Le pont d’or de Capitaine Canada

Chronique de Louis Lapointe

En proposant de modifier les règles éthiques qui régissent les élus et
ainsi de révéler à la population tous les revenus des membres de
l’Assemblée Nationale, Jean-Marc Fournier tente tout simplement de
banaliser la situation dans laquelle se retrouve son premier ministre. Cela
ressemble étrangement à une manœuvre de sauvetage de dernière minute alors
que le bateau a déjà commencé à couler. La comparaison de la situation de
Jean Charest à celle de Mario Dumont - parce qu’ils ont tous les deux gardé
secrète les rémunérations supplémentaires payées par leurs partis alors
qu’ils occupaient tous les deux les importantes charges de premier ministre
et de chef de l’opposition - ne vise qu’à circonscrire le débat à l’entour
de la question du secret et en quelque sorte à mitiger les dommages
collatéraux que pourrait subir le chef du PLQ dans cette aventure dont les
avocats de Jean Charest ont totalement perdu le contrôle.

Nous savons tous que le problème éthique de Jean Charest ne peut se
résoudre uniquement par la divulgation la rémunération secrète qu’il a
reçue depuis 1998. Le problème est beaucoup plus large. Ainsi, comme en
toute chose, avant d’aborder la situation pour trouver la solution
appropriée, il faut d’abord se souvenir des circonstances de la venue de
Jean Charest en politique québécoise.

Ce n’est un secret pour personne, Jean Charest a toujours souhaité devenir
premier ministre du Canada, le Québec n’a jamais fait partie de ses plans.
Alors qu’il était chef du Parti progressiste-conservateur du Canada à Ottawa, un groupe
de personnalités d’affaires et de politiciens québécois et canadiens l’ont
approché pour l’inciter à faire le saut en politique québécoise. Une sorte
de love-in dont les fédéralistes sont friands lorsque la situation se corse
un peu trop.

Ils l’ont alors convaincu que le Canada avait besoin d’un leader
charismatique capable de vaincre le péril séparatiste qui risquait de
briser le Canada à jamais et que cette personnalité exceptionnelle c’était
lui. Jean Charest était alors vu dans tout le Canada comme celui qui
pouvait le mieux incarner le rôle de Capitaine Canada. La pression était
alors extrêmement forte. Mais pour le convaincre, il fallait prouver le
sérieux de l’opération et ajouter des gestes concrets à la parole.

Un fonds a alors été constitué pour soutenir la candidature de Jean
Charest à l’investiture du Parti Libéral du Québec. Mais la course à la
direction n’a jamais eu lieu et le fonds constitué pour Jean Charest n’a
jamais servi à cette fin. Aux dernières nouvelles en 1998, ce fonds qui
n’était pas soumis aux règles de financement des partis politiques de la
Direction générale des élections du Québec, avait atteint les 500,000$, le
montant des donations comme les noms de ceux qui y contribuaient étant
demeurés secrets. En fait, nous ne savons rien de ce fonds qui soulève de
nombreuses interrogations au sujet de sa valeur exacte, de ses
contributeurs et de son utilisation.

Qu’est-il advenu de ce fonds. A-t-il été transféré au PLQ ? A-t-il été
déposé dans un fonds en fidéicommis au bénéfice de Jean Charest ? A-t-il
été utilisé pour l’achat de biens mobiliers ou immobiliers à l’avantage
personnel de Jean Charest ? A-t-il été donné ou cédé de quelques manières
que ce soit, directement ou indirectement, à Jean Charest ou à des
personnes qui lui sont liées ? Plusieurs questions qui demandent de
nombreuses explications de la part de Jean Charest !

Louis Lapointe

Brossard

-- Envoi via le site Vigile.net (http://www.vigile.net/) --

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L'auteur a été avocat, chroniqueur, directeur de l'École du Barreau, cadre universitaire, administrateur d'un établissement du réseau de la santé et des services sociaux et administrateur de fondation.





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