Les ayatollahs du salami

humour du secondaire...


(Québec) Le Québec constitue un endroit étrange où vous pouvez démolir des bâtiments centenaires, raser des vieux monastères et saccager des paysages fabuleux, sans que personne ne lève le petit doigt. Ou si rarement.
Au coeur du Vieux-Québec, L'Hôtel-Dieu s'apprête à construire un énorme bâtiment, sans causer plus d'émoi que le rot d'une mésange, au fond d'un arbre creux, par une nuit sans lune.
Mais attention. Si quelqu'un affirme que nous mangeons parfois de la viande halal sans le savoir, attachez votre tuque.
Les tribunes téléphoniques crépitent. Les médias sociaux s'affolent. Nos polémistes se prennent pour des clones de Richard Coeur de Lion, parti bouter les Sarrasins hors de la Terre sainte. À la télé, Mario Dumont met son costume de Bonhomme Sept-Heures et il prend sa voix de curé expliquant la vie éternelle à des caniches.
Alerte! Notre héritage est menacé! Les accommodements déraisonnables pour les musulmans, ça suffit!
Avec des défenseurs semblables, pas sûr que l'identité québécoise a besoin d'ennemis. Ça rappelle l'histoire absurde de la petite Québécoise qui gambadait dans la forêt.
Soudain, la Vierge Marie apparaît. La fillette tombe à genou.
- Merci d'écouter les Québécois, s'écrie-t-elle. Merci de maintenir vivante notre culture.
La Vierge devient mal à l'aise. Elle répond:
- Sorry, I don't speak French.
À force de crier à l'aide, nos aventuriers de l'identité perdue ont été entendus par nul autre que le Parti québécois.
D'accord. Le PQ, c'est pas exactement le cavalier blanc. Mais qu'à cela ne tienne. Mercredi, le porte-parole du Parti en matière d'agriculture, André Simard, déclarait que l'abattage halal heurte «de plein fouet» les valeurs québécoises. Rien de moins.
À l'entendre, l'abattage rituel progressait de manière fulgurante. Il évoquait les animaux qui souffrent. Les conditions sanitaires douteuses. Les consommateurs floués.
Le problème, c'est que l'exemple qu'il citait apparaissait particulièrement mal choisi.
Dans l'abattoir en question, situé à Saint-Damase, seul un petit nombre de poulets sont bénis par un imam. Toutes les volailles sont assommées avant d'être abattues. Et aucune bestiole n'est tournée vers la Mecque.
Si cela suffit à heurter «de plein fouet ses valeurs», M. Simard n'a pas fini d'avoir l'air d'un chevreuil figé devant les phares d'un camion-remorque fonçant vers lui à toute vitesse. En tout cas, on lui conseille fortement de devenir végétarien.
Plus emmêlé, il y a les journalistes qui demandaient des renseignements sur la viande de porc halal.
Du porc halal? Sachant que les musulmans ne mangent pas de porc, est-ce l'équivalent du politicien sincère?
Des fois, nos politiciens ressemblent à l'aspirant peintre qui suivait des cours avec un grand maître. Excédé par les critiques, l'élève finit par s'exclamer:
«Pourtant, je peins ce que je vois!»
Et le maître répond.
- Oui. Le vrai choc surviendra le jour où vous verrez ce que vous peignez.
Blague à part, on peut applaudir ceux qui réclament l'étiquetage obligatoire des viandes halal. Une question de respect envers les consommateurs. Mais si ces gens avaient mis la même énergie à défendre l'étiquetage des produits contenant des OGM, on croirait davantage à leurs beaux principes.
Pour l'instant, il est difficile de ne pas constater l'étrange similitude entre la sortie du PQ sur la viande halal et la croisade mensongère que mène en France le Front national de Marine Le Pen. Récemment, la chef du parti d'extrême droite a même prétendu que toute la viande consommée dans la région parisienne était halal, ce qui est faux.
C'est donc ce genre de discours nauséabond qui inspire le PQ, le parti de René Lévesque?
S'il est vrai qu'on a la politique que l'on mérite, qu'avons-nous fait de si grave pour mériter cela?
On finit par avoir envie de s'exclamer, avec Luis Bunuel: - Dieu merci, je suis athée.


Laissez un commentaire



Aucun commentaire trouvé