Voilà que les savants Claude Montmarquette et Luc Godbout suggèrent au gouvernement de privatiser en partie Hydro-Québec. Ils pensent que 10% des actions serait suffisant, du moins au début.

Voyons voir. Les profits nets d’Hydro-Québec ont été de 1360 millions de dollars en 2013. Pour 10% des parts, les actions pourraient être vendues pour ce qu’elles rapporteraient sur dix ans, soit environ 1360 millions – hypothèse très conservatrice. (Montmarquette, mauvais négociateur, parle plutôt de brader les actions à quelques centaines de millions).

Un mauvais calcul

Sauf que ces actions devront rapporter 10% des profits d’Hydro-Québec. Chaque année, par la suite, le gouvernement du Québec empochera environ 136 millions de dollars de moins. Au bout d’environ 10 ans, le gouvernement commencera à perdre de l’argent. Pire, comme les taux d’intérêts sont extrêmement bas, probablement pour des années encore, vendre des actions d’Hydro surviendrait au pire moment. S’il faut absolument vendre, mieux vaut le faire au moment où emprunter est très coûteux.

Des fuites de capitaux

Mais si ce n’était que cela. L’argent versé au gouvernement du Québec par Hydro se retrouve en entier dans les coffres du gouvernement. Cet argent demeure au Québec. Vendre des actions d’Hydro implique que des actionnaires étrangers recevront de l’argent. C’est une fuite de capitaux.

De fausses prétentions

Montmarquette et Godbout prétendent qu’Hydro est mal gérée. Encore faut-il qu’ils en fassent la preuve. Or, cette preuve n’existe pas. La seule logique qui motive les deux bonhommes est le préjugé que les entreprises privées sont mieux gérées que les entreprises publiques. Faux. La crise économique de 2008 est les faillites techniques de compagnies automobiles américaines ou de banques sont la preuve de la fausseté de ce préjugé.

Et ensuite?

Il y a pire. Vendre des actions d’Hydro-Québec au privé, c’est soumettre tôt ou tard les tarifs et les services d’Hydro-Québec à la logique des requins de la finance. C’est cette logique qui fait que les passagers des compagnies d’aviation sont traités comme du bétail. C’est cette logique qui fait que pour assouvir la soif de profit intarissable des actionnaires, des compagnies n’hésitent pas à sacrifier le service à la clientèle, à délocaliser les emplois, à couper dans la recherche, etc. Toutes ces politiques sont à long terme mortelles pour les entreprises. Elles le seraient aussi pour Hydro-Québec.

Allons plus loin, une fois que l’on aura commencé à privatiser Hydro-Québec, qui dit que l’on va s’arrêter en si bon chemin? En réalité, c’est ainsi que bien des gouvernement procèdent pour faire avaler au gens une décision largement impopulaire. Qui nous dit qu’au bout de 20 ans, Hydro ne serait pas finalement totalement privatisée et achetée par des intérêts étrangers? On pourra dire adieu à beaucoup de contrats pour les entreprises d’ici, adieu à un puissant outils de développement régional. Nous aurons tué la poule aux œufs d’or.

Il y a bien d’autres façons de faire augmenter les recettes du gouvernement et de réduire le déficit. Vendre un actif en santé et qui rapporte est particulièrement stupide et dangereux.