Le « PQ nouveau »

La démarche d’André Boisclair a de quoi inquiéter les souverainistes.

Chronique de Patrice Boileau

André Boisclair persiste et signe. Le chef du Parti québécois a en effet déclaré qu’il restait bien en selle à la tête de sa formation. L’homme compte proposer sous peu aux membres du parti des changements majeurs au sein du programme péquiste. Il a ajouté que c’est au travers de ces offres que son leadership sera jugé.
La démarche d’André Boisclair a de quoi inquiéter les souverainistes. Affaibli par des résultats électoraux catastrophiques, le dirigeant du Parti québécois n’est pas en position « d’agir seul » comme il semble vouloir le faire, dans son projet de remodeler le programme politique du PQ. Son refus de vouloir tenir un congrès rapidement aggrave la crise de confiance dont il est l’objet. Ne pas vouloir rencontrer ses militants laisse perplexe puisque le chef péquiste a pourtant affirmé « que le vrai courage, c’est de s’engager dans une discussion … »
Les péquistes qui réclament rapidement un congrès ont raison. Un scrutin peut survenir dans la prochaine année puisque Jean Charest dirige un gouvernement minoritaire. Le Parti québécois doit donc « être prêt » à offrir aux Québécois quelque chose de différent. L’exécutif national du Parti québécois serait en conséquence bien mal avisé de décider de maintenir sa décision d’avancer la tenue d’un congrès national pour l’automne 2008.
L’épreuve de force qui se dessine entre l’État-major péquiste et sa base militante semble délibérée. Les ténors du Parti québécois se comportent de manière à provoquer le départ des forces vives de la formation. Ceux que les médias fédéralistes ont déjà identifiés comme une poignée de « purs et durs », représentent en réalité des indépendantistes dévoués qui bouillonnent d’idées constructives. Ils ont été muselés plus souvent qu’autrement par les apparatchiks du PQ qui obéissent curieusement aux règles du jeu fixées pas la classe journalistique fédéraliste. Il est plus que temps de mettre un terme à cette douteuse alliance qui a empêché le Parti québécois de se renouveler réellement.
Le virage auquel nous convient André Boisclair et sa garde rapprochée n’en sera donc pas un qui a comme cible la souveraineté. C’est d’ailleurs un discours d’affirmation nationale que nous livre présentement le dirigeant péquiste depuis la déconfiture du 26 mars. Un rapprochement avec l’Action démocratique et sa « démarche autonomiste » pourrait même être scellée. La bande à Mario Dumont ne forme pourtant pas le gouvernement. De plus, l’ADQ est plutôt froide à l’idée de s’associer avec le PQ, flairant l’astuce visant à précipiter l’avènement d’une impasse constitutionnelle avec Ottawa, un Meech II, afin de raviver la flamme souverainiste.
Le chef du Parti québécois doit plutôt poser des gestes qui ramèneront les souverainistes adéquistes au bercail. Un discours franchement indépendantiste, non pas référendiste, pourrait donner des résultats. Voter contre le budget libéral qui prévoit de transformer les « millions d’Ottawa » en baisses d’impôt, pourrait faire tomber le gouvernement, si l’opposition adéquiste tient parole. Voilà qui mobiliserait soudainement les troupes souverainistes vers un objectif indépendantiste imminent, à des années-lumières des calendes grecques que paraît vouloir viser André Boisclair.
Le silence du chef péquiste depuis le résultat électoral, ses déclarations qui laissent croire qu’il tente d’esquiver un congrès d’urgence, font perdre d’autres appuis au Parti québécois, selon un récent sondage de la firme CROP. L’option souverainiste aussi faiblit; elle qui rallie maintenant 42% des Québécois. Manifestement, André Boisclair s’accroche à son poste. Cela nuit à sa formation politique et à l’article 1 qui le caractérise. Des membres du caucus le savent, des présidents de circonscriptions aussi ainsi que des milliers de souverainistes. Il ne fait aucun doute que le leader actuel du Parti québécois ne pourra vaincre Mario Dumont lors du prochain rendez-vous électoral. Le député péquiste de Pointe-aux-Trembles doit poser le geste noble qui s’impose, s’il a à cœur les intérêts suprêmes de la nation. Il peut encore quitter dans la dignité, et assurer la pérennité de son parti.
Le nouveau PQ qu’imagine actuellement André Boisclair peut prendre deux formes. S’il devient affirmationniste, il se videra de militants indépendantistes qui fonderont alors prestement une formation politique à leur image. Il y a fort à parier que ce PQ « nouvelle mouture » se dissoudra dans l’ADQ… Un Parti québécois, ayant au contraire à sa tête un autre dirigeant désireux d’offrir la souveraineté dès le prochain appel aux urnes, forcera toutes les autres formations à afficher clairement dans quel camp elles logent. En proposant un projet de pays limpide qui place en son centre la sauvegarde de la nation québécoise et la fin de sa minorisation au sein du Canada, de nombreux Québécois reconnaîtront que le PQ n’est plus celui qui s’est présenté à eux en mars dernier, ankylosé par des années d’attentisme.
***
Il m’était malheureusement impossible d’assister à la rencontre du 30 avril dernier à la maison Ludgey-Duvernay de Montréal pour faire l’autopsie de l’élection du 26 mars. Ce n’est que partie remise car il est certain que le PQ nouveau qui est présentement en gestation ne verra pas le jour sans ma participation. Et je crois ne pas être le seul indépendantiste dans cette situation.
Patrice Boileau






