En se faisant passer pour le Premier ministre polonais, un duo d'humoristes russes, Vovan et Lexus, a contacté le patron de l'OIAC, qui a soutenu que «n'importe quel pays» avait pu produire l'agent innervant utilisé dans l'attaque de Salisbury.
Les deux humoristes russes Vovan et Lexus, célèbres pour leurs canulars téléphoniques visant des personnalités, affirment avoir piégé Ahmet Uzumcu, directeur général de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC).
Les deux comédiens ont publié le 23 avril sur YouTube une vidéo dans laquelle ils discutent des accusations concernant l'empoisonnement de Sergueï Skripal avec Ahmet Uzumcu, en se faisant passer pour le Premier ministre polonais, Mateusz Morawieck.
Dans la séquence qui dure plus de 22 minutes, Ahmet Uzumcu rappelle au faux dirigeant polonais que l'OIAC a été mandatée pour déterminer la substance utilisée contre Sergueï Skripal, mais pas le pays où elle a été fabriquée. Toutefois, il assure que «selon [ses] experts, elle peut être produite par n'importe quel Etat». Une remarque qui vient contredire la version défendue plus ou moins ouvertement par la diplomatie britannique, pour qui la substance A-234, que Londres appelle «Novitchok», provient de Russie.
«Donc cela peut-être produit dans n'importe quel pays», insistent les comédiens dans la vidéo, ce à quoi Ahmet Uzumcu répond de nouveau : «En théorie oui.» Selon le responsable de l'OIAC, la substance en question peut être produite «dans n'importe quel pays qui dispose d'une certaine expertise chimique. Le matériel utilisé – comme me l'ont dit nos experts – est accessible». «C'est le problème auquel nous sommes confrontés avec ce produit chimique toxique», précise-t-il.
En mars dernier, le ministre britannique des Affaires étrangères, Boris Johnson, était pourtant catégorique quant à l'origine russe de la substance utilisée dans l'attaque. Le ton britannique avait malgré tout évolué après les conclusions du rapport de l'OIAC, qui affirmait ne pas être en mesure de pouvoir identifier l'origine du produit. Maniant une rhétorique plus subtile, l'ambassadrice du Royaume-Uni auprès des Nations unies avait alors qualifié d'«hautement probable» la responsabilité de la Russie, s'appuyant sur «le contexte» qui accuserait Moscou. Sans se baser sur la substance en question, elle avait estimé que seule la Russie avait «les moyens techniques, l'expérience opérationnelle et un mobile pour s'en prendre aux Skripal».