Résister aux envahisseurs

Résistance au Sud (1)

Tribune libre




Face à la crise alimentaire

volume 15-2008 / 4 de la revue alternatives sud, publiée par Centre Tricontinental, Louvain-la-Neuve(Belgique) et Éditions Syllepse, Paris (France).

Trouvaille glanée au hasard de la boutique de la Bibliothèque nationale de France, à Paris.

-Premier intérêt pour un Québécois aux portes de 2010 : Résistance.

-Second point d’intérêt humanitaire : Crise alimentaire.

Par manque d’information, les Québécois déçus de leur démocratie, de leurs élus, peuvent opter pour le repli, l’indifférence à la vie politique. La plaquette que nous examinons ici devrait nous mettre sous les yeux un exemple de la vitalité des peuples négligés de par le monde.

Ultérieurement, dans une seconde partie, (2) Résistance au Nord, nous tenterons d’en tirer parti au Nord, comme modèle de résistance aux envahisseurs.

LA MOBILISATION POPULAIRE

Premier semestre 2008. Le Sud connaît une vague d’irruptions populaires violentes consécutives à la spectaculaire envolée des prix alimentaires. Aucun continent n’est épargné. Telle une traînée de poudre, des émeutes urbaines éclatent successivement en Guinée, au Burkina Faso, au Cameroun, au Sénégal, en Haïti, en Côte d’Ivoire, aux Philippines, au Bengladesh, au Pakistan, en Indonésie, en Malaisie… Elles sont quasi simultanées au Maroc, en Tunisie et en Égypte. Partout, le scénario semble se répéter à l’identique : flambée locale des prix, manifestations de colère populaire, pillage de magasins, proclamation par les autorités de l’état d’urgence, affrontements violents avec les forces de l’ordre qui, dans certains cas, n’hésitent pas à tirer dans la foule.
Au registre de ces épisodes émeutiers, au registre de l’émotion ou de la frustration s’associent souvent d’authentiques revendications sociales et politiques dont la portée et la signification dépassent les motivations les plus apparentes. Révélatrices des tensions qui parcourent les sociétés du Sud, ces « émeutes » ne doivent pas être lues et interprétées comme de simples accidents conjoncturels, isolables dans le temps et l’espace, mas replacées dans un continuum ou une généalogie de luttes et de résistances ancrées dans des contextes sociaux, politiques, culturels spécifiques et variés… ceci afin de mettre en évidence la grande diversité des résistances, des registres d’action collective et des lieux d’expression de l’insatisfaction dans le Sud.
RACINES DE LA CRISE.

Les raisons évoquées dans les médias pour expliquer le vaste problème alimentaire :hausse des coûts de l’énergie; changement climatique; explosion de la demande due aux nouvelles habitudes de consommation dans les pays émergents; baisse de l’offre à la suite de mauvaises récoltes dans quelques grands pays exportateurs (Australie, Brésil, Ukraine, etc.); épuisement des stocks internationaux, au plus bas depuis la Deconde guerre mondiale; anticipation sur les prix et spéculation sur les denrées alimentaires, devenues valeurs refuges dans un climat économique et financier morose; volonté de certains pays exportateurs de réserver leur production au marché intérieur; baisse du dollar; et surtout, course aux agrocarburants, présentés autrefois comme recette miracle contre le changement climatique.
Mais ce qui est nouveau, c’est l’extrême vulnérabilité et la dépendance de nombreux pays en développement à l’égard de leurs importations alimentaires (Sylvie Brunel, économiste). Comment en est-on arrivé là? Déjà, dans les années 1980-90, une cinquantaine d’émeutes ont éclaté (Niger, Bangladesh, Mauritanie, Guinée, Mexique, Maroc). Crise non pas de manque, mais d’accès à la nourriture, par les options politiques et économiques qui ont été prises. Crise prévisible, donc. Elle trouve son origine dans la transformation des secteurs agricoles nationaux au cours des dernières années.
Ainsi, nous connaissons le scénario. Début 1980, éclate la crise de la dette. Afin d’alléger un budget déjà largement ponctionné par le « service » de celle-ci, la plupart des États du Sud sont poussés par les institutions financières internationales à ajuster leur économie. Les recettes sont connues : austérité budgétaire, privatisation des services publics, coupes nettes dans les dépenses sociales, ouverture aux échanges et aux capitaux étrangers, etc. Jugé coûteux et peu productif, le secteur agricole est lui aussi l’objet de réformes de fond. Les pays en développement sont invités à déréguler leurs marchés agricoles, à ouvrir grand leurs frontières aux importations (alimentaires notamment) et à démanteler leurs politiques d’assistance au secteur, voire les institutions publiques chargées d’encadrer les producteurs. Parallèlement, il leur est demandé de se recentrer sur la production et l’exportation de produits à plus haute valeur ajoutée (source de devises sur les marchés internationaux) au détriment des cultures vivrières.
Pour les concepteurs de ces politiques néolibérales, la sécurité alimentaire n’était pas réellement mise ne danger dans la mesure où les marchés internationaux se chargeraient, en théorie, d’approvisionner les marchés locaux, urbains en particulier, en produits alimentaires à bas prix, en particulier ceux des agricultures du Nord (É.U., Europe), en situation de surproduction et d’aide publique généreuse à l’exportation….
C’est dans le même esprit que seront signés les divers accords de libre-échange régionaux, bilatéraux et birégionaux, de même que les accords de Marrakech (1995) qui établiront, avec la création de l’OMC, un cadre global de libéralisation des échanges agricoles.
LE PIÈGE POLITIQUE SE REFERME.

