On nous a traités de nazis, de communistes, de talibans. Il ne manque plus que l'autodafé!
Nazis ! Ah oui ? Les nazis, cela rappelle pourtant le 10 mai 1933 alors que, devant l'université de Berlin, on a brûlé 20 000 livres qui avaient «une action subversive sur notre avenir ou [portaient] atteinte aux racines de la pensée allemande...». Le docteur Goebbels avait une vision claire de son rôle comme ministre de la Propagande. Cela consistait à effacer toutes les idées dérangeantes.
Nous ne sommes pas dans l'Allemagne nazie, et le cahier pédagogique du Conseil, tout au contraire, ne cherche pas à faire taire les autres points de vue.
Mais que diable, pourquoi tenir absolument à ce que les enseignants ne lisent pas ce matériel complémentaire ? Est-ce parce qu'on croit qu'ils sont trop manipulables pour se faire une opinion éclairée ?
Un peu d'histoire
Maintenant que la poussière est en train de retomber, cela vaut certes la peine de replacer la parution du cahier pédagogique sur fond d'histoire. Depuis le début de la Révolution tranquille, nous avons souvenance de trois événements scolaires qui ont provoqué de semblables remous.
Le premier a eu lieu en 1962, à l'école Saint-Nom-de-Jésus de la CECM. Quatre jeunes enseignants ont alors décidé d'enlever les images pieuses qui tapissaient les murs de leurs classes, provoquant ainsi un ouragan médiatique. L'affaire a fait la manchette pendant trois mois. Le journal Montréal-Matin demandait leur congédiement pur et simple. Tous les mots ont été utilisés pour les vilipender. Ils s'attaquaient aux «valeurs fondamentales de l'école !». Ils ont finalement été congédiés par la CECM. Malheureusement, personne ne se souvient d'eux alors qu'ils ont été à l'origine une véritable révolution dans la conception que nous avions de l'école.
Le second événement se passe en 1975. Il s'agit de la publication du Manuel du premier mai, un cahier pédagogique publié par la CEQ qui suggérait aux enseignants d'utiliser une journée de classe pour faire des activités au service de la classe ouvrière. La réaction de la presse ressemblait alors à celle d'aujourd'hui : «Un nouveau type de barbarie nous menace !» ou encore «Le pamphlet de la CEQ aurait vite pour effet de dresser les enfants les uns contre les autres». Bizarrement, l'activité la plus décriée n'utilisait même pas le vocabulaire stéréotypé de l'époque. Il s'agissait d'un problème de mathématique qui comparait le salaire de l'ouvrier Tremblay à celui du patron de l'Alcan. Trois ans plus tard, à la fin des mesures anti-inflation du premier ministre Trudeau, le salaire de l'ouvrier Tremblay était resté le même, mais celui du patron avait doublé. Tout le monde n'avait pas à se serrer la ceinture également pour juguler l'inflation. Mais aucun des commentateurs de 1975 n'était là pour dénoncer cette énormité.
Le troisième événement a eu lieu le 3 avril 1991, à la Commission des écoles catholiques de Montréal. L'un de nous a alors présenté une proposition au conseil des commissaires demandant d'augmenter l'éducation sexuelle à l'école. Quelle émeute ce fut !
Et nous voilà replongés dans une controverse semblable, avec sensiblement les mêmes anathèmes, les mêmes arguments culturels, les mêmes excommunications. Et si l'on laissait la chance pour une fois aux idées de s'exprimer librement. Que diriez-vous d'éviter de brûler le livre avant qu'il ne soit lu ?
La manipulation
La levée de boucliers actuelle nous place devant un drôle de dilemme. C'est comme si le message était qu'il vaut beaucoup mieux fonctionner de façon hypocrite que de parler des choses clairement.
De nos jours, pour instiller une idée dans la population, les techniques de manipulation sont devenues très sophistiquées. Ce sont avec les messages subliminaux que les vendeurs d'idées, de jouets ou de savonnettes fonctionnent dorénavant. On ne vend plus une automobile, mais un outil de séduction ou de puissance. C'est aussi vrai pour la multitude de matériels qui parvient dans les écoles avec les compliments du gouvernement fédéral... Faut-il rappeler que l'éducation est une juridiction entièrement provinciale ?
Alors, qu'est-ce qui est mieux pour les enfants et la population ? La nourrir intellectuellement d'idées subliminales véhiculées par les publicités de toutes sortes ou bien lui proposer des idées claires à visière levée ? Quand les idées sont clairement énoncées, on peut les discuter, les confronter, devenir plus intelligents par le processus dialectique qui en résulte.
C'est quand les idées sont instillées avec des stratégies de marketing, avec des techniques publicitaires qu'on se fait manipuler. Pas quand nous discutons d'idées contradictoires, clairement exprimées.
Le cahier que nous avons publié est franc et ouvert. En cela, oui, il s'oppose à toutes les stratégies politiciennes qui cherchent à se rallier les gens sans leur dire de quoi il retourne.
Ce que le cahier n'est pas
Il est très impressionnant de voir comment les commentateurs ont syncopé les idées pour mieux ridiculiser un cahier qui n'a rien de ridicule. L'exemple le plus frappant est que nous ferions de la politique en maternelle. Quel commentaire malhonnête !
Ce sont des pédagogues qui ont écrit ce cahier. Les idées proposées pour le primaire sont adaptées à ce niveau. Prétendre que l'activité que nous proposons en maternelle est de la politique est pure démagogie. Nous n'avons pas l'espace pour décrire ici cette activité. Mais à sa lecture on verra que, dans tous les pays, les enseignants font une activité semblable avec leurs élèves lors de la fête nationale.
Conclusion
Ce guide a été produit par des pédagogues chevronnés. C'est pourquoi notre première préoccupation en commençant sa rédaction a été d'éviter la propagande. Dès le début du cahier, nous le disons clairement : le bon prof, selon nous, est celui qui, indépendamment de ses convictions personnelles, met les élèves en contact avec les divers points de vue. S'il invite un conférencier souverainiste, le bon prof verra à aussi inviter un fédéraliste pour que ses élèves puissent juger des arguments.
Mais, tout de même, peut-on sérieusement nous demander de financer la réédition du matériel fédéral déjà envoyé gratuitement dans les écoles pour avoir l'air objectif ? Nous nous sommes contentés d'indiquer aux enseignants où trouver ce matériel. Dans notre cas, nous n'avons aucun financement pour éditer du matériel luxueux. Les gens doivent payer 10 $ pour acheter le cahier.
Pour le reste, nous faisons confiance aux enseignants, car nous savons qu'ils ne fonctionneront pas en utilisant ce cahier comme un catéchisme. Il est au contraire conçu à l'envers d'un catéchisme. C'est un matériel complémentaire bourré d'informations originales, qui sera traité comme tel par les enseignants.
Gérald Larose
_ Conseil de la souveraineté du Québec
Colette Lebel
_ Conseil de la souveraineté du Québec
Robert Cadotte
_ Conseil de la souveraineté du Québec
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