La recommandation de nommer un juge unilingue à la Cour suprême du Canada crée des remous. Après l’opposition hier, c’est au tour du Barreau, aujourd'hui, de dénoncer la situation.
«C’est une question d’égalité de tous devant la loi, de respect de la Constitution, qui prévoit que le français et l’anglais sont des langues égales», a plaidé en entrevue Me Claude Provencher, directeur général du Barreau du Québec.
«Le citoyen qui se présente en cour doit avoir le sentiment d’être compris et de pouvoir parler sa langue maternelle, si elle est une des deux langues officielles du pays. C’est extrêmement important; ce n’est pas un détail pour nous. C’est une question d’accès à la justice», a-t-il ajouté.
Le Barreau du Québec demande carrément au gouvernement fédéral de revoir sa recommandation, après qu’il ait recommandé la nomination de deux juges, hier, dont un unilingue anglophone au plus haut tribunal du pays.
Hier, le gouvernement a recommandé la nomination des juges Andromache Karakatsanis et Michael J. Moldaver, ce dernier étant unilingue anglophone. La juge Karakatsanis s’exprime en français, en anglais et en grec.
Ce n’est pas le fait d’être unilingue anglophone qui agace le Barreau, prend soin de préciser Me Provencher, mais d’être unilingue tout court. Il assure que le Barreau critiquerait tout autant la nomination d’un juge unilingue francophone à la Cour suprême. Mais cela ne s’est jamais produit dans l’histoire de la Cour suprême, souligne-t-il.
Même si le tribunal peut être doté d’un interprète, Me Provencher objecte que ce n’est pas la même chose que d’être compris dans sa langue par le juge, puisqu’un interprète constitue un filtre et qu’on peut y perdre des nuances.
Au total, cela porte à deux le nombre de juges unilingues sur les neuf juges qui siègent à la Cour suprême du Canada, souligne le Barreau du Québec.
Un recul des droits des francophones
Le bâtonnier du Québec, Me Louis Masson, estime qu’il s’agit là d’un recul pour les droits des francophones au pays, puisque les deux juges dont les postes étaient à pourvoir étaient bilingues.
Le Barreau du Québec plaide depuis des années pour que tous les juges de la Cour suprême puissent entendre une cause dans les deux langues officielles du Canada sans l’aide d’un interprète. Me Provencher trouve donc «très décevant, extrêmement décevant» que ce plaidoyer n’ait pas été entendu, d’autant plus qu’il est porté également par le Bloc québécois et le Nouveau parti démocratique, notamment.
Comme il ne s’agit pour le moment que d’une recommandation, le Barreau du Québec ne baisse pas les bras. «Le premier ministre a proposé deux candidats qui doivent se présenter devant un comité, alors on peut espérer que si ce ne sont encore que des candidats qui doivent se présenter devant un comité, le comité devrait pouvoir remettre en question la nomination officielle d’une personne qui n’a pas les compétences linguistiques minimales», a dit espérer Me Provencher.
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