Le cas d’Haïti est emblématique. À la fin des années 1980, dans le cadre du plan Caraïbe concocté par les institutions internationales et l’administration Reagan, le pays abandonne la quasi-totalité de son agriculture vivrière aux coût de production jugés à l’époque « prohibitifs ». Sommé d’ouvrir grand ses frontières pour mieux s’insérer dans l’économie mondiale, le gouvernement haïtien supprime en quelques années à peine les droits de douane sur plusieurs produits alimentaires pour concentrer ses efforts sur le développement des cultures plus facilement exportables vers les É.U ou l’Europe (arbres fruitiers notamment). Quant aux usines et ateliers d’assemblage censés s’implanter dans le pays et promis par les concepteurs du plan, attirés par des « conditions favorables », ils se chargeront d’absorber la main d’œuvre rurale excédentaire…
Les conséquences de cette politique se sont rapidement révélées catastrophiquesé Alors que par le passé, l’agriculture haïtienne subvenait à peu près aux besoins de la population, le pays importe aujourd’hui près de 60% de son alimentation. Pas étonnant qu’à la moindre évolution des cours sur les marchés mondiaux, les « émeutes de la faim » se déclenchent comme un feu de paille (Husson, 2008).
…incapables de concurrencer des importations bon marché aux coûts de procuction inférieurs aux leurs, les paysans haïtiens, mais aussi, philippins, égyptiens, nigériens, indiens, sénégalais, mexicains, etc. ont vu en quelques années fondre leur revenu. Et se sont retrouvés piégés dans une spirale d’endettement et d’appauvrissement. Beaucoup n’ont eu d’autre choix que de vendre leur force de travail aux grands propriétaires terriens et aux entreprises agro-industrielles… les meilleures terres rachetées pour une bouchée de pain aux paysans appauvris… s’exiler vers les agglomérations urbaines où ils sont venus gonfler des bidonvilles que la campagne arrive désormais de plus en plus difficilement à nourrir.

