[->2310] Les réunions à huis clos de hauts fonctionnaires et de gens d'affaires d'Amérique du Nord sur l'exportation de l'eau du Canada nous rappellent que c'est toujours l'approche coloniale qui domine l'économie canadienne, comme le soulignait l'urbaniste torontoise d'origine américaine Jane Jacobs en 1981, dans son ouvrage The Question of Separatism, où elle se prononçait pour l'indépendance du Québec.
La classe des dirigeants politiques et économiques canadiens se frotte déjà les mains, une fois de plus, en pensant à l'argent dont elle pourra se remplir les poches et qu'elle pourra placer dans des paradis fiscaux, aux dépens de la population en général, pour ensuite se la couler douce dans les mers du Sud. Loin de vouloir mettre en valeur les ressources du pays pour créer de la richesse sur place tout en préservant la nature pour les générations futures, cette bande de pillards en remet après avoir saccagé les forêts du Québec, détourné le fleuve Rupert, criblé la Gaspésie d'éoliennes et souillé le Nord de l'Alberta pour en tirer le pétrole que l'on brulera avidement dans des Hummer avec les conséquences catastrophiques que l'on connait sur le climat de la planète.
Conservateurs, libéraux, néodémocrates, adéquistes et parfois même péquistes, à ma grande honte, les pillards sont tous les mêmes. Ils n'ont pas évolué depuis l'époque coloniale. Ils appliquent à leur propre pays les mêmes recettes qu'employait jadis la Grande-Bretagne. Ils se fichent éperdument du sort de leurs concitoyens et de l'humanité. Pourvu qu'ils aient de la main-d'oeuvre quand ils en ont besoin. C'est tout ce qui compte à leurs yeux. Ils font partie des «riches qui détruisent la planète» dont parle Hervé Kempf. Ce sont même des premiers de classe en la matière.
Les pillards ne mettront jamais en valeur les ressources où elles se trouvent. C'est bien que trop compliqué. On peut s'enrichir bien plus rapidement en bradant tout. Sous leur emprise, la main prétendument magique du marché devient une main saccageuse à laquelle il ne faut surtout pas faire confiance, en particulier dans un pays qui regorge de ressources naturelles faciles à exploiter.
Au Québec, nous conservons toujours des vestiges débilitants de la mentalité de pauvres bucherons, de porteurs d'eau misérables, de pêcheurs irrémédiablement endettés. Nous avons peur de perdre nos jobs et nous tremblotons à l'idée de nous dire oui, de mettre nos forces en commun et de nous faire confiance à nous-mêmes. Pendant que nos démagogues font diversion en créant la panique autour de quelques immigrés, se cachent dans nos rangs ceux qui entretiennent le statuquo et la résignation et qui en profitent pour nous voler.
Si nous ne sommes pas plus riches collectivement des véritables richesses, y compris la nature, le savoir, la culture et la santé, et si nous risquons même de léguer à nos enfants un monde stérile, c'est que nous avons toléré la mainmise des pillards sur la nature qui nous entoure. Nous habitons un vaste territoire peu peuplé qui regorge de ressources. Si nous prenions vraiment nos affaires en main, dans un Québec indépendant et dans un Canada peut-être libéré lui aussi par la même occasion de ses traditions coloniales et monarchiques, nous cesserions de nous faire les valets de ces riches sans génie.
Bernard Desgagné
Gatineau
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