Oui, le Canada est une créature politique étrange

Tribune libre - 2007


En réponse à une sortie publique de Mme Nancy Hughes Anthony, présidente
et chef de la direction de l’association des banquiers canadiens qui
soutient qu’il faut en arriver le plus tôt possible au Canada à «une voix
unique pour négocier efficacement avec les Etats-Unis » dans le domaine des
valeurs mobilières»
Au soutien de son plaidoyer, Mme Anthony fait valoir
qu’il est question de libre-échange en matières de valeurs mobilières et
qu’à l’étranger, «on regarde le Canada comme étant une créature très
compliquée». Elle conçoit mal qu’on mette 13 sièges pour parler au nom du
Canada à la table des discussions de libre-échange, en particulier avec les
Etats-Unis.
Je dirais à Mme Anthony que le Canada est effectivement une créature très
compliquée. Afin de rendre cette créature politique plus simple, vous
demandez au Québec de renoncer à sa différence. Puis-je vous dire, Madame,
que vous n’êtes pas très originale. C’est ce que P.E. Trudeau a jadis exigé
de la députation fédérale québécoise lors du rapatriement de la
constitution canadienne. C’est aussi ce que B. Mulroney a exigé de la
députation fédérale québécoise lors de la saga de Meech et de
Charlottetown. Dans ce dernier cas, il fallait lire et entendre les soupirs
de Benoît Bouchard, et en général de tous les autres députés conservateurs
du Québec qui se sont graduellement tus au cours de la campagne
référendaire portant sur les accords de Charlottetown.
Il m’apparaît donc peu étonnant que la principale instance de
représentation des institutions financières, l’ABC, fasse cette sortie
publique au Québec car c’est effectivement ici le seul gouvernement
provincial à s’opposer à cette autorité unique, qui a des raisons
culturelles de le faire. Dans le cas des autres provinces, il s’agit de la
crainte que l’éloignement prive marginalement les entrepreneurs locaux
d’une source importante de financement de leurs activités économiques en
raison de cette perte d’influence sur le marché des valeurs mobilières.
Vous êtes bien désapointante, Madame, en faisant état de la nécessité de
discuter cette question à treize du côté canadien alors que la réalité
politique et culturelle n,imposerait que la présence du Québec en sus de la
participation fédérale. Mais il s’agit encore une fois du Québec qui
devrait exiger un statut particulier, ce qui est hors de question bien
sûr.
Pour une fois que Québec peut se servir utilement de l’argument éculé
qu’on lui sert face à ses revendications traditionnelles, je vous demande,
chère Madame, de respecter l’esprit des Pères de la Confédération et de
boire la tasse qui l’accompagne.
Gilles Laterrière
-- Envoi via le site Vigile.net (http://www.vigile.net/) --


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