De même, l’ouverture du marché mexicain au maïs importé des É.U. aurait poussé près de1,3 million de paysans à quitter la campagne entre 1994 (ALENA) et 2003. Autrefois autosuffisant, le pays importe désormais près de 30% du maïs nécessaire à sa consommation des É.U. Dans ce cas-ci, la décision des É.U. de produire massivement des agrocarburants à base de maïs, combinée aux jeux spéculatifs des principales entreprises importatrices (monopoles) va provoquer uen quelques mois une augmentation de près de 60% du pris de la tortilla, à l’origine des émeutes de 2007.}
Une tendance peut cependant être dégagée dans cette constellation de mobilisations urbaines (tous pays mentionnés) qui mérite ici toute l’attention : l’émergence de la multiplication en Afrique noire, en Égypte et au Maghreb, de « coalitions contre la vie chère », le plus souvent en dehors des habituels canaux d’expression et des relais politiques traditionnels. Hétéroclites dans leur composition, on y retrouve des associations de consommateurs, d’étudiants, de chômeurs, des organisations confessionnelles et des petits commerçants, des ONG, des groupes de défense des droits de l’homme, des représentants des communautés de base, des partis d’opposition et des syndicats.
Ces « coalitions » signalent l’apparition sur la scène publique d’un nouvel acteur collectif qui n’a d’autre choix que d’utiliser la rue comme lieu d’expression… témoignent aussi du mécontentement croissant de larges secteurs de la population vis-à-vis des systèmes politiques nationaux… prennent parfois l’allure de véritables manifestations antigouvernementales, où étaient dénoncés pêle-mêle l’incurie, la corruption, le manque de gouvernance, l’absence de dialogue, le manque de liberté individuelle et collective, l’autoritarisme ou encore l’indifférence des autorités publiques, tenues pour largement responsables de la situation.
GOUVERNEMENTS SUR LA DÉFENSIVE.

Face à ces mobilisations, les gouvernements ont cherché à se dédouaner en invoquant des facteurs extérieurs indépendants de leur volonté (hausse internationale des prix, catastrophe naturelle, injustice du système économique international, etc.). C’était pourtant bien eux que la rue visait directement (Harsch, 2008). Ce qui explique d’ailleurs la rapidité et la brutalité de la riposte gouvernementale et les affrontements violents qui s’en sont suivis.

Dans les pays émergents, les projets de modernisation économique (concessions minières et pétrolières, construction de barrages, création de zones franches, etc.) et leurs corollaires (expulsions, spoliations, etc.) sont à l’origine d’une multiplication des résistances dans le monde rural, les unes spontanées, les autres encadrées par des organisations ayant pignon sur rue au niveau local ou national. En Chine et aux Philippines actuellement : zones économiques spécialisées pour attirer les investissements étrangers. Amérique latine, Mexique, Paraguay, Brésil :contre projets d’infrastructures, ports, centrales hydroélectriques, multinationales agroalimentaires, grandes exploitations agricoles, canne à sucre ou autre : marches, blocages routiers, occupations de terres.

Les réactions des autorités publiques face à la crise doivent être analysées à l’aune de la nature des rapports entre États et sociétés civiles. D’une part, parce que le type de réponses concrètes va généralement dépendre de la capacité de la société civile à peser sur le cours des décisions publiques. D’autre part, parce que les réponses gouvernementales vont le plus souvent s’inscrire dans des stratégies politiques visant à canaliser ou désamorcer la grogne populaire.
DÉFI DE LA SOUVERAINETÉ ALIMENTAIRE.

Tenu à Rome en juin 2008 afin de trouver des solutions communes à la crise alimentaire, le sommet de la FAO a surtout été l’occasion pour les participants d’étaler leurs profondes divergences : agrocarburants, subsides agricoles, type de politique alimentaire à mettre en œuvre. Désillusion. Une série de promesses des États du Nord, une préoccupation nouvelle quant à l’avenir de l’agriculture familiale et vivrière…la déclaration officielle reste muette sur la question de la « souveraineté alimentaire ». Mais les réflexes protectionnistes se sont multipliés…les accords bilatéraux de libre-échange peinent à s’imposer ou sont de plus en plus ouvertement remis en cause. Non seulement par une population qui s’est mobilisée contre ce type d’accord, mais aussi par des gouvernements. Initiative vénézuelienne, l’Alba (alternative bolivarienne pour les Amériques) entend dès lors s’imposer, à grands renforts d’une diplomatie de la séduction, comme solution alternative aux accords de libre-échange, notamment par la promotion d’une coopération interétatique renforcée autour des questions de sécurité et de souveraineté alimentaire.
Pari alimentaire loin d’être gagné. Au Brésil, Lula, arrivé au pouvoir grâce à la mobilisation de nombreux secteurs populaires, est devenu l’un des principaux promoteurs de la libéralisation des échanges agricoles. C’est un débat entre 2 visions. D’un côté, ceux qui croient que le meilleur moyen de faire face à la crise alimentaire mondiale est de négocier à l’OMC l’ouverture maximale des marchés mondiaux aux exportations des multinationales. De l’autre côté, ceux qui réclament une réorientation radicale des politiques agricoles pour surmonter le chaos que la mondialisation a contribué à créer.

