La Ville de Rimouski demande au ministre David Heurtel de mandater le BAPE pour qu’il étudie le projet de transport de pétrole par train vers Belledune, au Nouveau-Brunswick. Plusieurs citoyens s’inquiètent du passage quotidien, dès 2017, de 220 wagons chargés de brut albertain.
Disant partager les « inquiétudes » soulevées par des citoyens de la municipalité et du Bas-Saint-Laurent, le conseil municipal a adopté mardi soir une résolution qui réclame que le ministère de l’Environnement du Québec confie un mandat au Bureau d’audiences publiques sur l’environnement.
Le libellé de la résolution évoque notamment les « incertitudes actuelles au sujet de la sécurité publique et des risques environnementaux » pour réclamer meilleurs mesures de sécurité. Le conseil a ainsi rappelé la tragédie humaine et environnementale de Lac-Mégantic, survenue il y a à peine plus de deux ans. Il a aussi souligné que malgré l’introduction de nouvelles mesures au pays, des déraillements importants ont eu lieu au cours des derniers mois.
À Québec d’agir
La Ville attend maintenant la réponse de Québec. Au moment de mettre en ligne, mercredi en début d’après-midi, il n’avait pas encore été possible d’obtenir de réaction de la part du cabinet du ministre Heurtel.
En juillet, Le Devoir avait toutefois révélé que le gouvernement Couillard n’entendait pas mener de consultations ou d’audiences publiques spécifiques au controversé projet.Selon ce qu’avait indiqué le cabinet du ministre de l’Environnement, toute la question du transport de pétrole au Québec doit être traitée dans le cadre de l’évaluation environnementale stratégique (EES) portant sur les hydrocarbures.
Cette EES, lancée l’an dernier, a toutefois hérité d’un vaste mandat. Elle porte en effet sur l’ensemble de la filière fossile au Québec. Elle inclut donc tous les projets d’exploration pétrolière et gazière, que ce soit en milieu terrestre ou en milieu marin, mais aussi les dossiers de transport de pétrole par pipeline, par bateau et par train.
Cette EES ne comprenait par ailleurs pas de consultations publiques comme celles que mènerait, par exemple, le Bureau d’audiences publiques sur l’environnement. En fait, selon ce qui a été précisé par le gouvernement Couillard au moment de l’annonce de l’EES, « une consultation publique en ligne sera menée par le comité directeur avant la publication du rapport final ». Par voie de courriel, le cabinet de M. Heurtel a toutefois indiqué mercredi que des « rencontres publiques » se tiendront au cours de l'automne, dans le cadre de l'EES.
Inquiétudes
Les inquiétudes par rapport à ce projet sont vives à Rimouski, ont fait valoir les citoyens présents mardi au conseil municipal. Il faut dire que le projet de transport de pétrole vers le futur port de Belledune nécessitera le passage de deux convois ferroviaires chaque jour, et ce, en plein coeur de la ville.
La municipalité ne sera d’ailleurs pas la seule à servir de point de passage au pétrole des sables bitumineux dans le cadre de ce projet. Selon les recherches effectuées par Le Devoir, tout indique que les convois passeront par l’île de Montréal, avant de poursuivre leur route vers Saint-Bruno-de-Montarville, puis au coeur de Mont-Saint-Hilaire, Saint-Hyacinthe et Drummondville. Ils longeront en partie l’autoroute 20, puis Lévis. Les convois comptant 110 wagons chacun passeront, deux fois par jour, en plein coeur de Rivière-du-Loup et de Trois-Pistoles.
Plusieurs autres municipalités du Bas-Saint-Laurent et de la Gaspésie verront aussi défiler quotidiennement les wagons chargés de pétrole des sables bitumineux. Au total, les livraisons expédiées chaque jour vers un port situé sur les rives de la baie des Chaleurs atteindront près de 160 000 barils. C’est trois fois le nombre de wagons que comptait le convoi qui a déraillé et explosé à Lac-Mégantic.
Qui plus est, selon les documents produits par Chaleur Terminals, promoteur du projet et filiale de la société albertaine Secure Energy, le port pourra aussi servir à « l’importation de produits pétroliers ». Des convois pourraient donc aussi être pleins pour leur voyage de retour vers l’ouest.
Une telle perspective de transport pétrolier accru suscite d’ailleurs de vives inquiétudes depuis plusieurs mois chez des groupes citoyens, mais aussi des municipalités et des MRC. À titre d’exemple, la MRC de la Matapédia, qui regroupe 18 municipalités, a adopté une résolution afin de manifester son opposition. Les trois nations micmaques de la Gaspésie ont même intenté une poursuite contre le gouvernement du Nouveau-Brunswick, qui a donné le feu vert au projet de port.
Québec solidaire et le Parti québécois ont demandé au gouvernement de mandater le Bureau d’audiences publiques sur l’environnement pour qu’il étudie le projet. Mais le gouvernement Couillard n’a pas donné de suite à cette demande.
« Le Québec doit agir dans ce dossier, mais le gouvernement fédéral doit prendre ses responsabilités. Il ne faut pas oublier que le transport ferroviaire est, encore, de compétence fédérale et il doit agir afin de garantir la sécurité des citoyens et du milieu de vie exceptionnel qu’est le Bas-Saint-Laurent », a également souligné mercredi la candidate du Bloc Québécois dans Rimouski-Neigette-Témiscouata-les Basques, Johanne Carignan.
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