Bien que je n’ai aucune compétence en éducation, à part avoir accompagné mes 2 filles dans leur cheminement académique jusqu’à l’obtention de leurs diplômes universitaires et mon expérience personnelle du temps ou j’étais étudiante, je souhaite communiquer ma vision d’un système d’éducation qui réussirait à former les jeunes et qui les préparerait à jouer un rôle positif dans la société à la fin de leur parcours scolaire, c’est-à-dire après l’obtention d’un diplôme reconnu qu’il soit professionnel, technique ou universitaire.
Tous s’entendent pour dire que savoir lire, écrire, compter et apprendre à apprendre sont les compétences de base incontournables, que la disparité des chances de réussite dépend du milieu socio-économique d’origine, que la bureaucratisation du système détourne l’école de sa mission première, que le nombre d’élèves par classe est beaucoup trop important, que le syndicat des enseignants maintient une certaine médiocrité du corps professoral pour protéger les moins compétents parmi eux, que l’école ne doit pas être une usine à former des travailleurs anonymes pour les besoins de l’économie.
À tous les niveaux cependant, il semble que les établissements aient perdu de vue la mission de l’éducation. Qu’est ce que c’est que l’éducation? Normand Baillargeon conçoit l’éducation comme étant l’émancipation individuelle par l’acquisition de savoir (p.47) du livre De quoi le Québec a-t-il besoin en éducation? Pour ma part, j’ajoute que l’école doit préparer les jeunes à intégrer la société et à y jouer un rôle valorisant pour eux-mêmes et utile aux autres, et de s’épanouir selon leurs capacités et leurs intérêts propres. Si la formation du primaire et du secondaire permet aux élèves d’acquérir les notions de base, si elle met en valeur les talents de chacun et leur permet de trouver comment ils peuvent être utiles aux autres, si elle développe les attitudes et les aptitudes sociales pour assurer l’intégration sociale et professionnelle, je ne crains pas pour la persévérance aux niveaux supérieurs.
Les talents de chacun sont des plus variés, du manuel à l’intellectuel. Ce qui implique d’emblée que les rôles et les responsabilités de chacun seront différents tout au long de leur vie. L’école doit reconnaître les aptitudes de chacun pour fonder les apprentissages au coeur même de l’estime personnelle que chacun se doit à soi-même. L’école doit être un lieu de l’être avant d’être un lieu de savoir, spécialement dans les milieux défavorisés. Si l’école écarte l’être des apprentissages, l’élève devient imperméable au savoir. Comment une personne blessée peut-elle apprendre?
En 2013, le principal défi du système d’éducation du Québec est de fournir à chaque élève ce dont il a besoin pour devenir un citoyen épanoui et responsable.
RÉTABLISSEMENT DE L'ÉGALITÉ DES CHANCES
La disparité des chances de réussite dépend du milieu socio-économique d’origine. Le décrochage scolaire touche particulièrement les jeunes que le sort à défavoriser dès le départ. L’éclatement du noyau familial, l’immigration tous azimuts et la pauvreté des enfants compliquent et alourdissent la tâche des enseignants. Les difficultés d’intégration à la société sont peut-être aussi complexes pour les enfants immigrants que pour ceux issus d’une famille dysfonctionnelle. En tout cas, ce dont tous les enfants ont le plus besoin pour parvenir à la maturité affective est d’un lien significatif qui perdure dans le temps. Si la famille naturelle n’a pas été en mesure d’offrir ce lien permanent et significatif, doit on d’abandonner ces enfants dans la pauvreté, l’inadaptation sociale et laisser la DPJ les prendre en charge?
De toute évidence, l’école ne parviendra jamais à combler les lacunes familiales et à soigner les blessures affectives des enfants et ce n’est pas son rôle. Alors comment rétablir les chances de réussites aux élèves défavorisés? Comment créer ou recréer un lien significatif avec une personne, alors que les enseignants changent au moins à chaque année du primaire, que les orthopédagogues et tous les professionnels de soutien à la réussite scolaire ont des exigences et des objectifs précis qui sont extérieurs aux élèves en maque d’amour et de soins parentaux?
