Une polémique en cours sur Vigile m’a fait comprendre en partie les difficultés historiques du leadership péquiste et fait réfléchir sur les liens entre les chefs et les programmes au PQ.
Tous les chefs du PQ depuis René Lévesque jusqu’à Pauline Marois ont buté un jour ou l’autre sur l’une des parties de la coalition péquiste. Comme l’Union nationale avant lui, le PQ résulte d’une coalition. Au PQ, il s’agit essentiellement de nationalistes, allant de la gauche à la droite parfois assez radicale, et des indépendantistes aux fédéralistes mous, en attente d’une révision constitutionnelle qui n’arrivera jamais. En fait, autant à gauche qu’à droite, on réalise qu’un programme sérieux de réformes ne peut se faire dans le contexte canadien. Nous ne pourrons jamais réaliser un vrai programme de droite tant que nous serons au Canada, Medicare est le programme social qui soude le Canada, et auquel butent les lobbyistes du privé en santé. Les dépenses militaires échappent au contrôle des provinces et vont devenir une source importante de l’augmentation du déficit national, sans retombées pour le Québec, hormis le sacrifice de la vie de nos soldats pour des raisons nébuleuses. Autrement dit, nos extra-lucides de tout poil peuvent bien s’exciter et raconter à peu près n’importe quoi sur le déficit, sans l’indépendance, ils glosent pour rien, le fédéral va continuer à empiler des déficits et des programmes qui sont parfois pour nous sans utilité aucune.
Même chose pour un programme résolument de gauche, il ne peut trouver application dans le contexte politique canadien à moins de la prise du pouvoir par le NDP et d’une centralisation sans précédent. Les provinces vont regimber, et il y a de fortes chances que la Cour suprême découvre alors des vertus à l’autonomie provinciale. C’est pourquoi, la mort dans l’âme, Françoise David a fini par mettre l’indépendance au programme de Québec Solidaire. Mais QS n’y croit pas vraiment, il a préféré soutenir des blancs becs aux dernières élections fédérales, qui se présentaient sous la bannière NDP. Ils ont ainsi fait battre le Bloc, et sans le vouloir, puissamment contribué à la victoire de Stephen Harper. C’est une autre histoire, mais elle illustre le danger de l’attitude maximaliste. Je reviendrai sur le maximalisme et ce que je crois être un de ses avatars au sein du mouvement indépendantiste.
Au PQ, l’adoption de la démarche référendaire en 1973 était basée sur l’hypothèse qu’un bon gouvernement entraînerait un oui enthousiaste au référendum; le référendum est tout à coup devenu nécessaire à l’accession à l’indépendance. L’électoralisme entrait au PQ, et avec lui un lot d’aventuriers qui de Pierre-Marc Johnson à François Legault ne rêvaient que de pouvoir; ils n’ont fait avancer ni le Québec ni la cause nationale. Au sommet des mandats de Lucien Bouchard, le PQ n’a littéralement rien fait pour faire avancer la cause, le premier ministre se contentant de râler non seulement contre Dion et Chrétien, mais aussi contre les membres du PQ qui constataient qu’il ne faisait rien avec l’article 1 du programme. Il semble aujourd’hui que Lucien Bouchard n’ait jamais voulu de cet article maudit, et qu’il ne comprenne pas que les membres, qui avaient créé et financé ce parti, y tenaient tant.
Après la démission de Lucien Bouchard, Bernard Landry a repris le flambeau. En indépendantiste qu’il est, il a favorisé sinon fait adopter un programme beaucoup plus axé sur l’accession à l’indépendance que son prédécesseur. En définitive, avec ses qualités et ses défauts, c’est le chef qui fait adopter le programme le plus approprié non seulement à la situation politique, mais à ses valeurs, à sa personnalité et à ce qu’il croit en mesure de vendre aux Québécois. René Lévesque a menacé de démissionner pour avoir un programme auquel il pouvait adhérer. Et si on compare le PQ sous Jacques Parizeau et Lucien Bouchard, on a l’impression d’avoir affaire à deux Partis québécois. Dans la diatribe nous opposant sur Vigile, un vigilien reprochait au PQ d’avoir abandonné le programme de 2005. À partir de la démission surprise de Bernard Landry, et surtout de l’élection d’André Boisclair, il était clair que ce dernier n’arriverait pas à vendre un programme écrit pour un autre alors qu’il était absent du Québec. En tout respect, nonobstant ce que peut croire ce vigilien, je crois qu’André Boisclair a traîné comme un boulet un programme qu’il a tout de même défendu, mais auquel il ne croyait pas beaucoup. Ce n’est d’ailleurs pas lui que je blâme autant que Bernard Landry, prisonnier d’un objectif qu’il avait pratiquement atteint et que de toute façon, il avait placé bien trop haut, et qui a démissionné sur un coup de tête.
