Le 75% d’Hollande, un mauvais calcul

Si on est riche, il faudra être héroïque pour rester contribuable en France, si Hollande gagne.

Le néo-libéralisme-à-la-con, décrit avec l'innocence du berceau.

Dans un récent billet intitulé « la campagne électorale de la vérité » j’écrivais : « Dès sa rentrée au pouvoir, Sarkozy a fait adopter « le bouclier fiscal » qui limitait l’impôt à 50% (aux USA, elle est près de 35%) Cette loi visait à permettre à la France de devenir fiscalement concurrentielle avec les autres pays européens. Trop de Français allaient déposer leurs fonds ailleurs et y trouvaient résidence pour payer moins d’impôts. La France se devait de redevenir attractive. Les critiques ferment les yeux devant le fait que ce sont avec le talent des meilleurs et les investissements des plus riches qu’un très grand nombre d’entreprises voient le jour et que de nouveaux emplois sont créés. De plus, l’impôt payé ailleurs n’est pas payé en France ». Ça demandait du courage politique pour implanter une telle mesure.
Le parti socialiste et son candidat François Hollande n’ont cessé de dénigrer le président Sarkozy depuis l’adoption de ce « bouclier fiscal » qu’ils savaient de toute évidence impopulaire. L’antisarkozysme est né à ce moment-là et il s’est amplifié malgré que cette politique ait diminué de 15% par an le nombre d’exilés fiscaux. En fin de mandat, Sarkozy l’a abolie pour calmer les esprits. A mon avis, ce fut là son erreur parce que la fiscalité d’un pays doit être stable pour que les gens y investissent pour le long terme. Si Sarkozy perd son poste, ce sera principalement à cause du bouclier.
En début de campagne, Hollande, en bon socialiste, à déclaré que « la finance était son vrai adversaire ». Il vient de promettre d’ajouter une tranche de 75% pour le calcul des impôts personnels de ceux qui feront un revenu de plus d’un million d’euros par an (en plus, d’avoir déjà promis, une autre tranche additionnelle de 45% pour les revenus supérieurs à 150 000 euros).
La France est au troisième rang mondial en termes de millionnaires. À mon point de vue, Hollande s’apprête à faire une erreur magistrale de la même nature que celle des 35 heures de Martine Aubry. Il pousse même l’effronterie jusqu’à qualifier son 75% d’un « message de cohésion sociale et un acte de patriotisme ». Il ne le demande pas, il l’impose aux ultra-riches en posant un geste électoraliste, purement symbolique et démagogique. De prime abord, il est clair que ce 75% générera un nombre croissant et fort important de nouveaux exilés fiscaux et qu’il rapportera peu à l’État par rapport à ce qu’il lui fera perdre. Hollande lui-même a confirmé que le 75% ajoutera « zéro » au budget. Même cette affirmation est erronée puisque ce sera pire, comme je vais le démontrer ci-après.
Un vrai message de cohésion sociale aurait été de demander à tous les Français et Françaises de poser un acte de patriotisme en acceptant, par leur vote, des contraintes de dépenses gouvernementales pour faire face à la réalité économique actuelle. Là, Hollande aurait été courageux !
Comme il est facile de faire une promesse électorale de 75% qui affecte monétairement peu de gens! De telles promesses viennent normalement de la bouche de petits politiciens qui ne pensent qu’à gagner des votes au détriment même de l’intérêt de l’État. Pour réussir, ces derniers comptent sur les sentiments de jalousie ou d’envie envers ceux qui ont réussi et qui ont plus de revenus.
Qu’est-il en fait cet intérêt de l’État, si ce n’est d’assurer une société où chacun peut bien vivre, s’épanouir, élever et éduquer sa famille dans les meilleures conditions possibles et être heureux ? Pour ce faire le gouvernement doit assurer à chaque individu une vie démocratique saine et libre, la possibilité de travailler, de développer ses talents, d’atteindre son épanouissement personnel maximal et de protéger les plus pauvres et les moins nantis. Pour atteindre son but, le gouvernement a besoin d’aide car ce n’est pas lui qui crée tous les emplois nécessaires au développement de la société. En réalité, il en crée peu. Le gouvernement a besoin de l’effort, de l’intelligence, de la capacité de développement et de l’effort financier du secteur privé pour assurer que son économie réponde à sa mission.
Nulle part en Europe, il n’existe une tranche d’impôt à 75%. Elle est normalement à 50% et moins. Au Canada, elle est à 48,2 % et je considère que notre taux est bien balancé par rapport aux besoins de l’État et aux services qu’il nous offre. Aux USA, elle est à 35%. Mitt Romney, le candidat favori à la « primaire » républicaine, qui a veut assurer le financement privé de son élection, propose, en désespoir de cause, de la diminuer à 28%. Il exagère dans le sens inverse d’Hollande mais pour le même motif : il ne pense qu’à son élection. Face à ces chiffres, la France ne sera plus attractive et deviendra vitement non concurrentielle.
En réaction, François Bayrou, candidat du centre à la présidentielle française a déclaré "Le déconnomètre marche à plein tube", ajoutant « ces gens vont aller se faire payer à l'étranger. Ils ont tous des filières multiples et variées, des moyens de délocaliser leurs salaires », a-t-il estimé. L’impôt qui devrait être versé en France sera payé ailleurs. De plus, les sièges sociaux d’entreprises industrielles françaises pourront aller indifféremment en France, à Bruxelles, à Londres ou ailleurs car la fiscalité compte dans la prise d’une telle décision. Les riches ont les moyens de se payer les services de conseillers en optimisation fiscale.
David Douillet, le judoka médaillé d’or aux Olympiques et ministre des sports de la France vient de préciser un des aspects négatifs du 75% d’Hollande. « Il va tuer le sport français", a-t-il dit et estime que « 120 à 125 joueurs de football de la ligue 1 sont touchés », « Les joueurs partiront instantanément de France, ils en ont les moyens", a prédit le ministre. "Cela veut dire aussi que les 600 millions d'euros qui proviennent de la fiscalité du foot français vont disparaître, que les 5% des droits TV du foot reversés aux autres sports disparaîtront aussi puisqu'il n'y aura plus de droits télé ». Avec les pertes que subiront les stades français. « Nous en sommes à déjà 1 milliard de pertes », a-t-il ajouté. Et vlan !
Il est de même pour les artistes du cinéma comme Jean duJardin, le récent récipiendaire de l’oscar du meilleur acteur dans le film l’Artiste. Demeurera-t-il en France ?
Il est clair que le 75% d’Hollande est un super-impôt spoliateur unique qui nie les réalités du monde d’aujourd’hui.
L’argent qui sera pris par l’État ne sera plus disponible pour le financement de nouvelles entreprises. Les riches ne laissent pas leur argent dans des sacs pour l’admirer. Ils cherchent les meilleurs placements pour les faire croître. Et parmi ceux-là, il y a le capital de risque qui permet à de jeunes entrepreneurs de concrétiser leurs idées et de lancer leurs affaires. Apple, Facebook, Google, Ubisoft et tant d’autres aux USA et en France sont devenus des compagnies mondiales importantes grâce aux investissements de personnes riches qui ont cru dans les talents de leurs créateurs. Ces investissements devenant moins disponibles, la création d’emplois en France en souffrira.
Depuis toujours, les socialistes reprochent aux riches de s’amuser avec leurs bijoux : yachts démesurés, maisons-châteaux, vignobles, avions personnels, produits haut-de-gamme, etc…Or beaucoup de ces choses sont construites et réalisées par des ouvriers et des professionnels français. Que le riche ait un gros yacht, je m’en foute royalement. Tant mieux pour lui. Ce que je vois, c’est l’entreprise qui a construit le yacht, la marina qui le protège, les marins et le personnel qui le dirigent, etc.. toute la chaîne des activités économiques qu’il génère et attire. Ce n’est pas le gouvernement qui peut faire cela.
Hollande justifie son 75% en rappelant les années difficiles en Amérique durant lesquelles les impôts des riches ont touché 80%. Mais c’était durant la guerre mondiale et l’après guerre, où tout l’argent des Américains fut en grande partie réquisitionné pour vaincre les nazis, remonter leur pays et aider l’Europe, via le Plan Marshall, à se rebâtir. De plus, il donne l’exemple récent de l’américain Warren Buffet, l'un des hommes les plus riches du monde, qui s’est indigné du fait qu'il paye un taux d'imposition inférieur à celui de sa secrétaire. Elle paie 30% d’impôt alors que son taux est à peine 15%. Cela n’a rien à voir avec le 75% d’Hollande. De faux arguments pour une politique fausse à sa base. Avec 75% Buffett n’aurait pas eu les moyens de sauver les centaines d’entreprises dans lesquels il a investi massivement.
Le 75% est le résultat de l’antisarkozysme. Plusieurs Français semblent avoir gobé, depuis 2007, les sornettes démagogiques et répétées des socialistes sans vraiment chercher à comprendre le pourquoi des mesures du président sortant. Aujourd’hui, on leur propose une mesure fiscale qui va nuire considérablement à la France et les mêmes applaudissent. Que les riches s’exilent et paient leurs impôts ailleurs, que les jeunes de talent aient moins d’investisseurs, que d’innombrables nouveaux emplois ne se réalisent pas, que le « foot » s’efface, qu’ils y aient moins de production et de construction de bâtiments et de produits haut de gamme, que la France perde de son attrait financier et devienne moins concurrentielle, etc.. on applaudit.
Si on est riche, il faudra être héroïque pour rester contribuable en France, si Hollande gagne.
Claude Dupras


