Dette américaine

Le contresens

«La capitulation d'Obama est abjecte.»

Crise mondiale — crise financière


Aussi déprimant que dangereux. Quoi donc? L'accord sur la dette que les élus américains ont fini par adopter après des mois de disputes imbibées par une forte dose d'irresponsabilité, d'illogisme, de contresens, augmentées d'une dose de fanatisme. C'est bien simple, la grande majorité des économistes hurlent à l'unisson que l'entente avalisée par le président Obama va aggraver la santé déjà fragile de l'économie du pays. Beaucoup d'entre eux avancent même que le chef de l'exécutif fait la même et grossière erreur que celle que Franklin Delanoe Roosevelt avait commise en 1937. Croyant que la dépression était chose du passé, ce dernier avait élaboré un budget à l'enseigne des compressions, de l'austérité. Résultat? Quelques mois plus tard, le pays sombrait à nouveau en récession.
Signe avant-coureur d'un possible rendez-vous avec la récession, les marchés ont dégringolé, ainsi que le symbolise la perte de 2,65 % de l'indice Dow Jones. À ce propos, il faut préciser que ce dernier ainsi que le Standard and Poor's n'ont pas cessé de retraiter au cours des sept dernières séances parce qu'on appréhende justement une autre contraction économique, que certains prédisent d'ailleurs pour l'automne, après un premier semestre au terme duquel la croissance du PIB a été de 0,8 %. Bref, les États-Unis sont en stagnation.
Parce qu'il savait cela, Obama avait le devoir de prendre de la hauteur. Plus exactement, il avait le devoir d'imposer un plan alliant réductions des dépenses et augmentations des revenus. Cette responsabilité lui incombait, non seulement pour le bien-être des Américains, mais pour le reste du monde. Car en Asie comme en Europe, les marchés aussi reculent, reculent, reculent, très inquiets que la gestion cahoteuse de ce dossier ajoute son lot de difficultés à la gestion tout aussi cahoteuse de la crise de l'euro.
Cette histoire laisse un goût d'autant plus amer que le calcul politicien, plus précisément l'opportunisme électoral, a pris le dessus sur les obligations qui reviennent au chef de l'État. De quoi s'agit-il? Ici et là, on assure qu'à la faveur des négociations sur la dette, Obama a multiplié les concessions pour ramener le plan en question à la discipline budgétaire avec l'espoir de séduire les électeurs indépendants en vue des prochaines présidentielles.
Le président des États-Unis d'Amérique avait la possibilité, dès décembre dernier, de faire savoir aux membres du Parti républicain, grand responsable du marasme économique dans lequel nous sommes plongés, qu'il userait du droit de veto à l'égard de tout scénario interdisant toute offensive sur le front des revenus, des impôts. Il avait cette possibilité et il n'a rien fait. Pire, il a attendu la dernière minute en espérant une entente bipartisane avec une formation prise en otage par les fous furieux du Tea Party. Au fond, le dernier mot appartient à Paul Krugman, Prix Nobel d'économie et chroniqueur au New York Times: «La capitulation d'Obama est abjecte.»


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