Orphelin du «Devoir»

Que devient donc «mon» quotidien québécois?

Tribune libre

.

Les semaines passent...

Et je me vois, au final, singulièrement déçu, de façon générale, par les manières du nouveau directeur du Devoir, monsieur Brian Myles.

Mes appréhensions déjà annoncées en finale d'une précédente intervention publique concernant le cinéaste Claude Jutra semblent, et je le regrette plus que je ne saurais l'expliciter, se confirmer. Ou enfin, s’étoffer. Si je puis dire.

Par ailleurs, on assiste de plus en plus à des textes d'éditorialistes qui à l'occasion participent moins de l'éditorial (réflexion étayée, articulée, objective, réfléchie et, d'abord et avant tout, appuyée sur une information solide) que de l’humeur ou de la banale opinion (politiquement correcte de préférence).

Ce n'est pas systématique, certes. Et je ne veux pas, assurément, assujettir toutes les plumes des lieux à l'unique collimateur de mon modeste Je. Ce serait non seulement injuste, mais profondément malhonnête.

Reste que le "papier" de M. Guy Taillefer déjà cité par la vigilienne Morgane, en complément au texte (bien nommé) de madame Chenonceau, toujours chez Vigile, illustre tout à fait, hélas, ce nouveau phénomène dans ce qui constitue pourtant, à mes yeux, et ce depuis long de temps, l’unique quotidien québécois digne de ce nom.

On notera au surplus, ce qui n’est pas rien dans les circonstances, que M. Taillefer est également responsable, en tandem avec M. Antoine Robitaille, de la précieuse et irremplaçable page Idées du journal.

Bref, un éditorialiste ce n'est pas un blogueur, ni même un chroniqueur. Lequel présentera ses coups de coeur ou, c'est selon, ses hauts-le-coeur. Et ce, même quand ceux-ci se révèlent tout à la fois intelligents et pertinents. Ainsi en est-il, par exemple, et pour ainsi dire en permanence, parmi quelques autres collègues également doués (tels monsieur David et autreS Cornellier), chez monsieur Christian Rioux.

Ou madame Lise Payette…

Concis préliminaire qui me - nous - ramène à ces derniers jours.

* * *

Ainsi -.

«Péladeau baisse le bras», lisions-nous à la une de l’édition de mardi le 3 courant.

Étonnante maladresse ou orientation de l’opinion à la manière Gesca…?

Sans plonger ici dans les méandres de la psychologie de M. Pierre-Karl Péladeau, il apparaît clair pour tous, je crois, sauf erreur, que monsieur l’ex-chef de l’Opposition officielle à l’Assemblée nationale, à la faveur d’un choix cornélien, de toute évidence, a «choisi» - ce sont ses propres termes - ses enfants. Et dont la responsabilité pleinement assumée, à titre de papa, devenait à ses yeux inconciliable avec ses fonctions officielles au sein de la collectivité québécoise.

Alors, question : Que peut bien signifier, stricto sensu, dans les circonstances: «Baisser les bras» ???

Poser la question, n’est-ce pas déjà y répondre ?

Maladresse ou… Reste que l’alternative confine, quoi qu’il en ait, à deux éventualités aussi irrecevables l’une que l’autre.

D'autre part -. Trois jours plus tard, soit dans l’édition de vendredi, le 6, était annoncé sur deux courtes lignes et demie — «Le Devoir met fin à la chronique de madame Lise Payette […]». Et ce, platement et sans autre forme, dans le tout petit coin inférieur droit de la page A9 — le «congé» de notre dame de Staël nationale.

Aucune explication. Ou justification. Comme si madame était soudain devenue un quelconque bibelot (démodé?) à écarter de la table de travail où s'entassent, bien entendu, les dossiers de l’heure à traiter.

Je ne puis présumer des motifs de cette éviction par monsieur Brian Myles. Peut-être même ceux-ci s’avèrent-ils solidement fondés. Allez savoir…

Mais voilà ! Justement. Le lecteur ne le sait pas.