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3 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    8 mars 2012

    Des rumeurs laissent en effet entendre que les 75% de Hollande ne seront jamais appliqués...
    Idem pour la séparation des banques d'affaire et de dépôt qu'Hollande a également annoncée.
    Hollande ne serait pas le nouveau Roosevelt mais plutôt le nouveau Hoover, surnommé à l'époque "Mister Do Nothing"
    Pour l'obliger à tenir ses engagements s'il est élu, signez le manifeste :
    Roosevelt 2012
    lancé par Stéphane Hessel, la fondation Danielle Mitterrand, Fondation Abbé Pierre et 40 personnalités
    http://www.roosevelt2012.fr/

  • Archives de Vigile Répondre

    4 mars 2012

    Et durant le New-Deal de Roosevelt, il était à combien le taux d'imposition?
    Les vautours ont provoqué la crise de 2008 et ils s'attaquent désormais aux États. Ne croyez-vous pas que les États ont le droit de se défendre?
    Nous sommes en état d'urgence, monsieur Dupras et à état d'urgence correspond une médecine fiscale d'urgence comme l'a fait Roosevelt après la crise de 1929.
    Plus on est riche, plus le taux d'imposition est faible, en France comme ailleurs. Comme dit un journaliste de Marianne, les privilégiés du fric sont devenus les assistés du fisc.
    Pierre Cloutier

  • Archives de Vigile Répondre

    4 mars 2012

    Monsieur Dupras,
    Voici un supplément d'information à votre article :
    http://rutube.ru/tracks/5375604.html
    Guy Le Sieur
    Vive la République de l"Amérique française