En 2011, Mme Marois a fait adopter une autre démarche qu'il faudra expliquer clairement car actuellement je ne crois pas que les Québécois la comprennent. Ça ne veut pas dire que ce programme de gouvernance souverainiste ne soit pas indépendantiste. En outre, compte tenu des errances des chefs passés, plusieurs indépendantistes souhaiteraient voir la démarche mieux encadrée et mieux expliquée au parti et à la population. Mme Marois a refusé, et le congrès l’a appuyée dans une proportion record. Dans ces conditions, en ce qui concerne le programme, elle a toute la légitimité pour agir. Et ceux qui n’étaient pas d’accord ont pu saisir l’événement de l’amphithéâtre pour partir, mais je crois que même si enlever tout recours aux citoyens était gros comme couleuvre à avaler, nous touchons avec la gouvernance à la vraie raison de leur départ. Et je crois toujours qu’au moins sur papier, ces raisons et ces différends sont loin d’être insurmontables.
Je ne veux pas oublier les errances de Mme Marois dans l’affaire de l’amphithéâtre, elle a admis avoir fait erreur, et elle la paie chèrement. Mais ce n’est pas mon propos de ressasser tout ça une fois encore. Car en politique, dans un système bipartite, être contre l’un, c’est ipso facto devenir l’allié de l’autre. S’opposer à Mme Marois comme le font bien des vigiliens les transforme en cinquième colonne de Jean Charest. L’argument de l’amphithéâtre ne m’impressionne guère, c’est avant tout un projet de Jean Charest. Voter pour lui à cause de ce qu’a fait Mme Marois dans ce dossier devient un sophisme, il va faire ce qu’elle a proposé. Et voter pour le tandem Sirois-Legault va tout simplement permettre à Charest de l’emporter.
En ce qui concerne le programme, je peux comprendre la déception des indépendantistes purs et durs. Je vais quand même analyser l’attitude de ceux qui ne jurent que par le programme de 2005 en raison de son caractère indépendantiste, et en fait de tous ceux qui nous demandent de na pas voter pour le PQ parce qu’il n’a pas mis a son programme tout ce qu’ils souhaiteraient. Revenir avec cela après André Boisclair est pour le moins curieux. Il a défendu un programme auquel il ne croyait pas trop, et il a échoué, nonobstant tous les sondages tenus au moment de la course à la chefferie. Revenir avec ça aujourd’hui a quelque chose du maximalisme italien qui n’est pas de bon augure. Rappelons que les maximalistes, dans l’Italie de l’après-guerre, la première, bien que marxistes ou anarchistes, refusaient tout compromis et tenaient à leur programme intégralement même contre les socialistes. Ils sont ainsi devenus les alliés objectifs de ….Benito Mussolini, un ancien socialiste, qu’ils aimaient mieux voir au pouvoir que des socialistes, pourtant beaucoup plus près de leurs idées. Non seulement n’ont-ils jamais eu le pouvoir, non seulement jamais l’Italie n’a adhéré à leurs idées, mais la plupart d’entre eux ont dû s’exiler ou sont morts sous les coups des squadritti de Mussolini ou dans ses prisons une fois qu’il fut au pouvoir. Il faut y penser deux fois avant de donner le pouvoir à nos adversaires, même au tandem Sirois-Legault, (juste en passant, Legault n’est-il pas, à l’exemple de Mussolini, un transfuge ?).
