Conseil du statut de la femme

Le port du voile, d'hier à aujourd'hui

Port de signes religieux

À la suite de [l'éditorial de Marie-Andrée Chouinard du 1er octobre 2007->9365] sur l'avis du Conseil du statut de la femme en ce qui concerne le droit à l'égalité entre les femmes et les hommes et la liberté de religion, permettez-moi de dissiper une incompréhension qui laisse croire que le Conseil a modifié son opinion quant à sa recommandation de 1997 sur le port du voile pour les élèves dans les écoles.
En fait, il n'en est rien. Dans un avis publié en 1997 (Droits des femmes et diversité: avis du Conseil du statut de la femme), le Conseil avait recommandé qu'il soit permis aux jeunes filles de porter le voile dans les écoles. À ce sujet, la position du Conseil est toujours la même et le dernier avis ne la contredit pas.
La recommandation de 1997 était conséquente à une recherche du Conseil publiée en 1995 (Réflexion sur la question du port du voile à l'école) qui avait mis en lumière le fait que, l'école étant le lieu par excellence pour l'intégration sociale des enfants issus de l'immigration, il fallait éviter toute mesure qui risquerait de conduire à l'exclusion de jeunes filles de ce milieu. En ce sens, l'interdiction du port du voile nous semblait inappropriée. Le Conseil a donc fait, il y a 12 ans, le pari que le port du voile par certaines élèves devait être permis à l'école pour favoriser leur intégration. Il faut souligner que le Conseil ne s'est pas penché de nouveau sur cette question, laissant intacte la recommandation d'alors.
Dans l'avis que nous venons de déposer, nous demandons notamment au gouvernement d'exiger la neutralité religieuse de la part de ses agents de l'État dans les institutions publiques pour renforcer le principe de laïcité de la société québécoise. Cette recommandation s'applique strictement aux institutions qui relèvent du gouvernement du Québec et non à l'espace public en général. De plus, cette recommandation ne concerne ni les jeunes filles ni les jeunes garçons dans les écoles, pas plus que toute autre personne qui bénéficie des services du gouvernement dans ces lieux.
Aucun accommodement pour l'égalité entre les sexes
Pour le Conseil, l'objectif de cette recommandation est de parachever la séparation de l'État et de la religion et la neutralité de l'État. Le principe de séparation des pouvoirs religieux et politique nous paraît en effet essentiel parce qu'indissociable de la promotion de l'égalité entre les femmes et les hommes. Or ce principe serait contredit si les agents de l'État continuaient d'arborer des symboles religieux ostentatoires dans l'exercice de leurs fonctions. Avec les féministes, le Conseil a déjà critiqué le sexisme des institutions religieuses catholiques. Il rejette de la même façon celui qui s'exprime dans d'autres religions.
L'avis démontre aussi que le droit à l'égalité entre les sexes ne doit souffrir d'aucun accommodement: la liberté de religion doit être limitée, intrinsèquement, par le droit à l'égalité entre les femmes et les hommes; l'obligation d'accommodement ne doit pas permettre une violation de l'égalité entre les sexes et, en cas de conflit entre la liberté de religion et l'égalité entre les sexes, il devrait être possible de limiter la liberté de religion au nom de la valeur collective d'égalité entre les femmes et les hommes. L'avis présente en outre des exemples tirés du droit international et des pratiques de certains États, affirmant que la liberté de religion peut être limitée, notamment, par les droits d'autrui.
Pour renforcer le principe d'égalité entre les femmes et les hommes, le Conseil demande donc au gouvernement du Québec d'affirmer haut et fort que l'égalité entre les femmes et les hommes est une valeur fondamentale et structurante. Pour ce faire, l'avis recommande d'amender la Charte des droits et libertés de la personne, d'adopter une politique québécoise de gestion de la diversité religieuse dans les institutions de l'État. Il recommande aussi que la Loi sur l'instruction publique soit modifiée de façon à ce que la valeur d'égalité soit véhiculée dans les politiques d'éducation.
Pour le Conseil, il est essentiel que l'État joue pleinement son rôle de gardien des valeurs démocratiques et de l'ordre public. L'État doit favoriser un espace public où le renoncement à la dignité est impossible et, s'il doit permettre l'expression de croyances religieuses, il doit absolument, au nom des valeurs collectives et du respect de la dignité humaine, y apporter des balises raisonnables.
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Christiane Pelchat, Présidente du Conseil du statut de la femme
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Réplique
S'il est vrai que le dernier avis du Conseil du statut de la femme évite de se prononcer sur le port du voile par les élèves, permettez-nous de rappeler que lors de son passage au Devoir, Mme Pelchat a clairement exprimé sa position «personnelle» sur cette question, laquelle penchait nettement désormais en défaveur du port du foulard dans un espace scolaire, élèves et agents de l'État compris. Le CSF affirme n'avoir eu ni le temps ni les moyens pour creuser, dans sa réflexion, cette délicate et cruciale question du port du voile dans l'espace public; soit. Mais à cet égard, les déclarations de sa présidente étaient toutefois limpides.
Marie-Andrée Chouinard


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