Le nom Trudeau n'a peut-être plus la magie d'antan, mais il en avait encore assez, hier après-midi, pour donner une victoire honorable sans être glorieuse à Justin, le fils de l'ancien premier ministre, qui sollicitait l'investiture libérale dans la circonscription de Papineau, une forteresse libérale passée au Bloc québécois en janvier 2006.
Pour ces immigrants de 50 ou 60 ans - ils formaient l'essentiel des votants, hier - qui sont arrivés pendant les années Trudeau, ce nom était suffisant pour venir passer tout un après-midi de congé dans un gymnase d'école pour donner leur appui à son fils. "On lui doit bien cela", nous auront dit plus d'une personne présente.
Justin Trudeau l'a donc emporté au premier tour de scrutin, avec 54 % des voix, contre deux représentants des plus vieilles communautés culturelles - un éditeur d'origine italienne et une conseillère municipale d'origine grecque. Comme quoi, même dans les communautés culturelles, les lieux de pouvoir ont changé...
Mais cette victoire était aussi un signe des défis qui attendent Justin Trudeau. Il y avait des représentants d'à peu près toutes les communautés culturelles dans cette salle. Sauf peut-être des francophones. M. Trudeau l'a bien compris, lui qui a prononcé l'essentiel de son discours en anglais, sans doute question d'être bien compris et efficace.
Reste qu'avec 1266 votants à l'assemblée d'investiture, ce devait bien être le plus gros rassemblement de libéraux fédéraux au Québec - si on fait exception du congrès au leadership de décembre dernier - des cinq dernières années. Chose certaine, cela faisait un gros contraste avec la dernière assemblée des libéraux de Papineau, dans les jours qui ont précédé l'élection fédérale de janvier 2006, quand ils étaient tout juste quelques dizaines à venir accueillir le premier ministre Paul Martin.
Ça, c'est la version du verre à moitié plein. Le verre à moitié vide, ce serait qu'après une campagne pour la nomination contestée et médiatisée, il ne sera venu qu'un modeste tiers des membres en règles de l'Association pour voter, hier, soit 1266 votants sur 3444 membres.
Pour Stéphane Dion, la victoire de Justin Trudeau est à la fois un soulagement et un problème. Un soulagement parce que dans le reste du pays, où le nom Trudeau est encore synonyme de "libéral", on n'aurait pas compris que le chef n'ait pas levé le petit doigt pour donner la circonscription de son choix à une recrue aussi prestigieuse. Avec tous les ennuis que connaît M. Dion ces temps-ci, il n'avait vraiment pas besoin de devoir expliquer ça.
Mais M. Dion sait bien que plusieurs de ses députés québécois - qui brillaient tous, sauf un, par leur absence hier après-midi - ne croient pas que Justin Trudeau soit le meilleur message à envoyer pour ramener les francophones vers le Parti libéral du Canada. Ses positions, en particulier contre la reconnaissance du Québec comme nation, risquent d'être plutôt mal reçues.
En particulier, il y a un danger bien réel que la combinaison des souvenirs associés au nom Trudeau et le fait que Stéphane Dion soit chef du PLC n'envoie les fédéralistes francophones vers les conservateurs, qui essaient très fort de se présenter comme plus ouverts au nationalisme québécois.
Mais, en attendant, le nouveau candidat libéral devra trouver le moyen de se faire non pas un nom, mais un prénom.
Dans son bref discours aux militants, M. Trudeau a surtout parlé de... son papa. Il a rappelé qu'il y avait une petite partie de Park Extention, aujourd'hui dans Papineau, qui faisait partie de Mont-Royal en 1965 quand son père y fut élu pour la première fois.
Il a rappelé que tous les Canadiens sont "les enfants de la Charte des droits" ce qui le rend encore plus fier de cette réalisation de son père.
Et Justin Trudeau, lui ? Il dit vouloir "que tous les Canadiens réalisent leurs rêves". Vaste programme...
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