Loco Locass et Emmanuel Bilodeau

Les Géants

Fête nationale du Québec 2008

Fête nationale des Québécois - 24 juin 2008


Nous sommes issus d'un sol immense, qui nous a tissés métissés
_ Rebus de brins de laine tressés très serré
_ Sans couture au sein d'une ceinture fléchée
_ Comme quelque queue clinquante de comète effilochée
_ Et si l'on suit le fil de notre texte il
_ Mène à la sortie du labyrinthe de Pan
_ Qui nous éreinte depuis qu'ils ont mis nos torts dedans
_ Ils ont conquis nos territoires, pillé notre histoire et volé notre mémoire
_ Avec leurs thèses de fous, ils nous ont dit: «Taisez-vous!
_ Vous ne valez pas 10 sous
_ Vous n'êtes pas vous, vous êtes nous
_ Vous êtes dissous
_ Notre substrat vous subsume et la comparaison vous consume»
_ Faux! Nous venons d'avant
_ Nous sommes antérieurs
_ Nous sommes des créateurs, pas des créatures, pas des caricatures
_ Notre maison n'a pas de cloisons
_ Mais quatre saisons
_ Acclimatés au climat
_ Et faisant fi du frimas
_ Nous avons parcouru par ses artères tout un continent titan
_ Notre espèce aspire à l'espace et son empreinte est partout
_ Tapie dans la toponymie
_ Gravée dans le granit, égrainée sur la grève
_ Arc-boutée dans les arches de nos dingues digues dignes de la muraille de Chine
_ Dans les champs essouchés sous la lune
_ Et les racines d'un hêtre qui ne peut plus plier
_ C'est une histoire riche qui n'est sur aucune affiche
_ Et qu'on a laissée en friche
_ Dans nos caboches, ce n'est que roches et fardoches
_ Cosmogonie à l'agonie
_ Dans le tome fantôme du grimoire d'une mémoire moisie
_ Sur nos épaules on porte pourtant le pack-sac d'un passé épatant
_ Mais allons-nous mourir en nains quand nous sommes nés géants?
_ Sitôt venus au Nouveau Monde
_ On a dompté les hivers et fabriqué de la terre
_ On avait la tête à la fête et le coeur au labeur
_ Opiniâtres, on n'a jamais laissé mourir le feu dans l'âtre
_ Car nous avons la tête à Papineau
_ La longue langue agile de Da Costa
_ Le coeur-corsaire de d'Iberville
_ Qui envoie en nos veines
_ Le pur-sang mêlé-mêlé de Riel et des Premières Nations
_ Nous avons l'aviron de Radisson, la vigueur de la Vérendrye
_ Les jarrets de Jolliet et tous les talents de l'intendant Talon
_ En somme, nous sommes des surhommes uniques
_ Générés par le génie génétique de l'Europe et de l'Amérique
_ Inéluctablement, nous voguons vers le néant
_ Mais allons-nous mourir en nains quand nous sommes nés géants?
_ Opaque, il faut qu'enfin notre épopée éclate
_ C'est sans équivoque, cette Histoire est pleine et craque
_ Loco Locass la provoque de son verbe épique: les eaux sont crevées
_ Et tombent en trombes et forment une flaque, que dis-je, une flaque
_ C'est comme un lac à nos pieds
_ Le col se dilate
_ Le sol s'écarquille
_ Pour laisser monter un corps en forme d'ogive
_ C'est le chaos qui «paaaaaasse» dans le chas d'une aiguille
_ C'est un cri qu'on pousse, un coeur qui pulse
_ Celui d'un peuple qu'on accueille ou qui frappe un écueil
_ Dans l'oeil du cyclone, chaque seconde en vaut quatre
_ Nous rapproche d'un miracle
_ C'est un spectacle sans entracte
_ Mais gare à l'arrêt cardiaque
_ Entre la mort et la vie
_ L'arrivée d'un homme comme lors d'un référendum
_ Un peuple oscille entre le rien et tout ce qui brille
_ Je pose des mots garrots gare au flot hémorragique
_ Ô ma rage gicle par tous les pores de mon coeur spongieux
_ Sur ce son long jeu conjure ma mortelle nature
_ Et nous disons que la parole est une sage-femme
_ Qui tire des limbes un monde à naître
_ Fort de cette maïeutique aux forceps
_ Le poète nomme enfin celui dont il voit poindre la tête:
_ QUÉBEC!
- Loco Locass et Emmanuel Bilodeau.


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1 commentaire

  • Réal-Gabriel Bujold Répondre

    25 juin 2009

    J'aimerais que soient ajoutés aux GÉANTS les deux personnages suivants:
    Mary Travers (LA BOLDUC) Essentiel!
    (ET) Stadaconé (représentant des Amérindiens)
    Bien cordialement,
    Réal-Gabriel Bujold Laval
    realbujold@sympatico.ca
    Ps- Faire suivre au comité des Géants du Québec.