MONTRÉAL – Le ministre des Relations internationales, de la Francophonie et du Commerce extérieur, Jean-François Lisée, a empoché simultanément deux gros salaires publics tout l’automne pendant que son gouvernement annonçait des compressions importantes dans plusieurs secteurs.
M. Lisée, qui a confirmé cette situation, a affirmé néanmoins qu'il ne contrevient à aucune règle ou loi.
Également ministre responsable de la région de Montréal, M. Lisée reçoit de l’Assemblée nationale depuis la mi-septembre un salaire de 150 924 $, plus l'allocation annuelle de dépenses non imposables de 15 895 $ et d'autres avantages.
En même temps, il reçoit un plein salaire de l’Université de Montréal de 8666 $ par mois, soit 104 000 $ par année, au moment même où son gouvernement prévoit couper 124 millions $ du budget des universités du Québec, en plus des millions supplémentaires dans toutes sortes de programmes sociaux, a appris l'Agence QMI.
Le ministre empochera son salaire de l’Université de Montréal jusqu’en mars prochain, puisqu’il a signé une entente confidentielle selon laquelle il a pris «une préretraite» de l’institution au printemps dernier, selon des documents obtenus grâce à la Loi sur l’accès à l’information.
Questionné à savoir s’il était approprié pour un ministre de recevoir deux salaires du public alors que son gouvernement procède à de nombreuses compressions, particulièrement celle de 124 millions $ dans les universités, M. Lisée a répondu que, dans son cas, la réponse est oui.
«Je trouve ça normal que la question soit posée, mais je pense que la réponse est bonne», a déclaré M. Lisée à l’Agence QMI lors d’une entrevue téléphonique depuis Washington.
M. Lisée dit avoir présenté les faits il y a cinq semaines au commissaire à l’éthique et à la déontologie du Québec au sujet de sa double rémunération. C’est bien après que l’Agence QMI et «La Presse» n’aient commencé leur enquête respective sur le sujet.
Le commissaire, Me Jacques Saint-Laurent, a informé M. Lisée qu’aucune loi ou règle n’interdisait actuellement un officier élu comme lui, d’empocher deux chèques de paie en même temps.
M. Lisée a remis à l’Agence QMI une copie du rapport de huit pages en date du 27 novembre rédigé par Me Saint-Laurent.
Le rapport statue que, bien que les autres fonctionnaires et adjoints politiques doivent remettre l’argent reçu provenant d’une rente, d’une allocation ou d’une indemnité de départ d’un organisme public, s’ils acceptent un autre emploi dans le secteur public, les députés et ministres ne sont pas soumis à cette règle.
«Le code est silencieux sur cette question particulière», écrit Me Saint-Laurent, avant de recommander à M. Lisée «de faire preuve de prudence en ce qui concerne l'Université de Montréal».
«Si le commissaire à l'éthique avait dit "non, tu ne peux pas faire ça", je n'aurais pas fait ça», a déclaré M. Lisée.
Plein salaire
Selon l’entente signée le 23 mars dernier, Jean-François Lisée a accepté de quitter la direction du Centre d'études et de recherches internationales (CÉRIUM) de l’Université de Montréal et de prendre sa préretraite de l’institution.
En échange, le ministre reçoit son plein salaire de septembre 2012 au 28 février 2013.
Au CÉRIUM, le salaire annuel de M. Lisée était de 104 000 $ selon son contrat d'emploi. Il était à l’emploi de l’Université de Montréal depuis son embauche comme cadre en 2004.
Lorsque les paiements de préretraite de l’université cesseront en mars, le ministre recevra encore de l’argent public, puisqu’un 27 108 $ additionnel, à titre d'indemnité de départ, lui sera versé à l’intérieur de 30 jours.
Cette somme sera directement versée dans son REER, toujours selon les documents. Certains détails quant au versement de ce 27 108 $ à son REER ont toutefois été complètement caviardés du document obtenu.
Le paiement à son REER s’ajoute aux 68 000 $ de pension de retraite qu’il a accumulés.
Il pourra prendre sa rente de retraite une fois qu'il aura atteint l'âge de 55 ans.
Ce n’est pas un parachute, selon Lisée
MONTRÉAL - Jean-François Lisée affirme que son entente de cessation d’emploi avec l’Université de Montréal, qui stipule qu’il prend une préretraite, ne dit pas tout.
«Lorsque j'ai commencé à travailler pour le CÉRIUM, on avait une négociation sur le salaire et ils ne pouvaient pas me donner le salaire que je demandais. L'échelle de salaire ne permettait pas à l'université de payer le prix que je demandais.»
«Donc, ils ont accepté de me donner l'équivalent d'un 13e mois par année, qu'ils me paieraient à la fin de mon emploi, explique M. Lisée. Donc, je l'ai gagné cet argent-là.»
«Ce n’est pas indiqué comme ça dans le document, mais c'est comme ça que ça s'est accumulé [...] Ce n’est pas usuel pour l'Université de Montréal de faire ça [...] J'ai toujours été hors norme, c'est l'histoire de ma vie», a conclu M. Lisée.
« Préretraite »
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