Statistique Canada nous a dressé cette semaine un portrait détaillé du vieillissement de la population canadienne. Les démographes qui étudient depuis longtemps ce phénomène qui affecte une majorité de pays développés diront qu'il n'y a là rien de bien nouveau, si ce n'est des données précises qui leur permettront de mieux cerner les tendances. Pour le grand public, c'est l'occasion de réfléchir aux enjeux reliés à ce vieillissement.
Ce portrait apparaîtra sombre à certains en constatant que la proportion des personnes âgées de 65 ans ou plus continue de croître. Elle a atteint en 2006 le niveau record de 13,7 % au Canada et de 14,3 % au Québec, alors que la proportion des enfants de moins de 15 ans enregistrait son plus faible niveau, soit 17,7 % pour le Canada et 16,6 % pour le Québec. De recensement en recensement quinquennal, les écarts se creusent. D'ici une dizaine d'années, le nombre d'enfants de moins de 15 ans pourrait devenir inférieur au nombre de personnes âgées de 65 ans et plus.
S'adapter à ces changements est inévitable car il est impossible d'inverser ces tendances. L'espérance de vie augmentant, ce qui est tout de même une bonne nouvelle, le nombre de personnes âgées croît sans cesse. En 2006, il y avait 1,2 million de Canadiens âgés de 80 ans ou plus. Par contre, le taux de natalité demeure stable à 1,6 %, ce qui est loin du taux de 2,1 % nécessaire pour assurer le renouvellement de la population. Il ne faut pas compter par ailleurs sur l'immigration pour contribuer significativement à son rajeunissement puisque l'âge moyen des nouveaux arrivants est de 30 ans.
Certains voient poindre une crise démographique et craignent les pressions qu'elle entraînera sur la population active, sur les régimes de retraite et de santé et sur l'économie en général. Il ne faut cependant pas croire que le pire est assuré. Au contraire, pour peu que l'on s'y prépare, les scénarios catastrophe pourront être évités.
Parce que ce vieillissement de la population était prévisible, les gouvernements ont pris depuis déjà quelques décennies des mesures qui viendront en atténuer les effets. Ainsi, la création du Régime public de pensions du Canada et le Régime des rentes du Québec dans les années 1960 contribuera à assurer un revenu minimum aux personnes âgées, dont une partie peut compter par ailleurs sur une épargne accumulée en prévision de la retraite, notamment à travers des REER ou grâce à leur participation à des régimes de retraite privés. Puis il y a ceux qui, propriétaires de leur résidence, auront vu ces dernières années la valeur de leurs avoirs augmenter. Certes, il y aura des inégalités de revenu. Tous ne seront pas également riches, mais la pression sur les finances publiques ne sera pas aussi grande qu'on peut le craindre. Le fait que la plupart des gouvernements au Canada n'aient plus de déficit et qu'ils aient entrepris de réduire leur dette accumulée leur donnera la marge de manoeuvre nécessaire pour absorber le choc. Retourner temporairement en déficit pourrait alors être justifié.
Les programmes de soutien aux familles, ceux imaginés tout particulièrement au Québec, pourront d'autre part avoir un effet sur le taux de natalité. Le petit sursaut enregistré depuis qu'est entré en vigueur en janvier 2006 le programme d'assurance parentale n'est pas encore une tendance mais, visiblement, tous voudraient qu'elle se confirme. Même ceux qui critiquaient ces mesures jugées trop coûteuses constatent qu'elles correspondent aux besoins exprimés par les parents.
Il sera donc essentiel d'investir dans des programmes qui permettront justement les adaptations nécessaires à la réalité démographique. Il faudra tout particulièrement s'arrêter à l'évolution du monde du travail, où déjà on voit dans plusieurs secteurs la demande devenir plus grande que l'offre. Les employeurs devront modifier leurs pratiques, par exemple à l'endroit des travailleurs âgés, pour permettre des départs progressifs à la retraite et ainsi conserver une main-d'oeuvre précieuse.
Dans un tel contexte, le chômage sera une réalité bien différente de celle qu'on a connue au cours des dernières décennies. Ceux qui entreront à l'avenir sur le marché du travail auront le choix. Mais l'économie du savoir exigera une main-d'oeuvre de mieux en mieux formée et qualifiée. À cet égard, il est difficile de comprendre que le gouvernement Harper donne la priorité à la réduction de la dette et ignore les besoins pressants dans le secteur de l'éducation post-secondaire. Certes, il faut éviter autant que faire se peut de transférer aux prochaines générations le poids de cette dette qui a servi à payer des services à la génération des baby-boomers. En revanche, celles-ci regretteront peut-être davantage qu'on n'ait pas préparé leur avenir en donnant aux collèges et aux universités les moyens de former les meilleurs.
Laissez un commentaire Votre adresse courriel ne sera pas publiée.
Veuillez vous connecter afin de laisser un commentaire.
Aucun commentaire trouvé