Journal de Montréal

Les prophéties d'un chroniqueur défaitiste

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Non, l'avenir n'est pas bouché

Je n’ai rien contre le Journal de Montréal ; surtout depuis qu’il s’est modernisé il y a deux ou trois décennies. Mais j’ai quand même des réticences de fond relativement à la clarté de la pensée politique de ce grand quotidien québécois, pensée exprimée le 1er septembre dernier.
En effet j’ai sursauté lorsque j’ai lu des lignes étonnantes sous la plume du principal correspondant de cette publication dans la capitale, Québec, M. Michel Hébert. Des lignes étonnantes, oui, car je les ai crues démobilisatrices pour le lectorat.
Voici ce que dit M. Hébert, en aparté, dans un article qui aborde la question de la laïcité et de la culture : «Avec la défaite du OUI, en 1995, le Québec a franchi un point de non-retour : l’idée du pays sera peut-être caressée encore longtemps, mais le pays du Québec ne naîtra pas. Dans les livres d’histoire, on lira un jour que ce fut l’État avant la patrie… Ainsi soit-il, Amen!». Ceci pour dire que si le gouvernement du Québec pense ainsi, avec son projet de loi relatif aux valeurs laïques, infléchir l’opinion en faveur de l’indépendance nationale il bat du tambour pour rien…
Décrite comme cela, la question nationale pourrait être comprise par les lecteurs comme une impasse ; vue la mort annoncée de notre nation apatride, il faudrait passer à autre chose, et se borner à faire de l’argent avant d’aller passer les hivers en Floride!
De là à croire que Le destin du Québec soit de devenir au bout du compte un reliquat folklorique de la Nouvelle-France, un peu comme la Louisiane il n’y a qu’un pas! Passons donc à autre chose et laissons les autres gérer notre déconfiture ; les citoyens de la Nouvelle-Orléans se contentent bien, eux, de leur statut après tout! .
L’importance du propos de M. Hébert tient au fait que le Journal de Montréal n’a pas de politique éditoriale au sens ordinaire du terme. Mais il en a une indirecte par son pouvoir d’embaucher des chroniqueurs qui pensent comme il faut! Il se dégage alors une politique endossée par le journal. M. Hébert n’écrit pas sous le titre d’une tribune libre…
Dans le cas qui me chicote, le propos de M. Hébert concerne l’avenir de notre collectivité ; il nous dit, en quelque sorte, que le pays du Québec mourra, ou qu’il est mort-né en 1995. N’y aurait-il pas, de la part de ce grand journal des éclaircissements à donner à ce sujet?
En tout cas l’annonce d’une mort n’est pas rafraichissante pour la citoyenneté, certes, mais c’est surtout un raisonnement un peu court. Très court ; car le vocabulaire, en l’instance, n’est pas clair. Il se peut qu’il y ait, ici, une confusion dans les idées. D’abord, malgré ce que M. Hébert semble dire, le pays existe déjà. Au moins au sens paysan du terme. En France, par exemple, il y a des dizaines de «pays» qui se reconnaissent comme tels. Cela n’empêche pas le gouvernement national d’exister et d’assurer la cohésion territoriale.
Après la défaite du OUI de 1995, la question qu’il faut poser c’est de savoir si la «nation» québécoise pourra subsister, et à quelles conditions. L’Histoire ne se demandera pas si une sorte d’État a pu se maintenir. Elle se demandera si la culture franco-québécoise a continué de vivre collectivement et politiquement ; assez pour que celle-ci apporte son grain de sel humaniste dans les Amériques. Un groupe de huit millions d’habitants, malgré ce qu’on peut penser, n’a pas un poids culturel négligeable.
M. Hébert, dans sa chronique, nous ouvre tout de même une porte. Il nous dit que l’Histoire reconnaîtra aux Québécois un statut d’«État». Oui mais un État sans indépendance au moins partagée n’est pas un État.
C’est pourquoi je me dis qu’il serait avantageux, de la part du Journal, de donner des éclaircissements de nature éditoriale à ce sujet. D’autant que sa direction donne parfois des signes de favoriser un certain affranchissement national. Certes il est dangereux pour un peuple comme pour un individu, à mon point de vue, de vivre dans la noirceur des ambiguïtés.
Pour ma part je me dis, dans toute ma relativement modeste capacité de compréhension, que le Québec est une nation qui a la possibilité de devenir une république, donc un État comme toutes les nations des trois Amériques. Ainsi dit, la nation québécoise (le pays québécois en quelque sorte) à notre humble avis, a la possibilité de s’affranchir et de devenir une collectivité structurée, avec ses institutions politiques et sociales. Il se pourrait qu’à cause des circonstances historiques que nous connaissons, des alliances avec la partie anglaise de l’Amérique du Nord soient souhaitables ; c’est ce que croyait René Lévesque par exemple. Mais cela n’enlèverait rien à la qualité fondamentale de la République qui encadrerait notre collectivité. L’espoir est ainsi toujours là ; le statut de pays, en ce sens serait alors atteignable. .. Suis-je trop optimiste? J’attends qu’un grand journal québécois me conforte dans mes idées ou me dise si je suis un «idéaliste».
Il est vrai que les Québécois vivent une situation difficile. D’énormes forces tentent de les empêcher de réaliser un projet collectif. On l’a vu ces derniers jours lorsque la collectivité anglaise du Canada a ouvert un débat sur le désir du Québec de légiférer sur ses valeurs nationales propres ; ces forces ont voulu faire paraître notre collectivité comme étant composée de minables, de bornés, alors que ce sont ces mêmes Québécois, avec leur naïve générosité, qui ont de tout temps ouvert leur cœur au point de risquer de se le faire voler.


