Dans les pays industrialisés, on se targue de proclamer que la démocratie n’est pas à vendre. Or, rien n’est plus faux, se plaît à répéter Transparency International. Dans le classement de l’ONG, la corrélation entre la corruption et la crise dans les pays les plus fragilisés de la zone euro n’est plus à démontrer. Ailleurs, la collusion entre le monde politique et celui des affaires demeure problématique dans les pays recevant une meilleure note en matière d’intégrité et de transparence. Sur cette toile de fond surgit l’idée d’imaginer où se classerait le Québec s’il était un pays.
Dans la foulée de la commission Charbonneau, le milieu d’affaires montréalais s’est dit particulièrement secoué par toutes ces révélations. S’ajoute à la déconvenue la déchéance de l’un des leurs, ex-dirigeant de la plus grosse firme d’ingénierie au Canada. L’ancien premier ministre Lucien Bouchard le disait vendredi devant la Jeune Chambre de commerce : « On ne pensait pas que c’était aussi grave, aussi systématique. » La culture de la corruption et de la collusion s’est érigée en système sur plus d’une décennie. Elle est devenue structurelle, systémique, provoquant ce que la communauté d’affaires a appelé une sévère « crise de réputation ». Pourtant, dans les ordinateurs de Transparency International, le mot « crise » rime immanquablement avec « corruption ».
Dans son nouveau classement publié mercredi, Transparency en rajoute. L’ONG dénonce le fait que peu a été fait dans les pays malmenés par la crise de la dette en zone euro. « La corruption continue de faire des ravages dans les sociétés partout dans le monde. Chez ceux qui déçoivent figurent les pays de la zone euro les plus affectés par la crise économique et financière », a souligné l’organisation internationale, selon les propos publiés par l’Agence France-Presse. « Dans les pays où la crise sévit le plus, comme l’Italie et la Grèce, la corruption dans le secteur public est un problème majeur. »
Pour les pays recevant une meilleure note, comme l’Allemagne et la France, l’un des principaux problèmes demeure « les rapports entre le monde politique et les affaires ». L’ONG évoque l’existence de groupes d’intérêt, une culture du secret, un faible niveau de régulation et le financement des partis politiques.
En juin dernier, l’ONG s’est intéressé particulièrement à l’Europe. L’organisation établissait une corrélation sans équivoque entre les pays en difficulté de la zone euro et cette trop grande intimité entre les entreprises et les gouvernements favorisant la corruption ou la collusion. Et là où l’on pouvait observer la présence d’un encadrement plus serré des pratiques en matière d’octroi des contrats publics, il ressortait un contrôle inefficace et l’absence de sanctions dans le cas d’irrégularités ou d’un comportement fautif.
En Grèce, malgré toutes ces données officielles dénombrant et identifiant les cas de corruption, seulement 2 % aboutissent à des mesures disciplinaires, déplorait Transparency. En Espagne, à peine 5 % des cas de corruption sont accompagnés de sanctions, pouvait-on lire dans le rapport d’une soixantaine de pages. L’ONG n’a pas été sans souligner également le trop grand nombre de relations et de pratiques jugées légales mais sans pour autant être éthiques. Le parallèle avec ce qui se passe ici est facile à faire.
D’ailleurs… Cette échelle évolue entre une note de 100, pour là où la corruption est la plus faible, et une note de zéro, où la corruption est la plus élevée. Le classement se veut une « perception de corruption » s’appuyant sur des données colligées auprès de 13 organisations internationales. Dans ce jeu de perception, il serait intéressant d’imaginer où le Québec se situerait s’il était un pays. Probablement entre la note de 84 accordée au Canada, qui détient le 9e rang du classement cette année, et celle de 8 accolée aux trois pays se partageant le bas de la liste, à savoir l’Afghanistan, la Corée du Nord et la Somalie.
Le Québec pourrait toutefois se consoler en se comparant. Seulement 12 des 176 pays composant le plus récent classement mondial de Transparency reçoivent une note de 80 ou plus. Et les deux tiers n’obtiennent pas la note de passage, si l’on retient un score de 50 points en guise de référence.
Pour sa part, le Canada peut soupirer. Les travaux de la commission Charbonneau, qui se sont concentrés pour l’instant sur les grandes villes du Québec, ne semblent pas encore lui faire trop ombrage sur la scène internationale. Dans le classement de 2011, il occupait le 10e rang avec une note de 87.
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