Quand le malade vivote sur le respirateur artificiel et que tout espoir de guérison a été écarté, il faut parfois agir d’une manière humaine et le débrancher. C’est ce à quoi aspire réellement le groupe des cinquante ayant signé une lettre pour mettre au rancart (l’étapisme de) Pauline Marois. Ces jeunes péquistes ne devraient pas être ostracisés ou traités de « no-name » (sans-noms) comme l’a fait avec si peu de classe et de fierté francophone l’ancien président de l’aile-jeunesse du parti, Alexandre Thériault-Marois. Il faudrait plutôt les féliciter, voire les récompenser pour leur tentative de sauver ce qui reste du parti de René Lévesque.
En effet, Pauline Marois est devenu un boulet pour le Parti Québécois. Alors que le gouvernement Charest atteint un niveau d’insatisfaction stratosphérique dans les sondages, Marois n’arrive qu’à égalité avec le premier ministre au niveau des intentions de vote. Pire: un hypothétique parti n’existant même pas encore sur papier et dirigé par deux anciens péquistes prendrait le pouvoir si des élections étaient déclenchées demain matin!
On peut chercher des solutions de midi à quatorze heures, on peut vouloir mieux « vendre » Marois, on peut travailler sur ses manières, on peut dépenser des dizaines de milliers de dollars pour améliorer son image médiatique: rien n’y fait. Le courant ne passe pas. La population ne fait pas confiance à Pauline Marois. Elle est compétente, probablement très intègre, sûrement une excellente politicienne, mais les gens ne veulent pas d’elle, peu importe les raisons. Nous aimerions tous nous identifier au légitime rêve de Marois de devenir première ministre et de diriger un gouvernement du Parti Québécois, mais la particularité du rêve consiste à s’estomper quand sonne le réveil du matin.
Or, ce réveil a sonné depuis bien assez longtemps. Quand ce sont des députés libéraux qui rigolent du leadership de Marois, c’est qu’il est temps d’agir. La récente sortie de Jacques Parizeau doit sonner le réveil des troupes. Ce n’est plus le temps d’appuyer sur « snooze » et d’oublier la réalité. Si le Parti Québécois aspire à prendre le pouvoir et à réaliser l’indépendance, il lui faudra trouver des solutions à la fois au problème Marois et améliorer son plan de match en faveur de l’indépendance.
Gilles Duceppe doit prendre la tête du Parti Québécois
Gilles Duceppe n’est ni René Lévesque ni même Jacques Parizeau. Sur plusieurs points, on pourrait même affirmer qu’il fait partie de ces politiciens qu’on trouve un peu trop « langue de bois ». Ceci dit, ses convictions sont claires, nettes et précises. Il ne manque pas une occasion de parler de souveraineté. Il ne le fait pas du bout des lèvres comme Marois, presque comme une éructation involontaire; il le dit haut et fort et il semble davantage prêt à agir en faveur de celle-ci.
De plus, la population l’aime. Oui, il est imparfait. On se rappelle tous l’avoir vu avec un bonnet sur la tête ou s’être mêlé dans ses mots alors qu’il faisait une entrevue télévisée. Peu importe: il est imparfait et il nous ressemble. N’importe quel citoyen du fond d’une ruelle de Montréal ou d’un rang de la région peut s’identifier à Gilles Duceppe.
Or, au-delà du discours, des idées, de la rhétorique, à la fin, dans l’isoloir, la question se résume souvent à celle-ci: « est-ce que je fais confiance à cette personne? » Et Duceppe, dominant outrageusement les élections fédérales au Québec depuis plus d’une décennie, inspire confiance.
Le Parti Québécois doit refuser tout projet de gouvernance et bâtir l’indépendance dès maintenant
Outre la question du chef, celle du discours reste importante. La « gouvernance souverainiste » de Pauline Marois est vouée à l’échec. Le concept-même de gouverner une province – et peu importe les fantasmes de bizarreries du genre « indépendance sectorielle » – implique de faire des choix selon l’axe gauche-droite et non plus selon celui indépendantisme-fédéralisme. Une gouvernance provinciale du PQ ne peut qu’entraîner des déchirures à ce niveau; l’aile-gauche (ou ce qui en reste) et l’aile-droite ne pourraient jamais être satisfaites. Le parti serait constamment écartelé entre sa gauche et sa droite. On l’a vu sous les règnes de Bouchard et Landry. Ne dit-on pas que la folie consiste à agir d’une même manière en espérant des résultats différents?
L’indépendance constitue un geste de rupture. Par essence, il s’agit d’une position radicale. On ne peut pas constamment agir sur la pointe des pieds en ayant peur des sondages. Les plus grandes réalisations du Québec moderne ont constitué autant de gestes de rupture. Croyez-vous qu’on aurait nationalisé l’hydro-électricité en parlant de « nationalisation sectorielle » ou qu’on aurait appliqué la Loi 101 en revendiquant des gains linguistiques circonscrits? Il arrive un moment pour un peuple où celui-ci doit rompre avec un passé le sclérosant et lui faire mordre la poussière.
Le Québec stagne ou recule depuis des années précisément parce qu’on n’a pas définitivement réglé la question nationale et qu’on a préféré avancer sur la pointe des pieds en se contentant des miettes lâchées par le gouvernement de l’autre nation. L’indépendance ne tombe pas du ciel comme un fruit mûr, malgré ce qu’affirment certains rêveurs. Ce n’est pas parce que l’identité québécoise s’avère de plus en plus forte – qui se définit encore principalement comme Canadien aujourd’hui? – que l’indépendance approche; au contraire, c’est peut-être parce que nous avons de moins en moins l’impression de voir les chaînes qui nous limitent que nous avons peur des gestes de rupture.
Autrement dit: l’idée d’indépendance s’est bâtie sur une opposition entre un Québec français et un Canada anglicisant. Or, nous assistons à la naissance du concept de Québécois francophone – et à la légitimation de l’oxymore « Québécois anglophone » – laissant entrevoir non pas un rapprochement vers la réalisation de l’indépendance, mais plutôt vers la bilinguisation puis l’anglicisation du Québec. Loin de constituer une amélioration vis-à-vis du statu quo, la stratégie des petits pas et de la création d’une identité québécoise à l’intérieur du Canada nous rapproche plutôt du précipice.
Voilà précisément pourquoi il est d’une importance capitale de rejeter la stratégie de l’étapisme prônée depuis des décennies par les bonzes péquistes. Elle a échoué. Et elle échouera encore. Les peuples qui sont devenus libres ont d’abord planifié leur libération, l’ont exécutée, puis sont passés à d’autres enjeux.
Si l’article premier du Parti Québécois affirme que le but du parti est de réaliser l’indépendance du Québec, il doit s’y atteler dès maintenant en se débarrassant à la fois du boulet Marois et de son plan d’étapisme ne constituant qu’un énième recul pour la cause. S’il faut une élection référendaire, qu’à cela ne tienne. Le but, le seul, doit être d’utiliser tous les moyens possibles pour libérer définitivement le peuple québécois de l’État canadien.
Sinon, qu’il change son article premier et qu’il devienne un simple parti provincial.
Et nous disparaîtrons en silence à grands renforts de bilinguisme et de « In English Please » (en anglais SVP) éructé de la bouche pointue d’un individu faisant partie d’une nation qui, elle, se respecte.
Marois doit partir
Si le Parti Québécois aspire à prendre le pouvoir et à réaliser l’indépendance, il lui faudra trouver des solutions à la fois au problème Marois et améliorer son plan de match en faveur de l’indépendance.
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