Je propose que les retraités deviennent des mentors auprès des enfants souffrants, qu’ils assurent un lien continu tant et aussi longtemps que l’enfant mentoré en a besoin, si possible. Pour être significatif, ce lien devrait devrait se construire au fil de rencontres hebdomadaires et se concentrer sur les besoins affectifs de l’enfant et sur la découverte de ses aptitudes et intérêts personnels, à travers la réalisation d’un grand livre des découvertes témoignant de son évolution. Ce grand livre des découvertes serait au centre de la rencontre de l’enfant et du sage. Dans son livre, l’enfant serait inviter à coller des images (photographies, étiquettes de produit, fleurs ou feuilles séchées, et cetera) qui le touchent. Progressivement, il pourrait les commenter à mesure qu’il développe l’habileté d’écrire. Le rôle du sage serait de s’intéresser aux images et aux propos de l’enfant, à poser des questions, à donner des pistes pour aller plus loin, à récompenser modérément pour appuyer sa recherche. À travers ces rencontres, le regard bienveillant du sage et ses encouragements répétés permettraient d’établir la confiance à la base d’un lien significatif. Au fil du temps, l’enfant intégrerait un modèle d’adulte différent du profil de ses parents. Ce lien élargirait le champ de ses possibilités et augmenterait ces chances de réussite scolaire, sociale et professionnelle. Je suis un peu naive, mais je crois profondément qu'un grand livre qui témoigne de le la vie de l’enfant évoluant sous le regard tendre d’un sage constitue ma première solution pour endiguer le décrochage scolaire et le rétablissement des chances.
Je préconise donc que les sages de notre société agissent auprès des enfants blessés comme des mentors tout au long de leur parcours primaire et secondaire et plus encore plus longtemps si désiré, en soutien aux enseignants, à l’école et aux parents perturbés. Alors que l’enfant écrira ou illustrera les années de sa vie scolaire dans son grand livre des découvertes, il pourra mesurer rétroactivement son évolution, ses intérêts, son devenir et sa capacité à se penser lui-même.
L'ÉCOLE UN LIEU DE L'ÊTRE AVANT D'ÊTRE UN LIEU DE SAVOIR
Peu importe les origines socio-économiques des enfants, chacun doit avoir le sentiment d’existence de son être, différent et unique. Et avant toutes autres matières scolaires, la philosophie pour enfant me semble la matière académique primordiale. La philosophie pour enfant favorise la conscience de soi, la conscience des différentes entre soi-même et les autres. La philosophie pour enfant facilite l’interaction avec les autres, elle permet de se prendre soi-même pour l’objet de sa propre recherche humaine. À travers la philosophie pour enfant, les élèves apprennent à penser, à se penser, à discriminer des valeurs, à modifier ou renforcer des comportements. La philosophie pour enfant est la meilleure formation pour préparer à la citoyenneté.
PRÉPARATION À LA VIE COMPLEXE ET À LA LONGÉVITÉ
Si l’école doit être utilitaire, que l’utilitarisme concerne les enjeux relatifs à la personne. L’école doit préparer les élèves à faire des choix judicieux et à interagir dans une société complexe et multiple. Tout au long de la formation de base, les élèves doivent apprendre à prendre soin de leur santé par de bonnes habitudes de vie (sommeil, alimentation, activités physiques, bénévolat).
Ils doivent aussi apprendre à gérer l’argent qui est au centre du fonctionnement de notre monde : économiser des sous, faire un budget, remplir leur déclaration de revenu, faire un placement, acheter un bien, conserver les factures et les garanties, planifier des projets à moyen terme qui impliquent une dépense d’argent.
