Rencontre autochtone

Présences essentielles

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Crise <i>canadian</i>

Il a beaucoup été question d’engagements dans les heures qui ont précédé la rencontre, vendredi, entre des représentants de l’Assemblée des Premières Nations et le gouvernement conservateur. Mais l’engagement fondamental, c’était encore que le premier ministre y soit. Pour de bon. Ce fut finalement, et heureusement, le cas.
Il n’y a pas de mal à changer d’avis et à accepter des rendez-vous qu’on a un jour refusés. Prenons comme exemple le sommet de Kelowna, que nous ont si souvent rappelé ces jours-ci les leaders autochtones.
Tenu en novembre 2005 à l’instigation de Paul Martin, alors premier ministre libéral, il avait réuni le fédéral, les premiers ministres des provinces et les Premières Nations. Pourtant, à la toute veille de cette rencontre historique, l’Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador (APNQL) avait annoncé qu’elle n’y participerait pas. Tel qu’expliqué par le chef Ghislain Picard, l’APNQL n’avait que du scepticisme à opposer à la question suivante : une fois le sommet terminé, « quand les beaux discours auront été prononcés et que toutes les photos de circonstance auront été prises, la population des Premières Nations y trouvera-t-elle son compte ? »
Sur l’analyse, c’est M. Picard qui a eu raison. L’accord de Kelowna, qui prévoyait un investissement de 5,1 milliards en faveur des autochtones, n’a strictement rien donné puisque des élections fédérales ont immédiatement suivi, que les conservateurs ont été élus et que Stephen Harper a aussitôt mis de côté cette entente, à laquelle il n’avait jamais cru.
Pourtant, il reste quelque chose de Kelowna : une référence à laquelle se raccrocher des années plus tard. Non, la politique de la chaise vide n’est pas toujours la meilleure. C’est peut-être fort de cette expérience que M. Picard a décidé de participer vendredi à la rencontre avec le gouvernement conservateur. Autant, comme il l’a dit lui-même, profiter de l’occasion qui se présente.
On comprendra que des chefs aient été déchirés quant à leur participation, par crainte d’être récupérés ou de perdre leur temps. Mais réunion il devait y avoir, précisément parce que les manifestations se poursuivaient et que la chef Theresa Spence persistait dans sa grève de la faim. Pour débloquer la situation, il devenait essentiel de garder contact avec le gouvernement fédéral, qui tient quasiment toutes les ficelles du dossier autochtone.
Stephen Harper lui-même a mis du temps à comprendre ce principe élémentaire, mais il a fini par retraiter, et deux fois plutôt qu’une. D’abord en acceptant la tenue même de la réunion de vendredi (même s’il a refusé de la relier à la grève de la faim de Mme Spence). Ensuite parce qu’une fois la rencontre commencée, il est devenu évident qu’il ne pouvait pas, tel qu’il l’avait prévu, se contenter d’être présent seulement en début et en fin de séance de travail. Il y a des limites à si peu considérer des chefs qui ont derrière eux des peuples en colère.
De toute manière, nous n’avons même pas le choix de converser ou pas avec les autochtones. Historiquement, légalement, socialement, nous y sommes tenus. Que cela plaise ou non aux gouvernements, fédéral comme provinciaux, les jugements s’empilent qui protègent les droits ancestraux et prévoient que les autochtones soient consultés. Quant aux problèmes sociaux, ils sont tels dans les communautés qu’il est simplement indécent de ne pas y répondre. Prendre prétexte de malversations, réelles, qui sont le fait de certains chefs, ne constitue pas une raison pour l’inaction.
Vendredi, la rencontre a été plus longue que prévu. Nous reviendrons sur ses conclusions. Mais même les partisans du boycottage doivent admettre que chaque minute de plus était en soi une victoire au crédit de cet hiver rouge.


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