N’en déplaise à M. Bouchard ainsi que nos adversaires fédéralistes qui se sont régalés de ses propos, une majorité importante de Québécois appuient la position actuelle du PQ sur la défense de notre identité nationale. Les militants du parti, souvent divisés sur d’autres questions, sont aussi massivement derrière la chef sur cet enjeu.
Dans la décennie ayant suivi la défaite de 1995, la dimension identitaire a été pratiquement évacuée du discours souverainiste. C’était l’époque du multiculturalisme triomphant. Peu de voix s’élevaient pour dénoncer cette idéologie qui rabaisse notre culture, ce que nous sommes, à égalité avec n’importe quelle autre sur notre territoire. Le rêve de Pierre Elliot Trudeau d’un État sans culture officielle se matérialisait presque au Québec. La mondialisation de l’économie semblait aussi donner un cadre narratif à l’abolition des frontières et à la déliquescence du nationalisme identitaire via une dilution du pouvoir des États-nations.
Mais la mondialisation n’a pas eu pour effet d’abattre les frontières et réduire la pertinence du nationalisme et des États-nations, au contraire. La libéralisation du commerce a eu un effet catalyseur sur les groupes nationaux minoritaires, leur procurant une liberté d’action accrue face à l’État central (le Canada dans le cas du Québec). C’est d’ailleurs un phénomène que le professeur Stéphane Paquin a baptisé « la revanche des petites nations ». Dans la même lignée, Jacques Parizeau démontre dans son dernier ouvrage d’une façon éloquente comment l’appartenance du Québec au grand marché de l’Amérique du Nord nous a permis d’élargir nos horizons économiques.
Ce raisonnement économique s’applique également à la question identitaire. Le profond malaise qu’éprouve une majorité de Québécois face à certaines pratiques d’accommodements déraisonnables envers des extrémistes religieux n’est pas unique au Québec, il traverse le monde occidental au grand complet. Cela se décline sous des formes différentes au gré des cultures et des régimes politiques, mais une réalité incontournable demeure : la majorité des nations désirent que leurs institutions politiques leur ressemblent, qu’elles partagent leurs valeurs.
Bien sûr, il y en a toujours qui, à l’instar de Pierre Elliot Trudeau et de ses successeurs, rêvent à la fin du nationalisme identitaire et à la désincarnation culturelle de l’État. Ceux-là vont à l’encontre de la marche de l’histoire. Ceux-là mènent un combat d’arrière-garde voué à l’échec, parce qu’au bout du compte, c’est le peuple qui décide. Le sondage publié ce matin dans Le Devoir est d’ailleurs sans équivoque : 75% des Québécois jugent que le gouvernement est trop accommodant concernant les demandes liées à des motifs religieux.
Les pères fouettards de tout acabit pourront hurler à l’intolérance autant qu’ils le voudront : le PQ de Pauline Marois est en phase avec la population québécoise sur cet enjeu. Le Québec n’est pas que la somme des individus qui y habitent. C’est une nation avec une langue, une culture, une histoire et des traditions qui lui sont propres. Ces attributs de notre identité nationale doivent être au cœur de l’action de l’État québécois ; ils constituent d’ailleurs les « raisons profondes » de faire la souveraineté telles qu’énoncées par le grand intellectuel Fernand Dumont.
Bref, le PQ s’est reconnecté sur sa base, sur sa raison-d’être. C’est une excellente nouvelle pour ceux qui, comme moi, poursuivent le combat pour l’indépendance du Québec.
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1 commentaire
Jacques Bergeron Répondre
19 février 2010Bravo M. Desnoyers, c'est exactement le propos que j'ai soutenu dans ma lettre à Bernard Landry en 2003,lettre portant le titre de «Lettre à un ami».Merci d'avoir écrit ce texte envers l'homme qui n'aurait jamais dû être Chef du Parti québécois et son président, ce que j'avais souligné ,contrairement à la majorité de nos membres, dans un article publié dans l'Action indépendantiste du Québec avant qu'il ne soit considéré comme sauveur de la nation et de notre parti politique. Comme sauveur: on a déjà vu mieux.