Dans Qui veut la peau du Parti québécois ?, Jean-François Lisée explique et justifie ses décisions pendant ses deux années à la tête du PQ.
Discutable ? Certainement. Subjectif ? Inévitablement. Mais c’est honnête, serein, habilement plaidé, souvent drôle, parfois candide.
La rumeur voulait que l’ouvrage tienne du délestage des responsabilités. Pas du tout, comme on a pu aussi le voir à TLMEP.
Médias
Les sections les plus intéressantes concernent Québec solidaire, dont Lisée décortique la fourberie, l’avenir du mouvement souverainiste, et le fonctionnement des médias.
Une chronique de 500 mots ne peut rendre justice à tout un livre. Je m’en tiens donc à cette question des médias.
Je veux en parler parce que je reçois de nombreux commentaires sur le rôle des médias qui n’auraient pas lieu d’être si leurs auteurs comprenaient ce que Lisée expose très clairement.
J’essaierai de revenir sur d’autres points prochainement.
Entre le tiers et la moitié de la population, explique Lisée, n’a « aucun contact régulier avec la vie politique telle que relatée par les médias ». Imaginez la difficulté pour les rejoindre.
Les militants de chaque parti trouvent toujours que les médias traitent leur formation moins bien que les autres.
Un parti qui ne peut prendre le pouvoir, comme QS, sera traité avec indulgence par les médias.
Contrairement à une bêtise fréquemment colportée, le PQ ne cesse de parler de souveraineté.
Mais les médias ne le rapportent pas, car ce n’est pas une nouveauté : il en parle depuis 50 ans.
Les médias veulent du nouveau. Pourquoi ? Parce que leur auditoire veut du nouveau.
Comme il y a beaucoup plus d’histoires en circulation que de temps ou d’espace, les médias font une sélection et décident quelles histoires se rendent jusqu’à vous et comment ces histoires vous seront racontées.
Sur quelles bases choisissent-ils leurs sujets ? Selon ce qui, pensent-ils, intéressera leur auditoire.
Si un sujet est complexe et n’intéresse qu’une poignée de gens, les médias l’ignoreront.
Forcément, l’émotif, le controversé, le spectaculaire seront privilégiés.
Forcément, la joute politique – qui gagne, qui perd – sera davantage couverte que le contenu des politiques publiques.
On peut le déplorer, mais c’est ainsi.
La logique des médias est d’abord commerciale.
Mérite
Les journalistes font des erreurs et n’aiment pas les admettre, comme tout être humain, mais les comportements médiatiques franchement lamentables sont rares.
Lisée en évoque deux.
En mars 2017, Radio-Canada fait ses choux gras avec un hallucinant « sondage » de CROP qui associait tout malaise face à l’immigration et aux signes religieux à de la xénophobie et de l’intolérance.
Le 29 septembre, deux jours avant le vote, le directeur du Devoir, Bryan Miles, fait de Lisée « l’un des principaux obstacles » à la réunification des souverainistes... après le torpillage par QS des pourparlers.
Il félicite ensuite Manon Massé de parler « vrai », alors que sa formation a passé la campagne à cacher son programme délirant.
M. Lisée réussit à dire tout cela sans avoir l’air trop amer.
Lisez Lisée. L’homme et le livre le méritent.