OTTAWA - A-t-on oublié la trousse pédagogique destinée aux petits Canadiens de Sheila Copps ?
Il y a trois semaines, l'ancienne ministre Sheila Copps dénonçait dans nos pages [«la propagande soviétique»->1028] que constitue, selon elle, le livre offert aux écoles par le Conseil de la souveraineté. Pourtant, il y a neuf ans à peine, Mme Copps lançait sa propre «trousse pédagogique» destinée aux petits Canadiens âgés de «quatre ans et plus» !
Voilà qu'un directeur d'école, par l'entremise d'un député, a fait parvenir au Journal un exemplaire de la trousse Haut en couleur lancée à grands frais en 1997 par l'ancienne ministre fédérale du Patrimoine.
«Nos enfants doivent pouvoir ressentir eux aussi cette joie que nous procure à tous notre identité canadienne», affirmait Mme Copps dans son communiqué de presse du 17 février 1997.
Nous étions à ce moment à la belle époque des commandites. Pas surprenant que la trousse, payée par les fonds publics et destinée aux 16 500 écoles du pays, ait nécessité le concours de six maisons de production, dix organismes, 12 ministères et plus d'une quarantaine de spécialistes. À Ottawa, on ne fait jamais dans la dentelle.
Présentée dans un élégant boîtier, la trousse comportait un guide de l'enseignant, un disque compact, une bande vidéo, une cassette, un cahier pour les élèves, une centaine de drapeaux autocollants, et un message de l'ancien premier ministre Jean Chrétien.
Un «drapeau vivant»
Dans son communiqué, Mme Copps -- dont on connaît un légitime penchant pour les drapeaux -- précisait que chaque école avait «droit» d'en recevoir deux : l'un «à déployer en public» et l'autre «pour les activités en classe».
Entre autres activités pédagogiques, Mme Copps suggérait d'ailleurs de confectionner un drapeau avec de véritables feuilles d'érable rouges et un pochoir.
Elle incitait aussi les enfants de «quatre à sept ans» à porter des vêtements aux couleurs du Canada qui sont aussi celles du Parti libéral. «Encouragez-les à porter autant de rouge et de blanc qu'ils le peuvent», conseillait-elle aux enseignants.
Elle suggérait également de fabriquer «un drapeau vivant» en «demandant à la moitié des élèves et des professeurs de porter des chemises blanches et à l'autre moité de porter des chemises rouges».
Mme Copps invitait enfin les élèves à fabriquer «une famille de castors en plasticine». Il faut dire que que le valeureux animal, qui orne les pièces de cinq cents, est devenu le symbole officiel du Canada le 24 mars 1975. «Comme le castor, ensemble on ira loin», précise son manuel.
La «pizza-drapeau»
Mais la palme d'or des activités créatrices pour les «12 ans et plus» semble être la «pizza-drapeau» dont la recette est ici reproduite en encadré.
Bien avant l'ascension fulgurante des Tim Hortons, la ministre du Patrimoine n'en avait que pour cet autre «sushi» de la fine gastronomie canadienne.
À moins, peut-être, que le mozzarella ne lui soit apparu à l'époque comme un ingrédient miracle pour cimenter l'unité nationale chez la génération pubère éprise de «junk food». Qui sait ?
«Quelle que soit l'importance de toutes ces choses, ce ne sont pas les bonne paroles mais la pratique qui permet de les apprendre», assurait à l'époque la ministre pédagogue.
On a beau dire. Avec les cravates et les balles de golf, les libéraux ont toujours su démontrer un raffinement certain dans leur quête d'élégance.
Certains diront que la souveraineté est un projet politique alors que le Canada est un pays dans les faits. Et qu'il ne s'agirait donc pas de propagande dans le cas du fédéral.
Chose sûre, à vouloir enrôler dans les croisades politiques les enfants à peine sortis des couches, on discrédite la cause qu'on prétend si bien servir.
P.S. S'il vous arrive de rencontrer Mme Copps, pourriez-vous la prévenir qu'elle a oublié son parapluie géant dans le bureau du Journal à Ottawa. Ce ne peut être que le sien. Il est d'un rouge et d'un blanc éclatants.
Ce qu'il a dit ...
«Notre position se situe entre celle de M. Mulroney qui voulait tout changer et qui n'a pas réussi et celles de MM. Chrétien et Martin qui ne voulaient rien changer du tout.»
- Stephen Harper lors de sa visite cette semaine a Montréal.
La recette de Mme Copps
«Utilisez du fromage blanc, des oignons et des champignons pour les éléments blancs et du pepperoni, des poivrons rouges et des tomates pour les éléments rouges.»
«Achetez des croûtes de pizza, des assiettes recyclables et les autres éléments nécessaires.»
«Demandez aux élèves de calculer le prix auquel ils doivent vendre les pizzas pour couvrir leurs coûts ou réaliser un profit qu'ils donneront à une bonne oeuvre locale.»
Source: Haut en couleur, Trousse pédagogique pour les écoles canadiennes, Guide de l'enseignant, Patrimoine Canada, 1997, page 44.
lsoumis@journalmtl.com
Trousse pédagogique
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