Le Parti libéral du Québec a vivement critiqué dimanche le projet du gouvernement de la province d'éliminer un arriéré de quelque 18 000 dossiers de demandes d'immigration non traitées.
Dénonçant «l'amateurisme», du projet, Dominique Anglade, porte-parole en matière d'immigration du PLQ, a accusé le gouvernement du premier ministre François Legault de «faire fi de la vie de milliers de personnes».
«Nous avons des gens qui travaillent aujourd’hui, qui payent des impôts ici au Québec, qui sont installés, qui sont parfois avec leur famille, et on dit à ces personnes-là ‘’Ce n’est pas important votre dossier, vous pouvez retourner chez vous’’, a lancé Mme Anglade. Quand on dit ‘’On veut en prendre moins, mais on veut en prendre soin ‘’, comme dit la CAQ, c’est ça, prendre soin du monde?»
Lors d'un point de presse et dans des interviews à des médias québécois, Mme Anglade a affirmé avoir reçu des dizaines de messages exprimant la grande inquiétude de personnes ayant déposé des dossiers d'immigration au Québec, dont certaines sont déjà dans la province francophone.
Les dossiers pouvant concerner des familles, ce sont plus de 40 000 personnes qui sont affectées par la décision, a-t-elle fait valoir.
Campagne de peur
La Coalition avenir Québec (CAQ) a refusé notre demande d’entrevue à la caméra. Dans une réponse écrite, on accuse les libéraux de malhonnêteté.
«Cette campagne de peur du PLQ est indigne, a-t-on répondu. [...] C’est au PLQ d’expliquer pourquoi ils ont été incapables de traiter ces dossiers dans des délais raisonnables. Ce qui a manqué d’humanité, c’est l’inaction libérale.»
Situation d'irrégularité
L'Association québécoise des avocats et avocates en droit de l'immigration dénonce également le projet de loi 9. Elle estime que cette loi place les gens en situation d'irrégularité.
«La CAQ n’expulse pas, mais elle laisse des gens dans une situation d'irrégularité, déplore le président de l’AQAADI, Guillaume Cliche-Rivard. Et 90 jours post-irrégularité, une mesure d'expulsion peut être émise contre nous, et là, le gouvernement fédéral prend sa juridiction avec l'Agence des services frontaliers et, quoi, va expulser des doctorants, va expulser des gens avec des études, des permis? Vraiment, c'est ça qu'on veut?»
Repartir à zéro
Le gouvernement de M. Legault qui a largement battu le PLQ lors des élections provinciales d'octobre 2018 et lui a succédé à la tête de la province, a présenté la semaine dernière un projet de loi visant notamment à mieux adapter la sélection des candidats aux besoins de la province en matière de main d'oeuvre.
En présentant son projet qui prévoit des modifications dans le mode de sélection des immigrants, le ministre de l'immigration Simon Jolin-Barrette avait annoncé son intention de repartir à zéro et de renoncer à traiter quelque 18 000 dossiers en souffrance, qui s'étaient accumulés au cours des dernières années.
Cette mesure vise à mettre fin au principe actuel du «premier arrivé premier servi» qui ne tient pas compte, selon lui, des besoins du marché du travail et de parvenir plus rapidement à la mise en place du nouveau système.
Le ministre avait précisé que le gouvernement rembourserait aux demandeurs les frais de dossiers exigés, une somme qu'il a évaluée à 19 millions de dollars canadiens (12,5 millions d'euros).
Mme Anglade a appelé le gouvernement à affecter plutôt ces 19 millions $ au traitement des demandes en souffrance.
Le projet d'annulation des 18 000 demandes a suscité l'inquiétude de nombreux candidats à l'immigration dont certains ont déjà un emploi ou font des études au Québec, en attente de leur régularisation. Il a également provoqué des critiques au sein d'autres formations politiques.