UN DIPLÔME DE MÉTIER MANUEL POUR TOUS
De tout temps, il y a eu et il y aura toujours des manuels intéressés par les savoir-faire concrets, des techniciens habiles à traiter des données et appliquer des procédures, et des intellectuels qui jonglent avec les concepts abstraits. Considérant que le médecin n’est pas plus utile à la société que l’éboueur, renier les talents manuels dévalorise les métiers manuels indispensables. Un mauvais avocat ou un piètre enseignant sont moins utiles à la société qu’un bon mécanicien ou qu’un plombier compétent. Dans tous les cas, le travail est l’aboutissement de la formation académique. Peu importe le diplôme, il reconnaît à son détenteur un savoir qui lui assure un statut social et normalement un travail respectable.
En sortant de l’école secondaire, selon moi, tous les élèves devraient avoir en poche en plus du diplôme d’études secondaires qui donnent accès aux niveaux supérieurs et une carte de compétence dans un métier manuel. Premièrement pour pouvoir occuper un emploi d’été ou temps partiel bien rémunéré pendant les études post-secondaires et deuxièmement pour avoir un métier de secours en période de changement professionnel, ce qui risque d’arrivée plusieurs fois au cours de la vie professionnelle.
Si le système d’éducation réussit à doter chaque élève de la capacité de lire couramment, d’écrire sans fautes d’orthographe, de s’exprimer oralement dans une langue agréable en français et en anglais, de compter et de gérer les sous et les dollars, et les outillaient à faire des choix éclairés, les habilitaient à participer à la citoyenneté et permettaient de les intégrer dignement sur le marché sur travail, je considérerais que l’école n’a pas encore rempli pleinement sa mission parce qu’il faut encore faire naître l’amour du pays dans le coeur de tous et chacun.
BEAUCOUP D'HISTOIRE POUR L'AMOUR DU PAYS
Mais d'abord et avant tout, l'école doit enseigner l'amour du pays, doit stimuler la fierté nationale, faire connaître les valeurs en usage sur notre territoire. L'histoire doit accompagner les élèves de la première année jusqu'au secondaire 5. L'histoire doit se revivre dans les classes par petit morceaux pour être bien assimilées et bien comprise. Je propose de fragmenter le récit de notre histoire collective et d'en répartir les époques à travers les 12 années de formation de base. Je propose aussi que le cours d'histoire soit nécessairement jumelé avec les cours d'art (plastique, musique, théâtre, sculpture, art oratoire, etc) parce que la meilleure manière d'apprendre consiste à s'approprier la matière. Individuellement ou par groupe, à travers le médium de leur choix devraient produire une création témoignant de leur connaissance et de leur perception. L'apprentissage par la pratique artistique permettrait non seulement l'appropriation des événements historiques, mais leur intégration à l'identité profonde des jeunes. En plus, l'expression artistique et la créativité est une caractéristique prégnante de l'identité québécoise. La production artistique des uns mise au profit des autres pour la valorisation de l’histoire et aussi pour l’estime personnelle de chacun. L'apprentissage de quelques chants patriotiques enseignés à chaque grade scolaire constituerait aussi un ciment social perceptible insufflant les valeurs partagées et favoriserait l’émergence d’une mémoire collective unifiée du passé.
Le cours d'histoire de n'est pas une période intensive de bourrage de crânes, l'histoire c'est la connaissance de qui nous sommes à travers le temps, c'est la connaissance de notre héritage particulier qui s'apprivoisent au fil du temps et de façon continue. L'histoire doit faire naître l'amour du pays.
MATHÉMATIQUES ABSTRAITES, CHIMIE, PHYSIQUE
L’apprentissage de ses matières est secondaire en regard de la nécessité de survivre et de s’épanouir. La détérioration rapide de l’environnement et l’augmentation vertigineuse de la population imposent que chaque citoyen en mesure de cultiver son jardin potager. Connaître les plantes et la manière de les faire croître est de première nécessité. L’agriculture et par son biais, la biologie, doit être intégrée de la formation des petits Québécois. Il sera toujours temps d’apprendre les éléments de physique et de chimie après une vraie formation de base.