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8 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    21 novembre 2013

    M .Hébert toujours dénigré le site Vigile.net même ridiculisé quand on lui envoi des liens venant d'ici.
    Il ne s'est jamais rendu compte que la plupart des articles viennent de différents médias et écrit par ses diférents collègues.
    D'après lui ,il n'y a que lui qui a la vérité.
    Pour moi,tout ce qu'il dit ou Ch... c'est du pareil au même donc....

  • Archives de Vigile Répondre

    10 septembre 2013

    L'opinion d'un chroniqueur ne sera que telle. Elle ne définira pas le sort du Québec. C'est à sa population de le faire.
    Mais rien n'empêche M. Bonhomme de réclamer des éclaircissements sur la pensée dudit chroniqueur, si tant est qu'elle lui importe.
    À vrai dire, je crois que M. Bonhomme veut tenir ouvertes les portes de l'avenir du Québec.

  • Archives de Vigile Répondre

    10 septembre 2013

    C'est souvent comme ça peu importe le média. Encore ce soir le 10 septembre 2013 à TVA, au bulletin de nouvelles de 22h, Jean Lapierre tenait des propos presque haineux envers la charte proposée en s'en prenant particulièrement à la campagne de "propagande" du gouvernement. Mais quand c'était le temps de dépenser pour expliquer le Plan Nord du PLQ !/?*
    Peut-être qu'on est obligé d'agir ainsi parce que le PQ est continuellement dénigré par les médias de l'oligarchie. Si c'est le cas, c'est plutôt habile. Bravo.

  • Serge Jean Répondre

    10 septembre 2013

    Les grands événements sont toujours soudains et innatendus; comme la chute du mur de Berlin par exemple.
    Serge Jean

  • Archives de Vigile Répondre

    10 septembre 2013

    Le Journal de Montréal, un grand quotidien québécois? Vous êtes sérieux ? Misère...

  • Archives de Vigile Répondre

    10 septembre 2013

    L'idée d'indépendance, c'est de donner un état pour l'ethnie canadienne-française concentrée au Québec. Mais avec le paradigme du multiculturalisme, de la baisse de natalité et d'une immigration massive, l'identité culturelle qui fait la différence s'embrouille. La religion fait partie de la culture, même si on est athée. Maintenant, le Parti Québécois se lance dans la laïcité, une commande venue de France. Déjà que nos cours d'Histoire sont dilués parce la mémoire de nos aïeux ne correspond pas à celles des immigrants et autres souches, il est difficile de faire plus pour la langue française (et l'état français s'en fout aussi), on peut se demander c'est quoi l'avenir identitaire. Est-ce, comme envisagé par Lionel Groulx, de devenir une diaspora nord-américaine qui s'entraide par influences croisées à l'instar de la communauté juive ?
    Accepterons-nous de maintenir des institutions étatiques comme Hydro-Québec si nous nous dispersons ?
    La laïcité, c'est l'étouffement de l'héritage spirituelle.
    Nous n'avons pas les réflexes de survie des vieilles minorités, alors c'est l'individualisme qui va se renforcer malgré qu'il soit déjà fort.

  • Archives de Vigile Répondre

    9 septembre 2013

    A mon avis, je lis souvent le Journal de Montréal et je constate que les chroniqueurs sont partagés.
    Il y a M. Mathieu Bock Coté, M. Joseph Facal qui sont plus du coté de se faire un pays.
    Il y a aussi un autre coté comme Mme Lise Ravary et comme vous avez constaté pour M. Hébert, que je n'avais pas remarqué.
    Mme Ravary, elle le mentionne clairement.
    Par contre, il y a un coté très important et précieux, qu'il ne faut pas négliger.
    C'est qu'au Journal de Montréal et de Québec, les lecteurs peuvent exprimer leurs opinions et affronter les chroniqueurs, alors que c'est plutôt rare dans la plupart de nos médias.
    Sur le journal La Presse, il y a rarement de la place pour des commentaires pour ses lecteurs, c'est comme si les chroniqueurs voulaient nous enfoncer dans la gorge leurs opinions, cette façon de fonctionner c'est comme un lavage
    de cerveaux des citoyens, la pensée unique.
    Mon expérience avec Radio-Canada, ce médias prend les commentaires, mais filtre énormément, ce qui n'est pas dans leurs lignes de pensée unique.
    Radio-Canada, invite des spécialistes qui sont dans leurs lignes de pensées, les autres sont écartés tout simplement.
    Pour vous donner un exemple, lorsque Radio-Canada parlait du réchauffement climatique, ils invitaient seulement M. Guilbeault, alors que celui-ci n'a aucune formation sur le climat.
    En 2007, M. Guilbeault fut invité plus de cent fois, inclus Radio et Télé et aucune personne anti réchauffement, n'était invité.
    Selon des personnes comme M. Jacques Brassard ancien Ministre de l'environnement du Québec, M. Guilbeault a une formation universitaire en théologie non terminé.
    M. Brassard déplorait que seulement M. Guilbeault était invité a Radio-Canada pour parler de réchauffement climatique.
    http://blogjacquesbrassard.blogspot.ca/2009/11/aveuglement-pathologique.html

  • Alain Maronani Répondre

    9 septembre 2013

    Je cite...
    'Mais il en a une indirecte par son pouvoir d’embaucher des chroniqueurs qui pensent comme il faut !'
    ????
    Ce n'est pas 'La Pravda'...et PKP regarde surtout les rentrées publicitaires...
    J'imagine qu'une opinion différente aurait été aussi déplaisante à d'autres lecteurs.
    Il y a un peu de tout dans ce journal, en tout cas pas de lignes éditoriales style 'La Presse'.