En lisant le portrait de Martin Coiteux concocté par le chroniqueur Vincent Marissal dans La Presse+ du samedi 30 avril 2016 intitulé «Le pittbull de Nelligan», je suis littéralement tombé en bas de ma chaise! J’ai été particulièrement frappé 1) par le manque d’équilibre idéologique flagrant entre les différents commentaires recueillis et 2) par la minceur et le manque de courage intellectuel de son analyse qui m’ont ultimement poussé à me demander si un «portrait» pareil favorise réellement les débats et discussions politiques substantiels et ouverts. Pour un chroniqueur que l’on reconnaît à ses analyses fines ainsi qu’à sa grande capacité à vulgariser et à imager des problématiques et des enjeux complexes, c’est bien dommage!
D’abord, sur le premier point que ce soit André Pratte (éditorialiste fédéraliste et sénateur) qui souligne la solidité, le courage et l’absence de peur de Coiteux, Jacques Dupuis (ancien ministre du PLQ) ainsi qu’un conseiller libéral qui sont particulièrement impressionnés par sa capacité d’apprendre, Sam Hamad et Carlos J. Leitao qui saluent l’excellence de son travail ou Robert Gagné (un ex-collègue) qui relègue au rang de «construction médiatique» le fait que Coiteux soit un idéologue de droite fermé et austère, je ne peux m’empêcher de penser qu’il est évident que le portait sera majoritairement positif si l’on interroge des personnes qui s’inscrivent dans le même champ de pensée que la personne en question. À cet égard, c’est certain que Monsieur Coiteux passera pour vertueux et courageux si le cadre d’analyse des commentateurs est celui du «tout à l’économie» et de la réduction obsessive de l’État dans l’horizon simpliste de l’équilibre budgétaire.
En contrepartie, le chroniqueur cite, il est vrai, Joseph Facal, que l’on sait un peu plus à gauche, qui ne voit pas en quoi monsieur Coiteux est un idéologue! Il aborde aussi le regard syndical sur Martin Coiteux qui est sans surprise diamétralement opposé, entre autres quant à la question d’une loi spéciale qui pointait à l’horizon pendant les négociations et à son option connu pour un État minimaliste. Pour une source syndicale que Vincent Marissal ne nomme pas, Martin Coiteux est «[…] froid, dur et austère autant dans le regard que dans le propos. En tout cas, nous, on n’a pas connu l’homme qui chante du Francis Cabrel le samedi soir.»
Par la suite, au sujet du second point, c’est-à-dire la minceur de l’analyse Marissalienne dans ce dossier précis, il se contente simplement de mettre en lumière l’aisance avec laquelle Martin Coiteux a intégré la «rhétorique» du PLQ et le fait qu’il soit un «bon vivant romantique» pour illustrer (pour reprendre ses mots) qu’«[on] est loin ici de l’image de l’idéologue de droite fermé et austère.» (Section «Il aime à mourir»). Par ailleurs, voulez-vous bien me dire monsieur Marissal en quoi le fait de savoir que Martin Coiteux aime le vin, les voyages et parle plusieurs langues est en lien avec le fait d’être ou non idéologiquement rigoriste et fermé en matière sociale et politico-économique?
En plus de poser un regard critique sur le contenu de l’article de Vincent Marissal, je veux souligner l’importance de reconnaître – préalablement à notre entrée dans un débat – nos choix idéologiques dans nos prises de position. Ainsi, le débat se fait honnêtement avec nos cartes sur tables idéologiques. À cet égard, je me demande pourquoi ne reconnaissez-vous pas vos propres idées et vos prises de position idéologiques Monsieur Coiteux au lieu de vous draper du voile de la nécessité économique? Pour quelqu’un qui se réfère à Lesage et Lévesque comme idoles politiques qui valorisaient le changement social, j’ai bien peur que vous fassiez fausse route dans la mesure où toutes vos actions ne visent finalement qu’à perpétuer aveuglément le système économique néolibéral socialement pathologique même au prix de l’abandon de la population québécoise en raison de coupures considérées inévitables et nécessaires selon votre schème idéologique implicite qui les justifient, mais que vous occultez en grande partie! Car, comme le souligne avec éloquence l'économiste indépendant Ianik Marcil dans la revue L'itinéraire du mois de novembre 2014 dans l’article intitulé «L'idéologie de l’austérité», «[...] le discours en faveur de l'austérité est d'abord et avant tout idéologique. [...] Imposer des mesures d'austérité, en réduisant les services directs aux citoyens les plus démunis, comme le propose le gouvernement Couillard, c'est surtout imposer une vision idéologique du monde. Une vision qui ne correspond pas à la réalité concrète de la situation économique et budgétaire du Québec.»
Quant à moi, j’affirme sans honte aucune et ouvertement mon attachement aux valeurs que sont la solidarité, la justice sociale et l’importance des programmes et services sociaux publics de qualité! Et non monsieur Coiteux, mes lunettes ne sont pas roses!
Note : On m’avise que Lesage et Lévesque se sont effectivement retournés dans leur tombe!
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