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Ouhgo (Hugues) St-Pierre196 articles

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Fier fils de bûcheron exploité. Professeur retraité d'université. Compétences en enseignement par groupes restreints, groupes de réflexion, solution de problèmes. Formation en Anglais (Ouest canadien), Espagnol (Qc, Mexique, Espagne, Cuba), Bénévolat latinos nouveaux arrivés. Exploration physique de la francophonie en Amérique : Fransaskois, Acadiens, Franco-Américains de N.-Angl., Cajuns Louisiane à BatonRouge. Échanges professoraux avec la France. Plusieurs décennies de vie de réflexion sur la lutte des peuples opprimés.





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2 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    18 novembre 2009

    Monsieur Picard,
    Là où je suis d’accord avec vous, c’est quand vous dites : Oui, c’est correct du porc, mais pourquoi exporter ? Pourquoi ne pas offrir des filets de porc, voir du jambon à la ferme, une agriculture de proximité ?
    La méga-industrie du porc au Québec m’a, personnellement, enlevé le goût du bacon autant que du filet de porc, du rôti de porc, du ragoût de pattes, même achetés chez le boucher du coin. Tout ça me ramène au nez les effluves du purin qui m’inondent fréquemment, en Montérégie, quand je mets le nez dehors, surtout depuis que mes nouvelles fenêtres superisolantes m’assurent un intérieur vivable. Les charcuteries me rappellent que ces fosses à purin risquent toujours, au hasard des nuits, de fuir dans les ruisseaux, les rivières et les lacs qui accueillent cet excès de phosphore pour faire croître l’algue bleue. Je vois aussi les immenses champs de maïs, cultivés pour engraisser ces marées de porcs, champs-alibis pour recevoir ces tsunamis de purin, épandu en excès, qui ruissellent dans les larges rangs d’une plantation assimilable à la canne à sucre, néfaste monoculture du sud qui a repoussé les petits paysans vers les bidonvilles.
    Voilà donc où nous différons d’opinion : l’élevage du porc n’est pas une entreprise agricole vivrière assurant un honnête revenu familial bucolique… La production moderne du porc est une industrie intégrée verticalement : La supermeunerie achète tous les petits fermiers qu’elle peut, y construit des mégaporcheries où sera salarié un de ces anciens fermiers qui actionnera l’électronique prévue pour l’alimentation et le nettoyage, de la maternité, de l’engraissement et de la finition des sujets en production. Toute la terre plantée en maïs fournit la matière première à cette meunerie qui possède aussi les abattoirs et salles de découpe, usines assez géantes pour étrangler tout syndicat d’employé destiné à garantir un salaire décent aux familles de ces anciens agriculteurs délogés par la monoculture du maïs. Ce système d’intégration s’étend souvent à la distribution des viandes au détail dans des multinationales qui peuvent perdre le contrôle jusqu’à disséminer un contaminant accidentel de Listériose sur tout un continent…
    Et ce vaste détour, Monsieur Picard, nous sort totalement de l’objet de notre débat : La Résistance, la crise alimentaire. Vous visez l’agriculture, mais vous atteignez l’industrie!… L’agriculture familiale, au Nord comme au Sud, est tuée par l’industrie dépersonnalisée. Par je ne sais quelle entourloupette, vous justifiez le rapt des terres arables par les planteurs de maïs (*) ou de canne. Vous négligez le drame humain des travailleurs déplacés qui se réfugient dans les agglomérations urbaines, sans formation, sans revenus suffisants pour acheter les denrées alimentaires, otages des monopoles industriels. Souvent en collusion, je vous l’accorde, avec les gouvernements obsédés par la dette, indifférents au partage social de la richesse capitalisée dans l’entreprise privée, multinationale, mondialisée, inatteignable par le fisc. Inaccessible au consommateur qui ne peut que protester par la descente dans la rue, pour résister à l’envahisseur.
    (*) Méfaits des agrocarburants, éthanol fait de maïs : Polluant du mazout brûlé par les tracteurs, au semis, à l’épandage d’herbicide, à la récolte (compaction des sols, perte de sols aux cultures vivrières), transport à l’usine, procédés de transformation. Le litre d’éthanol coûte au moins un litre de carburant. De plus, au lieu d’y perdre tout ce maïs alimentaire, préférable d’utiliser d’autres ligneux à croissance rapide, si jugé nécessaire.

