«Il serait illusoire de croire que le Québec offrirait pendant bien longtemps son soutien aveugle à des politiques fédérales qui vont à l’encontre de ses convictions collectives, en échange d’un peu plus d’autonomie provinciale. Mais à ce compte-là, Stephen Harper ne serait pas le premier homme à s’imaginer voir une grande histoire d’amour là où il n’y avait qu’un simple baiser. »
C’est ainsi que la journaliste Chantal Hébert conclut son livre French Kiss, le rendez-vous de Stephen Harper avec le Québec. Un livre décevant qui consacre plus de pages à Paul Martin qu’à Stephen Harper, un livre dont il est difficile de saisir la structure tant il va dans toutes les directions.
Ceux qui suivent l’actualité politique n’y apprendront rien. Aucune révélation, aucun analyse percutante. C’est une chronique échevelée des événements politiques des dernières années.
La fin annoncée (une nouvelle fois !) de la souveraineté
De toute évidence, Chantal Hébert n’est pas souverainiste. «Le mouvement souverainiste québécois, du moins tel qu’on le connaissait depuis sa naissance dans les années 1960, a été enseveli sous les décombres de l’ex-Yougoslavie», écrit-elle en affirmant que «les jours où le Québec et le reste du Canada se jetaient corps et âme dans une discussion constitutionnelle sont probablement révolus»!!!
Elle déplore «l’immense gaspillage de talents » que constituerait la présence du Bloc à Ottawa. Il n’aurait eu pour effet, selon elle, que de légitimer les institutions politiques fédérales au Québec, niant toute l’expertise, particulièrement au plan des questions internationales, que le mouvement souverainiste y a acquis.
Les jeunes Québécois ne partageraient plus les préoccupations de leurs aînés. «Dans l’ensemble, soutient-elle, ils voient moins l’anglais comme une imposition canadienne que comme un passage obligé de la société moderne. Comme leurs contemporains du Canada, ils ont grandi avec la Charte des droits de Pierre Trudeau. Pour eux, les libertés civiles priment sur les revendications historiques; ils sont également profondément nord-américains. »
Elle met beaucoup d’espoir dans l’environnement pour «résoudre» la crise canadienne. «Dans une province où la politique a remplacé la langue pour devenir le sujet-icône d’une nouvelle génération. L’environnement s’est aussi révélé un nouveau point de rencontre entre les souverainistes et les fédéralistes. »
À la recherche d’un mélange de Brian Mulroney et Pierre Trudeau
Chantal Hébert est une nostalgique de l’Accord du Lac Meech. En filigrane, on comprend que sa solution idéale résidait dans le concept de «société distincte», un concept «plus inclusif qu’identitaire».
Manifestement, elle est en pâmoison devant Jean Chrétien et partage l’avis de ce dernier que Martin a tout gâché en créant la Commission Gomery. Elle prône, sans trop y croire, une fusion entre le NPD et le Parti libéral ou, si cela s’avère impossible, un «système électoral plus proportionnel», mais sans trop y croire non plus.
Elle admire Stephen Harper pour son ouverture envers le Québec, quoique qu’elle exagère la réponse du Québec à son endroit. (Après tout, il n’a remporté que 10 circonscriptions et 75% des électeurs ont voté pour d’autres partis.) Mais elle craint que l’histoire d’amour ne se termine avec ce «french kiss». Son fantasme du Prince charmant serait un Stephen Harper progressiste. Un mélange de Brian Mulroney et Pierre Trudeau. Un Justin Trudeau peut-être?
L'aut'courriel n° 224, 11 mars 2007
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