Aussi les scenarii les plus invraisemblables se profilent-ils à son esprit. À vitesse grand V.

Coda -. Monsieur Myles, cette comédie d’errances (faute d’en connaître plus long sur vos intentions explicites - c’est-à-dire réelles, divulguées publiquement ou pas -, veuillez considérer ce vocable comme un euphémisme) qui se poursuit depuis que vous êtes en poste préfigure-t-elle Le Devoir de demain ?

Le cas échéant, je suis au regret de vous annoncer…

Featured 9d70efc13bfcf28a347710d42fbdde90

Jean-Luc Gouin94 articles

  • 113 474

Chambrelan du verbe et indocile citoyen de la Cité (les dossiers de la Francité et de la « Question » nationale du Québec l’occupent – et le préoccupent – tout particulièrement), mais également docteur en philosophie diplômé de l'Université Laval et spécialiste nord-américain du penseur allemand Hegel, JLG a publié ouvrages et maint article portant pour la plupart sur celui-ci.



Hegel. De la Logophonie comme chant du signe, son dernier opus, fruit de trente ans de recherche, a été publié simultanément, en 2018, et aux PUL, à Québec, et chez Hermann à Paris.

 

Textes « citoyens » choisis de Jean-Luc GOUIN ( 1995-2018 )

( parmi quelques centaines, qui hélas ne vieillissent pas )

 

•• Les Bilinguistes. Grands sorciers des langues phagocytaires

•• Débat sur la langue dans le quotidien Le Devoir (Été de 1998)

•• Qui sort, digne ! Franchir le miroir de notre schizophrénie collective

•• Le Franc Pays. Québécois ou Québec coi ? (+ de 20 ans plus tard, rien n’a changé...)

•• Le Lys dans le lisier (Ou pourquoi l’Indépendance du Québec, en quelques mots)

•• Aux larmes citoyens ! (anthropoème en hommage à Gaston Miron)

•• Philippe Couillard : Le Philippe Pétain de notre temps (Lettre à mon premier sous - ministre)

•• Autres espaces de réflexion (Société, Culture, Politique... dont : Ouvrez le Feu ! , Liquider pour argent liquide , Halloween. Plaie ou plaisir de l’enfance ? , Interdit de ne pas fumer ! ...) 

•• De l’humain travesti en divin (modeste contribution au projet d’une Charte de la laïcité)

•• Précis sur la malhonnêteté intellectuelle (aussi nommée mauvaise foi)

•• L’Homme Prométhée (une forme de « CQFD » irrésistible aux textes qui précèdent...?)

 

 





Laissez un commentaire



3 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    6 juin 2016

    Lecteur du Devoir depuis la fin des années 1960 et abonné de longue date, collaborateur du quotidien pendant plusieurs années, j'ai décidé de ne pas renouveler mon abonnement pour plusieurs raisons. Citons-en quelques unes:
    Ligne éditoriale fluctuante, assez floue. Traces d'opportunisme et de frilosité.
    Traitement de l'art, de la littérature en général et de la poésie en particulier, de plus en plus insatisfaisant.
    Censure des commentaires des lecteurs ( j'avais osé qualifier Couillard de lobotomiste-extractiviste !)
    etc., etc.,
    Le Devoir me semble sur une mauvaise trajectoire et j'espère un solide coup de barre......avant de remonter à bord.

  • Jean-Serge Baribeau Répondre

    10 mai 2016

    Grande est aussi ma déception, lorsque, un peu blasé, je lis encore Le Devoir. Ce journal est peut-être en voie de "torchonisation".
    Espérons que ce journal ne finira pas par donner raison à Henri Béraud: «Le journalisme est un métier où l'on passe la moitié de sa vie à parler de ce que l'on ne connaît pas et l'autre moitié à taire ce qu'on sait.»
    JSB

  • Archives de Vigile Répondre

    10 mai 2016

    “La propagande est l’organe exécutif du gouvernement invisible”. • Bernays, Edward
    Mon abonnement au Devoir n'est pas renouvelé et ne le sera seulement lorsqu'il démontra de meilleurs sentiments.