  • Frédéric Picard Répondre

    17 novembre 2009

    La crise alimentaire illustre quelquechose de flagrant: L'état nounou tue.
    Les agriculteurs (dont l'UPA) possèdent des lobbys ultra-puissants. Ils bloquent les routes avec du fumier, tuent leurs vaches au 12 devant les cameras, déversent leur lait ou leur purin ici et là. Bref, au fil des années, les agriculteurs des pays industrialisés ont transformé leur puissance en corporatisme, en se servant des leviers de l'état pour exclure les jeunes, les pays en développement, en excluant la nouveauté. Via les subventions, des quotas ou les assurances stabilisation diverses, ils se sont placés au dessus du marché.
    Ce ne sont plus les lois du marché (donc les besoins des hommes) qui définissent l'offre agricole, mais les politiques gouvernementales et les largesses de l'état nounou.
    On vide nos campagnes de nos jeunes, parce que ces derniers n'ont pas les moyens de se payer des quotas. Tu veux entailler 200 érables sur ta terre à bois? Paie des quotas ! Traire 15 vaches ? Paie des quotas.
    On surtaxe notre environnement avec le porc, avec l'alternance maïs, soja, lisier, maïs, soja, lisier. Pendant ce temps, le prix du porc chûte. Pas grave, le gouvernement va "stabiliser". S'il ne stabilise pas assez ? Pas grave, on va épandre dans Décarie.
    Pas que nos agriculteurs ont totalement torts. Mais au lieu de se concentrer pour exporter du porc, pourquoi ne diversifient-ils pas leur production. Pourquoi le gouvernement ne leur fournirait pas des biofermenteurs, au lieu de "stabiliser" ? Pourquoi n'entend-on pas parler d'aquaponique, de chauffage de serres aux granules de bois, d'élevage de saumons, de champignons ou de tilapias? Oui, c'est correct du porc, mais pourquoi exporter? Pourquoi ne pas offrir des filets de porc, voir du jambon à la ferme, une agriculture de proximité?
    Pourquoi Agropur se sert de son pouvoir de marché pour écraser les petits fromagers? État nounou et corporatisme.
    ****
    Les États-Unis et l'Europe maintiennent les céréales à des prix artificiellement bas en subventionnant l'agriculture. Résultat ? On créé une dépendance à l'alimentation à bon marché dans le tiers monde. Lorsque vient le temps de payer le "vrai prix" de la bouffe, à cause de la spéculation ou de la Chine, les pays du tiers monde pêtent au frette. Ils ont tout convertit au cash-crop. Ils ne peuvent pas revenir en arrière.
    On désigne du doigt les agrocarburants. C'est là un phénomène marginal, un coupable désigné d'avance pour les partisans de l'état nounou-agricole, comme Jean Ziegler. Facile d'accuser une activité qui "brule" de la nourriture. Beaucoup plus difficile d'accuser des subventions aux puissants lobbys agricoles. Lobbys qui rendent le coût du logement en Suisse prohibitif.
    En fait, les agrocarburants sont victimes, comme tout les autres, des denrées agricoles chères. Si le boisseau de maïs coûte une fortune, ce n'est plus rentable de faire de l'éthanol. Les compagnies alors diminuent leur production d'éthanol au strict minimum et envoient ces denrées alimentaires dans l'alimentaire. On transforme le maïs en sirop de maïs, au lieu de faire de l'éthanol.
    Donc, les agrocarburants stabilisent les prix des grains à un minimum. C'est là une bénédiction pour les cultivateurs du tiers-monde, qui veulent revenir au manioc, à la patate, au mais, au blé ou au riz. Sinon, les subventions des pays riches les en empêcheraient.
    En bref, la crise alimentaire puise sa source dans les prix tordus par nos gouvernements. Parce que le gros bon sens a déserté l'Europe et l'Amérique en même temps, parce qu'il est si facile de transformer une puissance économique en lobby.