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3 commentaires

  • Normand Perry Répondre

    2 mai 2007

    Comme à l'habitude monsieur Boileau votre plume et la pertinence de vos idées sont très percutante.
    Lorsqu'un véhicule montre des signes d'usures, il faut changer son moteur, sa transmission et lui donner une peinture fraîche, ou se procurer un véhicule tout neuf afin d’assurer un transport adéquat des occupants.
    Si la cause de l'indépendance nationale du Québec ne peut plus être véhiculée adéquatement par le parti qui prétendait jusqu'à ce jour pouvoir le faire, alors ce parti doit être réformé ou "re" fondé selon l'expression de Gilbert Paquette, en le centrant sur sa mission unique de l'indépendance, comme le démontre si bien Louis Bernard. Si une réforme en ce sens est impossible, alors un nouveau véhicule devient un impératif, illico.

  • Archives de Vigile Répondre

    2 mai 2007

    Salutation citoyennes et citoyens,
    En réaction à votre texte, Monsieur Boileau, je dois schématiser à une fin de démonstration rapide.
    Cela "bouillonne" au PQ. La tendance Boisclair veut amender le programme du PQ et ensuite tenir un vote de confiance sur son leadership. Qu'en sera-t-il finalement ?
    Le PQ a toujours été aux prises avec les confédéralistes...
    Si le PQ devient "affirmationniste", et bien, l'ADQ le supplantera d'autant plus facilement... Le PQ est à un point tournant de son histoire : en crise, une autre, ou en déclin ?
    Entre-temps, au sein du mouvement indépendantiste, quel groupe aspire à en devenir la locomotive ? La Patrie ne saurait être réduite qu'aux tribulations du PQ...
    Montréal

  • Archives de Vigile Répondre

    2 mai 2007

    M. Boileau écrit : «Un Parti québécois, ayant à sa tête un autre dirigeant désireux d’offrir la souveraineté dès le prochain appel aux urnes, forcera toutes les autres formations à afficher clairement dans quel camp elles logent. En proposant un projet de pays limpide».
    Le seul leader du PQ, connu actuellement, qui loge clairement à cette enseigne est M. Louis Bernard qui ne désire pas que le PQ se prépare à gouverner une province mais un pays. Ceux qui ont peur d'un référendum en le repoussant sous-entendent que le Québec ne veut pas de la souveraineté...majoritairement. La souveraineté n'est pas une affaire de gauche ou de droite, c'est un choix constitutionnel majoritaire ou minoritaire...point.
    Faudrait que chaque camp prêche pour son option : Les fédéralistes «vive le Canada comme il est là», les autonomistes «vie le Québec autonome dans le Canada» et les souverainistes «vive le Québec hors du Canada». Après avoir choisit ça, on pourra décider si ça sera à gauche, à droite ou au centre avec le degré de pollution souhaité et le tour sera joué.
    Gilles Bousquet