer en résistance pour faire échec à une stratégie de tension, qui se révèle d’une manière de plus en plus évidente.
Dans ce contexte de crise, le gouvernement Charest s’enferme dans un attentisme inquiétant, assorti d’un discours qui se radicalise dans une démagogie qui discrédite la démocratie. Comme dans les “années Bourassa”, il semble que le premier ministre du Québec ne soit plus qu’un «premier sous-ministre», comme l’évoquait Gilles Vigneault, dans la «Lettre de Ti-Cul Lachance à son premier sous-ministre» :
«Tu penses que j'm'en aperçois pas
_ Quand tu mets ta pancarte
_ À vendre, à vendre, avec en bas
_ Indiqué sur la carte
_ Si vous aimiez mon Labrador
_ Rajoutez-y donc ma Côte Nord
_ Les arbres y sont hors d'âge
_ (…)
_ Tu t'penses en haut tu m'penses en bas
_ (…)
_ Faudrait qu'tu sois si bête
_ À s'mer du vent de cette force-là
_ Tu t'prépares une joyeuse tempête
_ Peut-être ben qu'tu t'en aperçois pas. (…) »
La stratégie de tension appliquée au Québec n’est certainement pas le simple fait d’un gouvernement Charest qui apparaît tout à fait dépassé par la situation. Il faut s’inquiéter du fait que cette stratégie soit très probablement relayée, sinon orchestrée par des instances extérieures au Québec, canadiennes et états-uniennes en autres …, dont il ne faut pas minimiser l’importance et les ressources, surtout dans la perspective d’une probable élection du Parti québécois. N’oublions pas les leçons d’Octobre 1970 !
Yves Claudé - sociologue
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2 commentaires
Archives de Vigile Répondre
21 avril 2012C'est bien possible.Le gouvernement actuel,celui du Parti Libéral du Québec,le parti de John James Charest, vice-président du comité du non en 1995,a démontré à quel point il est en mission pour faire disparaître cette nation francophone que nous sommes.Il est le fidèle successeur de Lord Durham qui avait conclu que seul la disparition des francophones pourrait permettre au peuple britannique de prospérer.Le Canada peut très bien tirer les ficelles comme en 1970 avec cet exceptionnel menteur-allié qu'est Charest,il le faisait avec la GRC qui rédigeait de faux-communiqués signés F.L.Q. ou encore faisait sauter des bombes que les médias attribuaient au FLQ (agent Samson).
http://fr.wikipedia.org/wiki/La_gendarmerie_royale_du_Canada_et_les_libert%C3%A9s_civiles_dans_les_ann%C3%A9es_1970
Tant qu'aux E.U. il n'ont plus à demander l'autorisation au congrès américain pour déclencher des guerres à travers le monde.C'est maintenant l'OTAN qui leur passe la commande.Alors la mondialisation est bien avancée.
Seul un groupe d'irréductibles francophones d'Amérique du Nord résiste encore.
NOUS? Loco Locass
http://www.youtube.com/watch?v=5YMkRVmKXPw&feature=relmfu
Archives de Vigile Répondre
21 avril 2012Monsieur Claudé
Je suis complètement d'accord avec vous lorsque vous affirmez ceci en terminant votre texte: " Il faut s'inquiéter du fait que cette stratégie soit très probablement relayée sinon orchestrée par des instances extérieures au Québec, canadiennes et états-uniennes entre autres...dont il ne faut pas minimiser l'importance et les ressources surtout dans les perspectives d'une probable élection du Parti Québécois. N'oublions pas les leçons d'octobre 70!"
Pour moi, dans ma tête, il est clair que des forces extérieures sont à l'oeuvre pour empêcher la réalisation de l'indépendance du Québec. C'est déjà commencé avec la création de la CAQ qui va servir à diviser le vote québécois. Et toute cette violence que véhicule les médias, ne serait-elle pas provoquée par des corps policiers étrangers (SCRS, CIA...) pour envenimer le climat social au Québec ce qui permettrait à Jean Charest d'être réélu. Vous savez, ça ne se passe pas juste à Hollywood des scénarios semblables; il va falloir sortir de notre bulle. La violence, généralement, ça profite toujours au pouvoir en place à cause de la peur, de l'insécurité que ça l'engendre chez la population. C'est la seule façon que Charest peut sauver sa peau puisqu'il est brûlé avec la commission Charbonneau sur la corruption de son gouvernement. C'est à suivre...
André Gignac