Ces partisans de la politique du pire croient que dans trois ans, ils ramèneront le PQ à la pureté indépendantiste après la défaite. Il leur faudra aussi trouver un chef à leur goût. Et comme plusieurs d’entre eux sont friands de sondage, ils voudront aussi des sondages favorables. C’est prendre un gros risque.
Ceux qui ont une boule de cristal et s’y fient se sont trompés bien plus souvent qu’ils ont eu raison depuis un an au Québec. Aussi, avant de devenir la cinquième colonne de Jean Charest ou du tandem Legault-Sirois, il faudra y penser deux fois. Comme le disait Gilles Duceppe, il faut nous retrouver sur ce qui nous unit plutôt que de nous disputer sur ce qui nous divise. D’autant plus qu’en regard de ce qui nous unit, ce qui nous divise est bien peu. L’heure est plus à resserrer nos rangs qu’à nous disperser en faisant le jeu de nos adversaires.
Non au maximalisme
Resserrer les rangs
Ces partisans de la politique du pire croient que dans trois ans, ils ramèneront le PQ à la pureté indépendantiste après la défaite.
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2 commentaires
Archives de Vigile Répondre
3 juillet 2011Ecrire que c'est l'élection des députés du NDP au Québec qui a permis à Harper d'avoir une majorité absolue à la chambre des Communes c'est totalement ignorer que pour la première fois dans l'histoire des élections au Canada, il a été possible d'obtenir une majorité absolue SANS que la députation québécoise fasse partie de cette majorité. Si le Bloc avait gagné l'intégralité des sièges au Québec ceci n'aurait nullement empêché Steven Harper d'avoir une majorité absolue...
Archives de Vigile Répondre
1 juillet 2011Je comprend parfaitement le programme. Mais le PQ n'a que deux choix. Faire l’indépendance ou arrêter la progression du fédéralisme. Si la première option n'est pas possible, il devient évident que nous devons réaffirmer le caractère francophone du Québec. Afin de réduire le nombre d'immigrant qui visent à s'établir au Québec, en vivant comme s'ils étaient dans le ROC. Et faire un véritable geste d'affirmation.
Non seulement, le PQ doit réaffirmer le caractère francophone. Mais il doit se préparer à prendre le contrôle de tout ce qui touche la langue afin de la Canada n'est plus aucun pouvoir sur notre avenir en tant que francophone.
La situation actuelle démontre que les affaiblissement de la loi 101 ont fait un tort considérable aux Québécois. De plus le Canada a été incapable de protéger adéquatement les francophones hors-québec. Enfin nous n'avons jamais pas adhéré à cette fédération.
Tous les conditions sont réuni pour pouvoir prendre le contrôles des pouvoirs qui servent à notre assimilation. En refusant la combat pour l'affichage en français, Mme Marois a abandonner le combat avant même de le commencer.
Alors dans quel but devrions-nous resserrez les rangs?
L'identité québécois a déjà reposé sur deux socles: La religion et la langue. Tout peuple a besoin d'au moins d'un point commun pour survivre. Premièrement, nous devons réglé cela une fois pour toute. Deuxièmement, nous devons repensé le projet d'indépendance afin de rendre plus attrayant. Comment peut-on réellement envisager de faire un pays, alors que les Québécois n'ont à peu pas de fierté d'être des Québécois. Faire l'indépendance n'est pas suffisant. Il faut forcément faire l'indépendance pour quelque chose de mieux et de plus grandiose que le Canada.
Mme Marois, si la défense du français est au dessus de vos forces. Il clair de vous n'êtes pas plus la personne pour faire l'indépendance. Les Québécois n'ont plus le temps à perdre avec des gens aveuglés par leur égo. Être à la tête du PQ demande de grande qualité de vendeur. Quelqu'un qui aurait du mal à vendre une mitrailleuse à des Hell's Angel, n'y a pas sa place! Vous avez été incapable de tirer partie de l'incompétence d'un des pires gouvernements de l'histoire du Québec. Croyez-vous vraiment que vous pouvez convaincre les Québécois de quoi que ce soit?
La conclusion est évidente: La porte est là !