L'automne dernier, La Presse avait publié une enquête sur Sécur-Action, qui gardait le quartier général du SPVM, l'édifice de la SQ à Montréal ainsi que celui qui abrite l'escouade Marteau, alors que la direction de Sécur-Action entretenait des liens avec des gens du milieu de la construction, en particulier Tony Accurso et l'un de ses fils.
Photo André Pichette, La Presse
Fabrice de Pierrebourg La Presse - La firme de sécurité Sécur-Action, évincée l'automne dernier des locaux de la police de Montréal, de la Sûreté du Québec et des deux palais de justice de Montréal, vient malgré tout de voir son permis d'agence de sécurité renouvelé pour trois ans par l'organisme chargé de régir la profession pour le compte du gouvernement, a appris La Presse.
Le «permis d'agence de gardiennage» de la firme administrée par Éric Beaupré, qui arrivait à échéance en mars dernier, a été reconduit jusqu'au 31 mars 2014.
Me Jérôme Dussault, secrétaire du Bureau de la sécurité privée (BSP), explique que «toute agence qui a son permis accordé ou renouvelé a été en mesure de démontrer qu'elle respecte les exigences de la loi et de ses règlements».
C'est la SQ qui vérifie les antécédents des demandeurs pour le compte du Bureau. «Nous faisons ces vérifications à partir de la liste de noms que nous fournit le BSP, explique Martine Isabelle, porte-parole de la SQ. Le Bureau décide ensuite d'accorder ou non le permis en fonction des renseignements que nous lui avons fournis et avec l'outil qu'il a, c'est-à-dire la loi.»
Déjà, à l'époque, Jean-Guy Dagenais, qui dirigeait alors l'Association des policiers provinciaux du Québec, avait invité le gouvernement et le Bureau de la sécurité privée à «refaire leurs devoirs» puisque, selon lui, «il y en a qui se sont faufilé dans les mailles du filet» de la nouvelle loi adoptée en 2006. Celle-ci devait resserrer les règles d'attribution des permis et assainir la profession.
La donne pourrait changer bientôt. Le ministre Dutil a déposé mi-mai un projet de loi qui donnera un tour de vis à cette loi et rendra la SQ plus «proactive».
On note en particulier «l'obligation de la Sûreté du Québec (SQ) de donner son avis au Bureau de la sécurité privée (BSP) quant au respect des conditions par les demandeurs de permis», et un élargissement de ses vérifications à une «seconde couche» d'actionnaires «lorsque le propriétaire, un actionnaire ou un associé est une société ou une personne morale», pour éviter le recours aux prête-noms. Mais ce sera toujours le BSP qui aura le dernier mot.
La SQ pourra aussi à tout moment faire des vérifications sur une agence dont le permis est valide. Le BSP peut déjà révoquer ou suspendre un permis en tout temps.
Résiliations en cascade
L'automne dernier, La Presse avait publié une enquête sur cette firme, choisie par l'ex-chef de police Yvan Delorme pour garder le quartier général du SPVM, rue Saint-Urbain. Sécur-Action avait remplacé au pied levé la firme BCIA, propriété de Luigi Coretti, elle-même éclaboussée par la controverse avant de déclarer faillite.
Sécur-Action gardait aussi l'édifice de la SQ à Montréal ainsi que celui qui abrite l'escouade Marteau, alors que la direction de Sécur-Action entretenait des liens d'affaires et même d'amitié avec des individus du milieu de la construction, en particulier Tony Accurso et l'un de ses fils.
La Presse avait aussi révélé les fréquentations et antécédents judiciaires du directeur des opérations de cette firme et bras droit d'Éric Beaupré. Ce cadre avait déjà été accusé d'extorsion et de voies de fait graves, en plus d'avoir été condamné à un an de prison à purger dans la communauté pour production de marijuana. Ce passé judiciaire avait échappé à la SQ et au BSP puisque ce cadre était considéré par Sécur-Action comme ayant un simple rôle administratif qui ne nécessitait pas de permis d'agent. Son existence était donc passée sous le radar des autorités.
Dans la foulée de ces révélations, et après avoir mené ses propres enquêtes, le maire de Montréal et son nouveau chef de police, Marc Parent, avaient évincé Sécur-Action des locaux du SPVM. La SQ et le ministère de la Sécurité publique leur avaient emboîté le pas en résiliant leurs contrats avec cette firme.
La SQ avait justifié ainsi sa décision: «Les vérifications débutées depuis déjà quelques jours et des informations additionnelles récemment obtenues l'amènent à résilier ses liens contractuels avec ladite agence.»
Comment expliquer que, sept mois plus tard, l'enquête de la SQ ait permis à Sécur-Action de conserver son permis alors qu'elle est persona non grata dans ses propres locaux? «Nos exigences sont plus sévères et on ne peut laisser planer aucun doute», dit Martine Isabelle.
Le 27 mai, le sous-ministre des Affaires municipales Marc Lacroix a informé le DG de Montréal que ses vérificateurs allaient se pencher sur le processus d'attribution des contrats du SPVM à des firmes de sécurité privées.
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