Les nouveaux défis de la télévision comme reflet et espace public de débats de société

L’internet ne pourra invalider le rôle de la télévision, pas plus que la télévision n’a invalidé le rôle de la presse écrite ni de la radio

Tribune libre - 2007

Texte publié dans Le Devoir du lundi 22 octobre 2007

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Au Canada et au Québec, les débats de société s’aiguisent, s’accumulent
comme sur la guerre en Afghanistan, le respect du protocole de Kyoto, les
accommodements raisonnables, etc. La télévision est le média par excellence
pour assurer un minimum de cohésion sociale autour de valeurs
démocratiques, à commencer par le libre débat pour trouver une solution aux
problématiques de notre société. Comme grand média de masse, la télévision
a joué un rôle de pilier, crucial pour l’établissement de valeurs et de
libertés démocratiques au Québec, au Canada et ailleurs dans le monde. La
télévision joue le rôle de participante directe et indirecte aux débats de
société, comme reflet et espace public de débats, simultanément.
Le défi de l’internet
L’internet ne pourra invalider le rôle de la télévision, pas plus que la
télévision n’a invalidé le rôle de la presse écrite ni de la radio. Sur le
plan de l’information, les rôles de la télévision et de l’internet sont
différents : la télévision, par les bulletins de nouvelles et les émissions
d’affaires publiques fait UNE OFFRE d’information alors que l’internaute
fait UNE DEMANDE d’information. L’écoute d’un bulletin de nouvelles
télévisé est COLLECTIVE, sociale alors que la démarche de l’internaute est
INDIVIDUELLE. Par la télévision, socialement, collectivement on est informé
au même rythme, on prend connaissance au même rythme d’événements, de
points de vue, de problématiques. C’est un premier élément du rôle de
cohésion sociale que joue la télévision contrairement à l’internet.
L’internet sert d’abord au commerce et au divertissement bien avant
l’information. Occasionnellement, l’internet peut servir prioritairement de
média pour le mouvement pacifiste, écologiste, altermondialiste et jouer un
rôle social. Si les grands média de masses succombent trop à la pensée
unique, l’internet servira de plus en plus de média alternatif pour un
ensemble de mouvements sociaux. C’est là le nouveau défi de la télévision
et surtout celui du réseau public.
Enrichir les débats, éviter la pensée unique
Si le réseau public télévisé le veut bien, d’abord la Société
Radio-Canada, il y a possibilité de diversifier davantage les sources
d’information. Pour établir un portrait global d’un débat de société, la
télévision ne peut se limiter aux sources hiérarchiques traditionnelles
d’information bien qu’incontournables. Ici, on parle principalement des
pouvoirs publics (gouvernements, villes) et leaders d’oppositions, des
chefs d’entreprises, des principaux leaders syndicaux et sociaux, et des
spécialistes et experts sur différentes problématiques.
On doit aller vers les sources intermédiaires tel que les organismes de
base de la société civile et aussi vers les citoyens et citoyennes de la
base. Cette diversification des sources est partiellement réalisée ou en
cours de réalisation, mais il reste néanmoins beaucoup à faire tant dans
les bulletins de nouvelles que dans les émissions d’affaires publiques.

La diffusion d’une pluralité d’opinions sur une problématique donnée a
déjà commencé à s’améliorer dans le cadre des émissions d’information
incluant des panels contradictoires avec ou sans auditoire en salle, lignes
ouvertes et courriel électronique.
En annonçant la programmation d’automne, un porte-parole de la Société
Radio-Canada affirmait qu’il y aurait une plus grande diversité dans
l’information et une plus grande diversité culturelle pour se démarquer de
la pensée unique.
Le médium n’est pas le message comme le disait ou pensait Marshall
McLuhan, sociologue canadien, mais c’est plutôt le rôle et la façon
d’utiliser le médium qui compte.

Impact de la concentration privée des média

La concentration privée des média, malgré la multiplication de plateformes
médiatiques (journaux, radio, télévision, internet, câble, etc.) ne
garantit pas une plus grande diversité de l’information. On constate au
contraire qu’il y a une plus grande uniformisation de l’information, une
seule et même approche journalistique reproduite par divers types de média
appartenant à un même groupe privé depuis un nombre restreint de
journalistes. La Fédération Professionnelle des Journalistes du Québec
(FPJQ), la Fédération Nationale des Communications (FNC-CSN) et la Société
Radio-Canada se sont précisément prononcées pour maintenir l’encadrement et
la réglementation des opérations d’acquisitions et de fusions d’entreprises
dans le domaine des média privés afin de baliser et d’éviter cette
uniformisation de l’information
Des publics critiques, non passifs
Si nous tenons compte des différentes appartenances sociales, familiales,
conviviales, sociopolitiques, il serait mieux de parler de publics au
pluriel plutôt que d’un seul public. Ces publics reçoivent l’information
en la « filtrant » plus ou moins selon l’opinion ou la perception de leurs
milieux d’appartenances. Dans ce contexte-là, nous ne pouvons ni
sous-estimer ni surestimer l’influence des média, en particulier la
télévision.
Les réseaux de télévision offrent aux publics la possibilité de réagir,
de poser des questions, de faire des commentaires et des critiques. Une
forme de dialogue interactif s’instaure progressivement, confirmant bien
que les publics de la télévision ne constituent pas un auditoire passif
mais jouent aussi le rôle d’émetteur et non seulement celui de récepteur
suivant certaines théories anachroniques en sociologie de la communication.
Mieux comprendre le rôle spécifique de la télévision permettra aussi aux
mouvements sociaux d’améliorer ou de modifier leur stratégie de
communication avec l’ensemble de la population à travers la télévision.
André Rousseau

bénévole au Forum Social Québécois

ex-recherchiste pour l’émission « Droit de parole » à Télé-Québec
-- Envoi via le site Vigile.net (http://www.vigile.net/) --

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André Rousseau30 articles

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Membre du Parti Québécois, comté de Mercier

Membre du comité communication et mobilisation du Forum social québécois

Membre de l’Association Québécois de Lutte contre la Pollution
Atmosphérique (AQLPA)

Diplômé en économie appliquée de l’UQAM (certificat)





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