L’ÉCOLE UNE USINE À TRAVAILLEURS?
Que l’école ne soit pas une usine à former des travailleurs anonymes pour les besoins de l’économie fait l’unanimité parmi les signataires du collectif De quoi le Québec a-t-il besoin en éducation? Je partage ce point de vue, mais une nuance s’impose.
Il appartient au gouvernement de montrer les secteurs d’activité économique porteuse d’avenir et d’enrichissement des travailleurs en fonction de la géographie, des richesses naturelles et des autres particularités du territoire.
Prenons un exemple : Jean Charest a lancé le Plan Nord après dix ans de blabla. En effet, dix années ont été nécessaires pour harmoniser la codification des lots qui constituent le territoire québécois. Auparavant, il existait plusieurs système de codification pour délimiter les parcelles : religieuse, municipale et gouvernementale. Pour permettre une exploitation organisée des sous-sols québécois par les minières, il fallait unifier les codes.
Comment peut on expliquer qu’au cours de ces dix années d’harmonisation, aucun établissement scolaire n’est proposé des formations en lien avec les carrières lucratives du secteur minier? Nous comprenons que le Plan Nord a été ficelé pour déposséder le peuple de ses richesses naturelles au profit de multinationales. Mais il aurait pu en être autrement. Et s’il en avait été autrement, et que le gouvernement avait fait connaître l’estimation des besoins en ressources humaines pour appuyer le développement du Plan Nord, comment aurions-nous réagi? Aurions-nous dénoncé la vision utilitariste de l’État en matière d’éducation? Aurions-nous prêté attention et analyser comment notre système d’éducation allait pouvoir répondre aux nouveaux besoins? Aurions fait la sourde oreille parce que les mines, c’est sale et cela ne nous concerne pas?
Rien de ce qui est humain n’est simple! Mais tous s’entendent sur l’urgence de redresser le système d’éducation afin de permettre à nos enfants de trouver leur place dans la société et d’y jouer un rôle dont il seront fiers.
Le rapport Parent date des années quarante et même si plusieurs propositions sont encore d’actualité, le contexte social a changé radicalement. Il est grand temps de se questionner la mission de l’éducation de base, de redéfinir les objectifs de l'éducation nationale, d'adapter les méthodes d’enseignement et d'enseigner des matières utiles à la survie dans un monde plus en plus abstrait et dans une société de moins en moins solidaire.
L'amour du pays commence par l'enseignement de l'histoire
Laissez un commentaire Votre adresse courriel ne sera pas publiée.
Veuillez vous connecter afin de laisser un commentaire.
2 commentaires
Archives de Vigile Répondre
5 novembre 2013Les maths dîtes abstraites, c'est les maths qui commencent à être intéressantes. Faire des vrais maths abstraites, c'est l'algèbre multilinéaire ou les torseurs, et ce n'est jamais fait avant l'université.
La chimie, c'est très concret, c'est l'étude des constituants de notre univers.
La physique, c'est l'étude de tout.
Sans sciences de base, ça fait des individus lents, vulnérables aux informations fallacieuses et ridicules.
Par exemple, les théoriciens du complot à la Richard Gage exploitent la naïveté des gens nuls en science pour vendre des casquettes, t-shirts et autres tasses décoratives.
Archives de Vigile Répondre
3 novembre 2013Ça fait un bout de temps que l'école ne fait que préparer les jeunes à répondre aux besoins du marché.
On n'incite plus les jeunes à la réflexion; les sciences humaines et les lettres sont de plus en plus délaissées puisque le marché est roi.
L'éducation ne vise qu'à la spécialisation de l'individu en rapport avec le Système et avec les besoins du Système en délaissant la culture générale, l'apprentissage de la vie en société et les valeurs humanistes.