La petite histoire dit que lorsque la maquilleuse de la CBC était venue au bureau de Jean Chrétien avant son appel à la nation, le mercredi avant le référendum de 1995, celui-ci avait refusé de se faire poudrer en disant : «Je m'en fous si j'ai l'air vieux...»
C'était le creux de la vague à Ottawa. On en était arrivé pour la première fois à la conclusion que le Oui pourrait l'emporter et que, nulle part dans la fonction publique ou au Bureau du Premier ministre n'avait-on pensé à préparer quelques scénarios de victoire du Oui, au cas où.
Jean Chrétien ne l'avait pas vu venir et il en était dévasté.
À l'époque de M. Chrétien, il était interdit - et vaguement considéré comme une forme de trahison - d'envisager ouvertement une victoire des souverainistes.
Pendant la campagne électorale de 1993, M. Chrétien aimait à citer un pêcheur de Gaspé qui lui aurait dit : «Si vous ne parlez jamais plus de constitution, vous allez être au pouvoir pour le reste de votre vie». Il la répétait même après les élections, alors que Gaspé avait élu un député bloquiste...
Avec le résultat - dont on avait beaucoup reparlé lors de la diffusion du documentaire «Point de rupture» -- que nulle part au gouvernement fédéral n'y avait-il quelque dossier que ce soit sur ce qu'Ottawa pourrait ou devrait faire au lendemain d'un Oui.
Aujourd'hui, on apprend que les hauts fonctionnaires à Ottawa se préparent à la victoire du PQ. Mais j'espère bien! C'est précisément pour cela que l'on paie les hauts fonctionnaires, pour préparer des scénarios pour que le Premier ministre et le gouvernement ne soient jamais pris au dépourvu.
Ce qui est intéressant dans le document que révèle aujourd'hui La Presse, c'est de voir que les fonctionnaires font une analyse assez juste de la situation politique au Québec, soit que la réélection des libéraux de Jean Charest n'est pas impossible, mais qu'elle s'annonce difficile.
Il fut un temps où, à Ottawa, les hauts fonctionnaires ne devaient pas avoir de telles pensées impures et encore moins les coucher par écrit. Avec le résultat que les suites à donner à l'élection de René Lévesque en 1976 et de Jacques Parizeau en 1994 ont été laissées aux seuls conseillers politiques du Premier ministres.
Les conseillers partisans du Premier ministre avaient donc le contrôle de ce dossier et ne pouvaient se fier sur des avis extérieurs comme ceux de la fonction publique, puisque qu'on refusait de lui demander son avis.
Le gouvernement Harper veut avoir des avis de ses fonctionnaires sur une éventuelle victoire d'André Boisclair? On ne devrait pas trop s'en étonner : après tout, c'est pour cela qu'on les paie.
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