ÉCONOMIE

Québec pompe de nouveau des millions pour soutenir la C Series

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Bombardier chouchouté par la CAQ


Même si son investissement initial de 1,3 milliard $ ne vaut plus un cent, Québec va pomper de nouveau des millions de dollars des contribuables pour soutenir l’ex-C Series, a appris Le Journal. 



Selon des sources consultées, Investissement Québec mettra plus de 200 millions $ dans la société en commandites Airbus Canada, qui conçoit le A220, anciennement la C Series de Bombardier. 


Lors des derniers jours, le ministre de l’Économie, de l’Innovation et des Sciences, Pierre Fitzgibbon, qui plaide pour une aide à Airbus, a présenté le dossier devant ses collègues du Conseil des ministres. Une décision a déjà été prise en faveur du géant aéronautique européen, a-t-on appris. 


Mais, même si la CAQ trône au sommet des sondages, l’opération demeure toutefois risquée politiquement, car les Québécois ont tous en mémoire les millions de dollars engloutis dans l’aventure de la C Series de Bombardier, finalement vendue pour une bouchée de pain à Airbus. 


Fitzgibbon aime cette compagnie


En entrevue, le ministre Fitzgibbon n’a pas confirmé l’information, mais il n’a pas fermé la porte à un investissement et à une annonce éventuelle. 


« Peut-être, mais honnêtement, au moment où on se parle, je ne peux pas dire oui à cela, je ne peux pas dire non non plus. C’est un dossier qui nous intéresse depuis que je suis arrivé en poste », a-t-il affirmé. 


« C’est sûr qu’il y a eu des ratés, des choses qui n’étaient pas adéquates [...], mais néanmoins, c’est une compagnie que j’aime beaucoup et c’est une contribution au Québec qui est très, très importante », a-t-il poursuivi. 








Le ministre Fitzgibbon a-t-il dû convaincre François Legault ? La question est légitime, car le premier ministre ne voulait rien savoir d’une aide à l’ex-C Series voilà quelques mois encore, à tout le moins publiquement. 


« On ne peut pas s’assurer que cette division fera un jour des profits, donc nous n’allons pas réinvestir un cent dans cette division », avait-il souligné lors d’une mêlée de presse juste avant la pandémie. 


M. Legault avait dénoncé plusieurs fois l’ex-gouvernement de Philippe Couillard parce qu’il avait investi dans la C Series et non dans Bombardier. 



Airbus demandait une aide 


Encore aujourd’hui, le programme demeure déficitaire. Airbus tente de modifier et d’accélérer sa chaîne de production afin d’atteindre la rentabilité dans quatre ans, soit en 2026. 


« C’est sûr que c’est une business qui est importante. On parle de pratiquement 2500 emplois ici au Québec, à Mirabel. Le futur est assez reluisant pour l’industrie en général, mais aussi pour l’A220 », a indiqué le ministre Fitzgibbon. 


L’État québécois a encore 25 % dans le programme et Airbus, 75 %. Toutefois, en raison des problèmes de l’ex-C Series et de l’impact de la pandémie sur l’aéronautique, la participation de Québec n’a plus aucune valeur, était-il écrit dans les états financiers du Fonds de développement économique en début d’année. 


Cette annonce à venir n’est toutefois pas complètement étonnante. Selon le registre des lobbyistes consulté par Le Journal, Airbus parle au ministère de l’Économie depuis plusieurs mois et souhaite bénéficier du programme d’aide au secteur aéronautique mis en place par le gouvernement. 


Selon ce qui est écrit, l’entreprise tente d’obtenir des fonds (subventions, prêts ou autres) qui « serviraient pour la réalisation de projets de recherche et développement aux avions A220 », et elle souhaitait « pérenniser ses activités au Québec ». 


Il est de notoriété publique qu’Airbus veut aussi concevoir un nouvel avion, un A220 allongé de 180 passagers qui pourrait concurrencer directement le Boeing 737, le mythique avion de ligne américain. 


Grâce à un nouvel A220, le nombre de clients potentiels pourrait augmenter, mais cela nécessiterait des investissements importants. L’an passé, il y a eu 100 commandes fermes et lettres d’intention pour l’A220. 


Il y a quelques semaines, le transporteur américain Aviation Capital Group avait d’ailleurs annoncé l’achat de 20 appareils A220 assemblés à Mirabel. 


Bientôt plus d’employés ?


Si Airbus est en mesure d’accélérer la cadence, elle pourrait embaucher jusqu’à 500 personnes supplémentaires dans ses installations de Mirabel. Actuellement, quatre appareils sont fabriqués mensuellement dans le nord de Montréal. 


Le but de l’entreprise est d’augmenter la cadence jusqu’à la construction de 10 appareils chaque mois au Québec. 


Le gouvernement a déjà défini le secteur aéronautique comme l’un des plus stratégiques pour le Québec et spécifiquement pour la région de Montréal. 


Contactés par Le Journal, ni Investissement Québec ni Airbus n’ont souhaité commenter le dossier.  









Airbus s’attend à livrer au total 600 appareils lors de son exercice. Pour les neuf premiers mois de l’année, le chiffre d’affaires a progressé de 17 % pour s’établir à 50,5 milliards $ CAN.


La C Series (A220) en quelques dates  


Juillet 2008


Bombardier lance la C Series avec des aides financières de 117 M$ de Québec et de 350 M$ d’Ottawa.


Septembre 2013


L’avion réalise son tout premier vol à Mirabel.


Octobre 2015


Le gouvernement libéral de Philippe Couillard annonce un investissement de 1,3 G$ dans la C Series, donnant une bouffée d’air frais à Bombardier, qui frôlait la faillite.


Juillet 2016


La C Series entre en service commercial avec un vol de Swiss reliant Zurich à Paris.


Octobre 2016


Ottawa annonce une aide de 373 M$ pour Bombardier, dont 124 M$ pour la C Series.


Octobre 2017


Bombardier et Québec annoncent qu’ils cèdent à Airbus le contrôle de la C Series pour 1 $. Le géant européen rebaptisera le programme A220.


Septembre 2021


Les comptables du gouvernement estiment que le placement de 1,3 G$ dans le programme n’a plus aucune valeur.


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