J’ai 73 ans, relativement en bonne santé, retraité de l’enseignement, marié et père de deux grandes filles et grand-père d’une petite-fille. Considérant mon âge « vénérable », je fais donc partie des personnes dites « vulnérables » de la société au coronavirus.
Depuis le début de la pandémie, soit depuis la mi-mars, nous, les personnes âgées de plus de 70 ans, avons immédiatement été placées « sous haute surveillance », Des mesures strictes nous ont été imposées comme si l’État avait pris sur lui de nous « protéger » contre le virus. « Évitez les sorties qui ne sont pas nécessaires… Restez à la maison… Ne vous approchez pas de vos enfants et petits-enfants à moins de deux mètres… »
Puis, petit à petit, la vague de décès s’est mise à déferler sur le Québec, particulièrement dans les résidences pour personnes âgées. Plus le temps passait, plus le premier ministre Legault montrait des signes d’inquiétude eu égard au nombre de décès impliquant des personnes âgées. Les premières données statistiques révélaient que les personnes âgées de plus de 70 ans représentaient la majorité des cas de décès des suites de la COVID-19.
Ces chiffres, abondamment diffusés dans les médias, ont contribué, selon moi, à une forme de stigmatisation des aînés, qui déjà, selon les recherches, sont généralement associés à la fin de la vie, au déclin, à la fragilité et à la vulnérabilité. À mon sens, l’insistance sur un discours orienté sur l’âge est devenue une source d’inquiétude au fur et à mesure que la crise prenait de l’ampleur, notamment sur la valeur que l’on accorde à la vie des aînés et sur la solidarité intergénérationnelle qui, en passant, semble beaucoup moins présente lorsque nous sommes sur la ligne de front. À preuve le fait que la couverture médiatique de la pandémie a beaucoup porté sur les quelques rares victimes du virus relativement jeunes, racontant leur histoire, leur vie, alors que les aînés victimes de la COVID-19, sont présentées de façon impersonnelle et anonyme, avouons-le, comme de simples statistiques.
Tirer des leçons de la pandémie
À mon avis, une couverture plus personnalisée des victimes âgées atteintes par le virus, et surtout de celles qui y survivent, enverrait un formidable message d’espoir et de valorisation de la place et du rôle des aînés dans notre société québécoise. En réalité, la pandémie pourrait nous permettre de développer des politiques publiques qui favorisent davantage notre inclusion sociale et combattent une forme d’âgisme humiliant.
Enfin, je suis d’avis qu’il faut nous procurer un espace pour nous manifester, pour nous faire entendre avant, pendant et après une situation de crise… Or ironiquement, si nous sommes les victimes les plus nombreuses de la COVID-19, nous sommes aussi, malheureusement, les plus absents de la sphère médiatique.
Henri Marineau, Québec
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